Synopsis : Le récit biblique et épique de Noé et son arche...
Acteurs : Russell Crowe, Jennifer Connelly, Emma Watson, Anthony Hopkins, Logan Lerman, Sami Gayle, Kevin Durand, Ray Winstone.
Fasciné par le personnage et le mythe de Noé depuis l’âge de 13 ans, Darren Aronofsky adapte celui-ci en bande dessinée en 2011 et aujourd’hui au cinéma avec Noé qui sort sur les écrans.
Avant même d’avoir été projeté, ce dernier long métrage fait déjà l’objet de controverses dans certains milieux religieux juifs, musulmans, chrétiens, qui lui reprochent d’être beaucoup trop sombre, de représenter un prophète en images, de prendre trop de libertés par rapport au récit biblique.
Ce film est donc une occasion d’ouvrir la Bible. Dans le livre de la Genèse, aux chapitres VI à IX (une histoire sans dialogues), Noé est un patriarche multi-centenaire connu pour l’épisode du déluge. Après lecture on constate qu’il y a de fameuses adaptations par rapport au récit. Le réalisateur le reconnaît volontiers, lui qui aime filmer des histoires extraordinaires et les narrer de façon audacieuse.
Pour rendre compte des aventures de Noé, Aronofsky s’écarte de la lecture littérale du texte biblique et plonge dans ses propres écritures juives, dans la Bible, mais aussi dans des apocryphes : l’Apocalypse de Noé, le livre des Jubilés, le livre d’Énoch. Les récits apocryphes ne sont certes pas reconnus dans les canons officiels mais ils sont bien présents dans notre propre tradition chrétienne, notamment dans des développements de l’enfance du Seigneur. Si nous appliquions une règle de conformité aux sources, il faudrait supprimer les références aux parents de Marie, enlever l’âne et le bœuf de nos crèches ou certaines stations de nos chemins de croix !
Ces amplifications épiques attestent d’une dynamique constante dans le christianisme : la représentation et la relecture des récits en images et en histoires. Les tympans et les vitraux des cathédrales, les passions théâtrales, les chemins de croix, les livres de catéchèse illustrés en sont autant de témoins. Pourquoi alors le cinéma – art de la narration – ne pourrait-il pas mettre en images des récits qui ne demandent qu’à être racontés et transmis ?
C’est ici un réalisateur juif qui le fait. Il puise dans ses racines pour relire ces récits qui eux-mêmes se sont appropriés des mythes plus anciens encore. Difficile dès lors de revendiquer un droit de propriété sur un « bien culturel » qui échappe à toute maîtrise.
Ce sixième film d’Aronofsky n’est peut-être pas le meilleur ce qui ne l’empêche pas d’être actuellement en tête du box office outre-Atlantique. Le réalisateur semble avoir voulu transmettre sa foi à travers un récit qui, au-delà des interprétations littérales ou symboliques, peut rendre compte de questions encore d’actualité aujourd’hui : le mal et la violence, le rapport à la nature, la volonté de survie…
Il le fait avec les moyens, les outils et les codes de son septième art. Qu’on les apprécie ou non, ce film peut nous inciter, en cette approche des fêtes pascales, à nous plonger dans nos récits fondateurs pour y relire l’histoire de Noé et en discuter, par exemple, dans un groupe biblique !