Genre : Thriller
Durée : 95’
Acteurs : Jai Courtney, Hassie Harrison, Josh Heuston...
Synopsis :
Zephyr, une surfeuse intrépide au tempérament libre, est kidnappée par un tueur en série obsédé par les requins. Séquestrée sur son bateau et confrontée à la folie de son ravisseur, elle va devoir se battre pour survivre face à tous les prédateurs...
La critique de Julien
Présenté en avant-première au Festival de Cannes 2025 dans le cadre de la Quinzaine des réalisateurs, "Dangerous Animals" n’est pas (qu’)un énième film de genre mettant en scène de pauvres innocent.e.s servant de chair à pâté à des requins affamés. En effet, le film de l’Australien Sean Byrne - à qui l’on doit les inédits "The Loved Ones" (2009) et "The Devil’s Candy" (2015) - est bien plus que cela, et même une jolie surprise estivale au rayon des thrillers horrifiques. Car tel que le titre le laisse présager, les squales ne sont pas ici les seuls dangereux animaux dont il faut se méfier, que l’on soit en pleine mer, ou sur la terre...
"Fini les préliminaires, il est temps de se mouiller !"
Écrit par le nouveau venu Nick Lepard - qui signera également le scénario du prochain film d’Osgood Perkins, "Keeper" (2025) - et retravaillé en collaboration avec le réalisateur lui-même, "Dangerous Animals" ne tarde pas à plonger le spectateur dans le vif du sujet. À peine la "Tucker’s Experience" commence-t-elle pour deux touristes - une attraction en cage avec des requins - et dirigée par l’excentrique capitaine Tucker (Jai Courtney), que ceux-ci en deviennent les victimes. Mais pas de qui l’on pourrait croire. En effet, ce dernier, marqué à jamais par une attaque de requin dont il a survécu enfant, offre désormais en pâture de jeunes femmes aux squales, lui qui vénère les requins comme des dieux ("Dieu est dans les profondeurs, là où tout a commencé"), tout en filmant ce qu’il considère être un véritable "spectacle". Zephyr (Hassie Harrison), une jeune surfeuse forte et solitaire, vivant librement dans son van, dissimule une toute autre profonde fragilité, elle qui repousse les autres, au contraire de Tucker, qui s’impose à eux. Coincée dans une prison intérieure, maltraitée par la vie, elle tombera à son tour dans les filets du serial killer. Sa lutte pour la survie prendra alors une tout autre tournure... En effet, le scénariste Nick Lepard n’épargne en rien son héroïne, qu’il malmène ici jusqu’au bout, tandis que Sean Byrne s’en donne à cœur joie pour filmer son instinct de survie face aux dents acérées de Jai Courtney, épatant en psychopathe "pollueur d’océan". Son interprétation, et son personnage, permet d’ailleurs de rétablir l’injuste idée préconçue - depuis "Les Dents de la Mer" (Spielberg, 1975) - selon laquelle les requins seraient de véritables monstres, alors qu’il s’agit avant tout des humains. Haletant d’un bout à l’autre, et porté par la musique brutale et angoissante de Michael Yezerski, le film de Sean Byrne ne cesse alors de naviguer en eaux troubles, et de manière intelligemment mordante.
"Baby shark, doo, doo, doo, doo, doo, doo..."
Filmé au large de la Gold Coast, région côtière de l’État du Queensland, "Dangerous Animals" se révèle sans cesse animé par une tension grandissante et parfaitement orchestrée, lequel se regarde comme un redoutable appât pour le spectateur, et d’autant plus pour celui qui a le mal de mer, quitte à s’en ronger les ongles. À la lumière de la personnalité de Zephyr, jouée par l’actrice Hassie Harrison (vue dans la série "Yellowstone" de Taylor Sheridan et John Linson), qui n’est pas du genre à rester menottée, et à attendre patiemment sa sentence, le film joue du début à la fin avec nos nerfs (et pas que les nôtres). Rythmé par les tentatives d’évasion en tous genres de son héroïne, tout en mêlant à l’intrigue l’intervention d’un agent immobilier sentimental (Josh Heuston) rencontré quelques heures avant l’enlèvement lors d’une aventure d’un soir, le film ne fait dès lors pas qu’une seule victime. Agrémenté d’autant plus d’éléments de body horror, les amateurs du genre, ainsi que ceux venus chercher un peu de frayeur, ou ressentir un sentiment d’effroi, devraient y trouver leur compte. Pour autant, le film de Sean Byrne ne réinvente rien au genre, tout comme ses effets spéciaux en post-production. Cependant, il lui apporte une nouvelle lecture, diaboliquement efficace. Car ce ne sont définitivement pas ici les attaques de requins qui l’emportent, mais la torture psychologique et physique infligée à ses victimes par un prédateur humain. Jusqu’à ce que la proie se révèle plus forte, plus rusée que ce dernier, inversant ici une certaine conception de la hiérarchie du règne animal, et contrebalançant avec l’image défendue par le vrai agresseur du film, selon laquelle le marlin ignore que ses tentatives d’évasion sont vaines, et qu’il sera toujours pris à l’hameçon du pêcheur. Ce changement de ton marque aussi l’évolution du personnage de Hassie Harrison. Effectivement, la demoiselle en viendra à briser la glace, à reconsidérer sa vision du monde, à communiquer plutôt que de s’en cacher, tout en laissant enfin parler ses sentiments, et en se lançant... à l’eau, notamment envers le séduisant Moses, avec lequel elle partage finalement bien plus qu’une simple admiration pour le groupe des années 70 Creedence Clearwater Revival. Et quand retentit le clin d’œil final, à la fois sensé et plein de second degré, à leur titre "Ooby dooby", difficile de ne pas esquisser un sourire !
