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CINECURE
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Cinécure est un site appartenant à Charles Declercq et est consacré à ses critiques cinéma, interviews sur la radio RCF Bruxelles (celle-ci n’est aucunement responsable du site ou de ses contenus et aucun lien contractuel ne les relie). Depuis l’automne 2017, Julien apporte sa collaboration au site qui publie ses critiques et en devient le principal rédacteur depuis 2022.

Tobe Hooper (1969)
Eggshells
Visionné le 7/3/15 dans le cadre de OFF SCREEN !
Article mis en ligne le 8 mars 2015

par Charles De Clercq

Le tout premier film de Tobe Hooper était jusqu’il y peu considéré comme perdu. Une copie a été retrouvée, restaurée et le film - tourné en 16 mm - est présent sur le dvd bonus du coffret collector de Massacre à la tronçonneuse, paru le 3 décembre 2014.

Sachant d’une part, que le film serait projeté lors du Festival OFF SCREEN dans le mythique cinéma Nova et, d’autre part, que Tobe Hooper serait présent au Festival, j’ai attendu celui-ci pour le visionner... dans une vraie salle avec un public probablement conquis à l’avance.

Et, de fait, Tobe Hooper qui avait une master class à la Cinematek à rejoint les spectateurs du Nova. Ceux-ci ont sagement attendu la venue du maître malgré la demi-heure nécessaire de retard sur l’horaire prévu. La projection fut précédée de deux de ses courts-métrages. Tobe fut vivement acclamé et ma surprise fut grande de voir arriver un « vieux monsieur » (mais à peine dix ans de plus que moi !). En fait, je faisais une expérience analogue à celle du concert de Sixto Rodriguez à Bruxelles (Ancienne Belgique, le 5 avril 2014). Le chanteur était très diminué, ses performances en deçà de ce qu’elles avaient été et pourtant la salle lui était acquise. Il me semblait qu’il en était de même avec le mythique réalisateur. Sa voix, son discours étaient en retrait de ce que ses films laissaient entendre. Pourtant, le peu de choses exprimées a suscité notre enthousiasme : l’échec radical de ce premier film, tourné avec très peu de moyens, qu’il considère comme une œuvre essentielle, radicale même.

En amuse-bouche, deux courts. Tout d’abord The Heisters (1964) apparaît comme le plus abordable de la soirée. Le plus « rationnel » de trois films qui paraitront au mieux « psychédéliques » et au pire, farfelus ou insensés. Ceci est écrit sans jugement de valeur, comme simple regard extérieur. Le deuxième Down Friday Street (1966 selon le Festival, mais aux environs de 1970 selon Dolph Briscoe Center for American History) annoncé comme « restauré » m’a plus donné l’impression que le film était encore à restaurer. Mais peu importe. Abscons et quasi incompréhensible selon une grille de lecture rationnelle, il me préparait d’une certaine façon à l’expérience Eggshells !

La salle était comble et nombre de spectateurs étaient l’équivalent de geeks en informatique. Autant dire que j’étais largué depuis longtemps lorsque je les entendais disserter sur ces œuvres considérées au mieux comme mineures par ceux qui se considèrent comme de « vrais cinéphiles ». Je n’ai pas ces aprioris et j’étais ouvert à tout ce que j’allais découvrir. Il y a cependant des spectateurs qui ont quitté la salle durant la projection. Mon hypothèse : ils s’attendaient à un film d’horreur et ce n’en était pas un, même s’il est question de maison hantée !

L’expérience que j’ai faite est la même que pour un autre premier film, Eraserhead, de Lynch. J’aurais pu faire allusion à un autre premier, celui de Kubrick, mais ici le réalisateur renie celui-ci au point d’avoir voulu en détruire toutes les copies. En revanche, Hooper reconnaît encore sa valeur à celui-ci et en regrettait la perte !

Eggshells a ceci de commun avec Eraserhead (1977) son caractère à se point ésotérique qu’il en est presque incompréhensible et avec Fear and Desire (1953) que le cinéphile n’a pas toujours intérêt à vouloir découvrir les œuvres premières d’un réalisateur de génie ou en tout cas reconnu et apprécié parce qu’offrant des films « culte ».

Si les spectateurs (majoritaires) qui sont restés ont applaudi à tout rompre à la fin de la projection ce devait être pour le film (dont ils avaient probablement plus de clés de lecture que moi), mais aussi en hommage au réalisateur.

En effet, il faut reconnaître que même si Eggshells avait pour moi un caractère étrange (nous sommes dans le festival de l’étrange) et que s’il ne m’a pas touché au niveau du cœur et des tripes, il a interrogé ma tête ! Nous sommes en pleine période hippie (juste avant l’affaire Manson) en contestation radicale des institutions établies (y compris donc les pontes d’Hollywood et du cinéma en général). Hooper relate cela : l’histoire de plusieurs hippies nous est offerte, comme fil conducteur, sans tête ni queue (quoique l’on voit pendant quelques secondes un hippie dénudé !) dont un couple a des conversations « philosophiques » dans une baignoire. A cela s’ajoute un cinéma des plus expérimental : un hippie se bat, souvent en accéléré, contre lui-même. Il y a de nombreux effets visuels et sonores, de la peinture sur la pellicule...

Pour comprendre un peu plus la démarche du réalisateur, voici deux vidéos, proposées par le site 1kult dans un article de Sylvain Perret, daté du 24/09/10.

Tobe Hooper présente le film lors de sa diffusion à l’Etrange Festival de Paris 2010 ; il s’exprime en anglais, mais ses interventions sont résumées en français par l’animateur.

Etrange Festival // 18. Présentation de Eggshels
1Kult

Etrange Festival // 19. Eggshels : le débat
1Kult

Source des illustrations et des vidéos.



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