Genre : Comédie dramatique
Durée : 93’
Acteurs : Audrey Lamy, Nicolas Chupin, Eden Lopes, Benjamin Tranié, Naidra Ayadi, Jean-Charles Clichet, Steve Tientcheu, Jean-Pascal Zadi, Stéphan Wojtowicz...
Synopsis :
Pauline est la maman d’Andréa, 6 ans et demi, un petit garçon formidable à qui on a diagnostiqué un TSA : un "trouble du spectre autistique". Il n’est pas vraiment au niveau mais il est toujours scolarisé et s’apprête à faire sa rentrée en grande section de maternelle. Pour Pauline, sans revenus fixes et récemment séparée de Fabrice, le père d’Andréa, tout semble concourir à faire de sa vie une succession d’échecs. Or pour Andréa, c’est une année cruciale qui va déterminer s’il peut ou non rester scolarisé et obtenir ainsi une meilleure chance de voir son état s’améliorer. Mais pour cela, Andréa a besoin de stabilité et pour Pauline, la lui apporter, c’est un peu (beaucoup) gravir l’Himalaya en tongs...
La critique de Julien
Ayant commencé comme photographe plateau, puis comme conseiller technique, tout en enchaînant en tant que directeur artistique sur les comédies "Pattaya" (Franck Gastambide, 2016), "Coexister" (Fabrice Éboué, 2017) et "Taxi 5" (Franck Gastambide, 2018), John Wax a depuis franchi le cap, non pas encore de l’Himalaya, mais de la réalisation, lui qui a depuis coréalisé "Tout Simplement Noir" (2020) avec son ami de longue date Jean-Pascal Zadi, lesquels ont récemment signé la série "Kôkôrîkô" pour Canal+. Le voici qu’il gravit donc seul, le sommet de la montagne, et met en scène ici la comédie dramatique "En Tongs au Pied de l’Himalaya". Et si l’on avait pu croire, de prime abord, à un road-trip, semble-t-il, mal chaussé jusqu’au pied de l’Himalaya, il n’en est pourtant rien dans ce tendre et émouvant premier film. Ou du moins, pas explicitement, mais bien métaphoriquement. En effet, une mère d’un enfant de six ans atteint d’un trouble de spectre de l’autiste, et tout juste célibataire (Audrey Lamy), se verra dépassée par la situation, et devra apprendre à porter Andréa (Eden Lopes) sur ses épaules, afin qu’ils gravissent, ensemble, une montagne pour laquelle elle pensait ne pas être équipée au départ. Or, cela pourrait permettre à Andréa de poursuivre une scolarité à l’école élémentaire sans être déscolarisé pour un établissement spécialisé, lequel s’apprête, en effet, à passer en CP (l’équivalent, en Belgique, de la première année du primaire)...
Adapté du seul-en-scène de Marie-Odile Weiss "En Tongs au Pied de l’Himalaya" (2020), alors inspiré de son histoire personnelle de maman d’un enfant autiste, ce film bénéficie justement de la plume de cette dernière, ayant coécrit son scénario avec John Wax. Or, son film n’est pas à proprement parler un film qui parle de l’autisme. D’ailleurs, le jeune Eden Lopes, âgé réellement de huit ans, n’est lui-même pas atteint d’autisme, et joue donc là un vrai rôle de composition, aiguillé par Marie-Odile Weiss sur le tournage, afin qu’il se comporte comme tel, avec la gestuelle et la manière de s’exprimer. Le film ne centre pas son récit sur ce trouble du neurodéveloppement, bien qu’il questionne la position de l’enseignement fondamental face à celui-ci (en témoigne ici les nombreuses discussions entre les parents d’Andréa et le corps enseignant), et nous en montre ainsi des facettes au quotidien, et cela au travers de la vie d’une mère quelque peu épuisée et paumée, et s’apprêtant à franchir, elle, le cap de ses 40 ans. Ayant, en effet, toujours vécu aux crochets de son ex-compagnon (Nicolas Chupin) mais également de son père (Stéphan Wojtowicz), Pauline va devoir apprendre à devenir responsable et autonome si elle espère pouvoir donner une chance à son fils, elle qui squatte désormais l’appartement que père - davantage attentionné envers ses chats que sa famille - a prêté à son frère chômeur invétéré (Benjamin Tranié), tandis qu’elle tente d’oublier ses soucis dans l’alcool lorsqu’elle n’a pas la garde de son fils...
Loin d’être une grande réalisation, tout en étant extrêmement attendu dans sa manière de dépeindre la (re)construction d’une femme à l’aube d’un nouveau palier de sa vie, "En Tongs au Pied de l’Himalaya" est un petit film en l’état, mais un grand film sur l’humanité, lui qui doit énormément à la justesse des moyens de ses modestes ambitions, ainsi qu’au jeu de son interprète principal, Audrey Lamy. Ainsi, ce récit, même s’il est prévisible, s’avère touchant dans le combat qu’il nous montre d’une mère maladroite (et parfois rustre) face, d’une part, à l’imprévisibilité dudit trouble et, d’autre part, aux progrès et échecs, malgré ses efforts, tout en devant en apprendre les codes et, pour cela, accepter de se faire aider. Audrey Lamy trouve là son plus beau rôle, elle qui s’avère particulièrement authentique dans la peau de cette mère en plein travail sur elle-même. Difficile, en effet, d’être insensible face à son jeu, même si "En Tongs au Pied de l’Himalaya" n’a rien de tragique (loin de là), et nous offre même une belle lueur d’espoir. Face à elle, le réalisateur John Wax et Marie-Odile Weiss parviennent également à faire vivre les personnages secondaires, gravitant autour de Pauline, loin d’être parfaits et exemplaires, mais empathiques et terriblement humains. Et si l’on rigole autant que les larmes montent dans ce film, c’est sans doute parce qu’il reflète une fidèle réalité, aussi dure que belle. On se saurait donc que vous conseiller d’aller voir ce petit film empreint de jolies émotions, lui qui risque, malheureusement, de ne pas faire long feu dans nos salles...