Genre : Horreur, thriller psychologique
Durée : 132’
Acteurs : Naomi Scott, Kyle Gallner Lukas Gage, Rosemarie De, WittRaul Castillo...
Synopsis :
A l’aube d’une nouvelle tournée mondiale, la star de la pop Skye Riley se met à vivre des événements aussi terrifiants qu’inexplicables. Submergée par la pression de la célébrité et devant un quotidien qui bascule de plus en plus dans l’horreur, Skye est forcée de se confronter à son passé obscur pour tenter de reprendre le contrôle de sa vie avant qu’il ne soit trop tard.
La critique de Julien
Souriez, vous êtes filmés ! Un peu plus de deux ans après sa sortie, "Smile" a droit à une suite, laquelle fut aussitôt commandée par Paramount Pictures auprès de son metteur en scène Parker Finn après le succès retentissant de son premier film. Et les calculs sont vite faits : pour un "modique" budget de production de 17 millions de dollars, "Smile" en a rapporté plus de 217 dans le monde ! Une séquelle était donc inévitable, en témoigne également l’issue des événements de ce concluant premier essai. Alors certes, si le cinéma d’horreur attire bon nombre de spectateurs en mal de frissons, "Smile" avait surtout bénéficié d’un très bon bouche-à-oreille, étant donné ses qualités démoniaques. Nous avions d’ailleurs été agréablement surpris par ce film, dont nous vous disions tout le bien qu’on en pensait sur Cinécure, ici même. Or, force est de constater que Paker Finn, de retour donc à la réalisation et au scénario, avait de la suite dans les idées, pour un nouveau cauchemar éveillé !
Tel qu’il l’avait laissé sous-entendre, "Smile 2" débute donc avec un clin d’œil au twist final de son prédécesseur, dès lors utilisé ici pour amorcer les événements de cette suite, et poursuivre ainsi la malédiction, se répandant toujours d’une personne à l’autre, et cela lorsque la première - maudite - se suicide - en souriant - face à une autre. Et la première bonne nouvelle de "Smile 2" est de ne pas surfer sur la simple facilité, dans le sens où le protagoniste survivant n’est pas le personnage principal de cette suite. Mais ce choix n’est guère une surprise au vu de la promotion de "Smile 2", centré, semble-t-il, sur une starlette prise, à son tour, au piège. Parker Finn a donc décidé de lancer les hostilités six jours après les faits, alors que ledit survivant tente tant bien que mal de se défaire de cette malédiction, laquelle se nourrit donc des traumatismes de ses hôtes, avant de passer à un autre, tel un parasite. En parallèle, à New York, la pop star Skye Riley (Naomi Scott) prépare enfin son grand retour sur scène, un an après avoir survécu à un terrible accident de la route, ayant alors coûté la vie à son petit ami, l’acteur Paul Hudson (Ray Nicholson, le fils de Jack, lequel arbore ici, en hommage à son père, son terrifiant sourire), lui qui conduisait le véhicule. Après une lutte publique contre la toxicomanie et des mois de convalescence, la chanteuse est donc enfin prête à honorer ses contrats d’artistes, elle dont la mère Elizabeth (Rosemarie DeWitt) est la manager. Souffrante du dos, Skye prend pourtant - et secrètement - de la Vicodine, elle que s’en fournit via un trafiquant de drogue, et ancien camarade de classe (Lukas Gage). Se faufilant en cachette jusqu’à l’appartement de ce dernier, Skye le découvrira dans un état second, certes drogué, mais de surcroît effrayé par quelque chose qui semble lui arriver, et cela avant qu’il ne se fracasse le visage face à elle, avec un poids de musculation, jusqu’à sa mort. Une nouvelle fois traumatisée, celle-ci s’enfuira, bien consciente qu’elle n’a pas intérêt à révéler sa présence sur les lieux pour sa carrière... La suite, c’est avec le sourire aux lèvres qu’on vous invite à la découvrir en salles !
Difficile de réaliser une suite de nos jours, lesquelles sont souvent moins bonnes et moins inspirées que leur prédécesseur. Mais autant dire que ce n’est pas le cas pour "Smile", Parker Finn ayant eu de la suite dans les idées ! Et quelque chose nous dit que ce n’est pas encore fini ! D’emblée, le réalisateur reste fidèle aux artifices qui faisaient le sel de son premier film, à savoir une mise en scène et un montage parfaitement ficelés ; les transitions entre les scènes nous faisant sursauter par leur ingéniosité, et cela notamment par l’usage diabolique du son. Mais il surpasse ici d’autant plus son procédé par l’usage inventif de sa caméra, notamment par des plans en top shot, capturant une scène depuis une perspective élevée à 90°, ou encore des plans jouant sur deux temporalités ou espaces différents, entre rêves, souvenirs et réalités, et au travers desquelles le jump scare se faufilent allègrement, et de manière cathartique, tandis que la chorégraphie s’insinue ici aussi à merveille dans l’horreur que vit la chanteuse. Ainsi, la scène où elle est en proie dans son appartement au démon et à des fans tout souriants s’approchant d’elle au ralenti est d’une efficacité sans borne, et souligne là toute la tension et la paranoïa avec lesquelles elle semble perdre toute notion de réalité... Mais c’est bien l’atmosphère toujours aussi inquiétante qui nous met, à notre tour, dans un état second, le spectateur étant toujours sur ses gardes, le mal pouvant surgir de n’importe quel côté, de n’importe quel angle. D’ailleurs, celui-ci joue toujours autant avec l’esprit de sa nouvelle victime. D’ailleurs, si vous pensiez que celui-ci avait fait le tour des possibilités en matière de manipulation mentale et de terreur psychologique, et bien vous aviez tort ! Encore plus méchante, cette entité agit comme un montage russe, elle qui, en plus d’aller de l’avant en matière de sensations fortes, n’a pas peur de faire le chemin en arrière, sans prévenir, histoire de prolonger l’horreur. La réalité est-elle une hallucination, ou l’hallucination est-elle la question ? Telle est la question, pour une frontière assez trouble chez Parker Finn !
C’est donc avec énormément de satisfaction que l’on retrouve déjà les mimiques de ce dernier, lequel use toujours autant de plans inversés et de panoramiques à 180° pour déstabiliser le spectateur et créer l’effroi, tandis que la partition musicale expérimentale et glaçante de Cristobal Tapia de Veer fait toujours des merveilles. Aussi, le cinéaste cristallise toujours aussi bien la peur sur le visage de ses actrices, et en l’occurrence ici celui de Naomi Scott, vue notamment dans la peau de Jasmine dans "Aladdin" (2019) de Guy Ritchie. Remontée, la comédie n’a rien à envier à la prestation de Sosie Bacon dans "Smile", d’autant plus que Naomi Scott a fort à faire avec son rôle, étant donné sa position de star de la musique, sur laquelle sont donc braqués les projecteurs, étant donné son grand retour musical. Elle qui n’a pourtant pas à faire de pas en arrière va pourtant souffrir d’une énième fracture du tibia. Du moins, en apparence...
Par le prisme de la célébrité et de ses responsabilités, le cinéaste a sans doute trouvé ici le bon filon pour faire perdurer son univers machiavélique, et cela au regard de l’issue imprévisible et terriblement jouissive de cette nouvelle réalisation, d’autant plus monstrueuse. En installant ainsi sa caméra et sa malédiction dans l’univers clinquant du showbiz, Parker Finn n’a pas peur d’y filmer les travers de l’industrie musicale et les millions de dollars qui peuvent reposer sur les épaules d’une seule et même personne, avant tout humaine. Or, en plus de ne pas être en état, le personnage de Naomi Scott souffre toujours d’un choc post-traumatique, en témoigne les cauchemars qu’elle fait sans cesse, revivant durant ses rêves le drame et les secondes qui l’ont succédé, elle qui est également en pleine culpabilité vis-à-vis de l’accident survenu plus tôt, et s’autopunit, notamment lorsqu’elle refuse de porter un costume orné d’ailes de papillon, mais au travers duquel on risque de voir sa cicatrice... Mais celle-ci doit pourtant mettre au placard ses maux pour remonter sur scène, au risque ainsi de voir sa carrière définitivement s’envoler, et les sacrifices qu’elle-même, et son équipe technique, ont réalisés. Or, c’est finalement tout ce qu’attendent d’elle les tabloïds, soit qu’elle échoue, et se nourrir, à leur tour, de ce qui lui reste pour l’achever. Parker Finn filme d’ailleurs comme personne ici le paradoxe du bien et du mal qui se confrontent continuellement, avec d’un côté, les fans de l’artiste, et de l’autre, ses multiples détracteurs. Mais l’entité, elle - dont le créateur fait encore mine de garder sa nature mystérieuse intacte - ne fait ici aucunement de distinction, et profite encore plus de la grande naïveté humaine, voyeuriste et en quête de sensationnel, pour asseoir sa malédiction. Oui, ce nouveau twist est une trouvaille scénaristique qui va bien au-delà de nos espérances, lequel nous excite au plus haut point, tout en restant parfaitement ancré dans cet univers, à l’image de son cynisme et de sa cruauté.
L’effet de surprise en moins, et quelques flottements par-ci, par-là, "Smile 2" poursuit donc le chemin entreprit par son aîné, et prouve que son metteur en scène, Parker Finn, nous réserve encore de belles choses à venir, dont une multitude de sourires aux lèvres. Sa réalisation, fidèle et d’autant plus sensationnelle encore, se révèle aussi démoniaque et manipulatrice que l’avait été celle de "Smile". Et même si on l’espérait, on a encore du mal à croire ce qu’on a vu. À moins que ça ne soit qu’une illusion ?