Genre : Comédie, horreur, drame
Durée : 108’
Acteurs : Paul Rudd, Jenna Ortega, Richard E. Grant, Téa Leoni, Will Poulter, Anthony Carrigan, « Jessica » Hynes...
Synopsis :
Elliot et sa fille adolescente Ridley écrasent accidentellement une licorne. La famille Leopold, propriétaire d’un labo pharmaceutique, ne tarde pas à s’emparer de cette créature magique et leurs scientifiques découvrent que sa chair, son sang et, surtout, sa corne sont dotés de propriétés curatives surnaturelles, que les Leopold cherchent à exploiter.
La critique de Julien
Au rayon des films sous LSD sort cette semaine-ci dans nos salles "La Mort d’une Licorne", ou "Death of a Unicorn" en version originale. En effet, c’est ce 9 avril, soit la journée internationale de la Licorne (!) que le distributeur Belga Films a décidé de sortir cette sorte de comédie horrifique et dramatique hautement perchée. Emmené, certes, par ces créatures légendaires à corne unique, dont le sang aurait (d’après l’univers "Harry Potter") des propriétés thérapeutiques toutes aussi magiques, le film d’Alex Scharfman est surtout porté par un casting alléchant, et cela d’autant plus pour une première réalisation. On y retrouve ainsi la coqueluche de la génération Alpha Jenna "Mercredi" Ortega, Paul "Ant-Man" Rudd, Will Poulter, Théa Leoni ou encore Richard E. Grant. Distribué aux États-Unis par A24, et produit pour 15 "petits" millions de dollars, "La Mort d’une Licorne" promettait alors un divertissement loin des arcs-en-ciel et de l’image pure et paisible généralement associée au mythe chrétien popularisé au travers du folklore européen qu’est la licorne, laquelle fut décrite, par exemple au Moyen Âge, comme un monstre hybride à la fois féroce, cruel et violent. Dans la Bible, Saint Basile avertit d’ailleurs le croyant : "prends garde à toi, ô homme, et défie-toi de la licorne, c’est-à-dire du démon, car elle fait aisément le mal et le trame contre les hommes." Mais la question qui nous taraude, nous, c’est de savoir s’il fallait se méfier ou non de ce film ?
Satire absurde servie saignante
Déjanté, "La Mort d’une Licorne" n’est pas à prendre au premier degré, au risque d’être rapidement désabusé par l’absurdité consternante de son scénario. En témoigne l’écriture très caricaturale des personnages jouant la riche et avide famille Leopold, elle dont le patriarche (Richard E. Grant) et propriétaire d’un laboratoire pharmaceutique souffre d’un cancer, cherchant désespérément un traitement curatif pour se sauver. Or, c’est son avocat Elliot (Paul Rudd) et sa fille Ridley (Jenna Ortega) qui le lui amèneront - malgré eux - sur un plateau d’argent. En effet, en chemin vers la résidence des Leopold pour une question de contrat, ces derniers entreront en collision avec... un bébé licorne, avant de l’achever au démonte-pneu pour abréger ses souffrances. Sauf qu’ils décideront d’emmener son corps, dans leur coffre, afin de ne laisser aucune trace. Arrivés sur place, père et fille découvriront alors les bienfaits du sang de licorne, lequel les a éclaboussés et semble les avoir guéris respectivement de leurs allergies et de l’acné. Et si ce sang pouvait soigner les humains de toute pathologie ? De quoi attiser la convoitise des Leopold et leur soif d’argent, ainsi que la colère de l’étalon et de la jument licornes. "La Mort d’une Licorne" va alors prendre une tournure pour le moins vorace et galoper sans cesse, mais sans jamais aller au bout de ce qu’il entreprend.
Prendre la licorne par... les sang-timents
On ne saura, par exemple, rien de ces licornes, si ce n’est via les recherches amateures que Ridley aura menées sur leur mythologie via Internet, et liées notamment à une réinterprétation des célèbres tapisseries de la "Chasse à la Licorne/Unicorn Tapestries" (1495-1505). Or, Ridley semble être rentrée en connexion avec la jeune licorne en ayant touché sa corne, prise depuis d’étranges visions cosmiques prédicatrices. D’ailleurs, que sont donc ces aurores boréales visibles dans le ciel, alors que la menace approche ? Comment ces bêtes ont-elles bien pu rester cachées durant tout ce temps ? Le scénario d’Alex Scharfman ne se limite alors que du strict minimum pour installer ses enjeux, tout en faisant tourner ceux-ci autour d’une relation paternelle endeuillée par la perte d’une épouse et mère de famille, mais très sommaire dans son développement. De plus, les tentatives d’émotions tombent ici à l’eau face à la surenchère sanguinolente provoquée par les licornes, contrairement à leur docilité face à la "jeune fille au cœur pur". La satire de l’exploitation animale et de ressources rares en vue d’un délire pharmaceutique capitaliste prend également ici une tournure assez grossière, la famille Leopold agissant à l’extrême pour tenter de s’en mettre plein les poches, tandis que tout va aveuglément trop vite. Le doublage en version française n’aide d’ailleurs pas non plus à passer outre cette mascarade couleur arc-en-ciel rougeâtre, avec, de plus, un Will Poulter en roue libre.
Licorne de bois
Si on attendait avec impatience "La Mort d’une Licorne", force est de constater que l’exécution d’Alex Scharfman ne va pas dans le sens de ses idées perchées. En effet, son film souffre, d’une part, d’effets numériques qui laissent à désirer et qui nous confirment que les licornes n’existent pas étant donné leur inclusion poussive dans les décors du film. On ne croit dès lors définitivement pas en leur présence (déjà parachutée) dans ce récit. D’autre part, le montage imprécis donne à voir une œuvre brouillonne, tandis que le mariage entre ses genres s’avère inabouti, faute d’engagements pleinement assumés. Bref, au contraire de la licorne au sang d’or, "La Mort d’une Licorne" ne guérit rien ni personne, pas même le spectateur, trébuchant sur ses propres sabots numériques et sa satire à moitié digérée...