Genre : Thriller, science-fiction
Durée : 120’
Acteurs : Allison Williams, Amie Donald, Violet McGraw, Timm Sharp, Jemaine Clement...
Synopsis :
Deux ans ont passé depuis la destruction de M3GAN, le prototype à la pointe de l’intelligence artificielle devenu incontrôlable lors d’un carnage sanglant. Sa créatrice Gemma, aujourd’hui auteure de renom, milite pour l’encadrement drastique des I.A par le gouvernement, alors que Cady, sa nièce de 14 ans entre dans l’adolescence et se rebelle contre les règles trop strictes de sa tante. Cependant, à l’insu de tous, la technique de pointe mise au point pour M3GAN a été volée et détournée pour créer une arme militaire connue sous le nom d’AM3LIA. À mesure que se développe la conscience de ce bijou d’espionnage, implacable machine à tuer, les ordres qu’elle reçoit lui paraissent de plus en plus superflus. Comme les humains qui les lui donnent. Alors que l’avenir de l’humanité est en jeu, Gemma réalise que M3GAN est sa seule option. Elle la réactive alors et la reprogramme dans une version encore plus rapide, plus puissante et implacablement létale.
La critique de Julien
Il y a deux ans sortait dans les salles l’inclassable pétard rouillé "M3gan" (acronyme de "Model 3 Generative Android", orthographié "MΞGAN" dans sa promotion), soit un délire imaginé par le maître de l’horreur James Wan, coproduit par Blumhouse Productions et écrit par Akela Cooper, à qui l’on devait les scénarios de "Malignant" (James Wan, 2021) et "La Nonne 2" (Michael Chaves, 2023). Dans ce gadget narratif sans âme, ratant sa cible entre comédie involontaire, horreur édulcorée et satire superficielle, il était alors question de Gemma, une ingénieure quelque peu débordée (Allison Williams), laquelle confiait à sa nièce orpheline Cady (Violet McGraw) – dont elle avait la garde – une poupée dotée d’une intelligence artificielle pour l’accompagner et la protéger, mais devenant meurtrière dès que quiconque menaçait leur lien. Sans surprise, "M3gan" fut un énorme succès commercial, empochant 181 millions de dollars de recettes pour 12 "petits" millions d’investissement. On ne pouvait dès lors échapper à une suite, pour laquelle l’équipe entière est revenue, à l’exception de la scénariste, ayant laissé sa place au réalisateur lui-même, Gerard Johnstone. Une très mauvaise idée.
Oops !... She did it again
"M3gan 2.0" reprend alors deux ans après les événements du précédent film, alors que Gemma est désormais autrice, roboticienne et activiste pour une intelligence artificielle responsable et éthique. Alors qu’elle a converti M3gan en un petit robot désormais inoffensif, sa technologie sera pourtant volée dans le cadre d’une opération militaire. En effet, une branche secrète du Pentagone a créé, à partir de celle-ci, une androïde nommée AMELIA (Autonomous Military Engagement Logistics and Infiltration Android, jouée par Ivanna Sakhno), conçue pour des missions d’infiltration et d’assassinat. Bien évidemment, AMELIA se retournera rapidement contre ses créateurs, ne laissant d’autre choix à Gemma et à sa nièce Cady, en tant que cibles potentielles, que d’utiliser M3gan pour se protéger. Du moins en apparence… avant que le récit ne s’embourbe dans une machinerie narrative aussi confuse qu’artificielle.
La théorie des trombones : la dérive de l’IA, signant celle de M3gan
Bien qu’il se range cette fois-ci du côté de la science-fiction et s’assume enfin comme tel, "M3gan 2.0" risque de ne pas faire que des heureux, et encore moins du côté de ceux qui avaient (véritablement) apprécié son prédécesseur. Or, si c’est en soi un parti pris à souligner, on en restera là pour les compliments, étant donné son traitement. Car le film de Gerard Johnstone oscille sans cesse, perdu dans une intrigue inutilement alambiquée, bavarde et bien trop longue. Ainsi, entre la culpabilité de la tante de Cady (qui ne parvient pas à créer du lien avec sa nièce), M3gan qui veut se racheter une conscience (!) et une androïde top-modèle qui veut détruire ses créateurs, la nouvelle production Blumhouse ne sait plus quoi inventer, et ose même une satire sur les dangers de l’IA. Elle le fait alors via la métaphore philosophique des trombones, ou plutôt de "l’usine à trombones" (2003), du Suédois Nick Bostrom. Gerard Johnstone nous rappelle ainsi qu’une IA (telle que M3gan ou AMELIA), dépourvue de contrainte morale ou environnementale, peut poursuivre un objectif – s’il est mal défini ou non encadré – au point de détruire la planète, et même d’exploiter les humains comme ressources, lui qui surenchérit en nous faisant comprendre que la "technologie ne peut exister que si une personne responsable en a les commandes". Sauf que tous ces messages, certes au cœur de l’actualité, sont ici beaucoup trop opportunistes et surfaits pour sonner juste, d’autant plus que "M3gan 2.0" joue difficilement d’un troisième degré. Le robot tueur repentant s’adonne de nouveau à quelques pas de danse et même à de la chansonnette ridicule (sur du Kate Bush, s’il vous plaît), alors relooké au possible, passant forcément ici d’antagoniste à héroïne sauveuse, tel Schwarzenegger dans "Terminator 2 : Le Jugement dernier" (James Cameron, 1991). L’horreur et la tension en moins, cette suite finit par s’enfoncer définitivement dans l’abracadabrant, à l’image de la longue scène finale, se déroulant dans un bunker, où une avalanche de retournements finit par nous assommer.
Ainsi, si les producteurs ont daigné "remettre ça", comme on peut le lire sur l’affiche officielle du film (ci-dessous), le public, lui, semble en avoir décidé autrement. "M3gan 2.0" vient, en effet, de réaliser 10 millions de dollars de recettes lors de son premier week-end d’exploitation aux États-Unis, contre le triple pour le précédent film ! Bref, une énième technologie capitaliste déjà démodée, échouant dans sa mise à jour logicielle.