Genre : Drame
Durée : 104’
Acteurs : Bernard Campan, Raphaël Brottier, Maria Apostolakea, Fotinì Peluso...
Synopsis :
Sur l’île de Kalamaki en Grèce, Yannis, un jeune enfant autiste, rythme ses journées en mesurant l’ordre du monde : les bateaux qui accostent, les prises des pêcheurs, le va-et-vient des clients du café. L’arrivée inattendue de son grand-père, Alexandre Varda, homme d’affaires de renom qu’il n’a jamais rencontré, va perturber l’équilibre fragile de son quotidien. Malgré leurs différences apparentes, une relation profonde et bouleversante se tisse entre ce grand-père distant et ce petit-fils aux talents singuliers.
La critique de Julien
Adaptation du roman du même nom de Metin Arditi publié aux éditions Grasset en 2016, "L’Enfant qui Mesurait le Monde" est un drame réalisé par l’ancien producteur et directeur des programmes de TF1 et de France Télévisions, Takis Candilis, lequel n’avait plus réalisé de longs métrages depuis Transit (1982), avant d’être touché par ledit roman, lui qui partage d’ailleurs plusieurs points communs avec le personnage joué ici par Bernard Campan. Grec de la deuxième génération, le réalisateur a, comme le héros de l’histoire, tiré un trait sur ses racines, tandis que le métier d’architecte du personnage principal était celui du père du cinéaste, George Candilis, lequel fut d’ailleurs l’adjoint du célèbre Charles-Édouard Jeanneret-Gris, dit Le Corbusier, lui qui travaillait d’ailleurs avec le Nombre d’Or, dont il est justement question dans le livre de Metin Arditi. Aussi, Takis Candilis a connu des soucis de communication avec ses enfants, comme c’est le cas dans ledit roman entre un père et sa fille, et un grand-père et son petit-fils, dont il ignorait d’ailleurs l’existence... Bref, une histoire dont il se sent proche, comme s’il était connecté à celle-ci, par tant de signes, en plus d’avoir reçu les louanges de Metin Arditi pour ses modifications d’écriture, lequel lui offre d’ailleurs ici le rôle du Père Kosmas. Mais cet alignement de planètes fait-il du film un miracle ?
Puissant architecte de renommée, Alexandre Varda (Campan) verra ainsi sa vie basculer du jour au lendemain. Licencié par les actionnaires de sa propre société en plus d’apprendre le décès de sa fille qu’il n’avait pas vue depuis 12 ans, ce dernier décidera alors de partir en Grèce pour rapatrier son corps, tout en découvrant sur place qu’il est le grand-père d’un petit garçon de 9 ans atteint d’un syndrome autistique. Un synopsis qui a donc tout du mélodrame, tourné à Spetsès en Grèce (l’île de Kalamaki est fictive). Or, "L’Enfant qui Mesurait le Monde" aurait très bien pu n’être qu’un téléfilm, tant la réalisation plan-plan et monocorde de Takis Candilis manque d’envergure, elle qui est de surcroît bavarde, et porte sans nul doute l’héritage télévisuel du Monsieur. Voir ce film au cinéma n’est donc aucunement nécessaire, malgré ses décors naturels, eux dont l’image d’Épinal est cependant loin de celle qu’on a l’habitude de voir, son metteur en scène voulant filmer "la vraie Grèce, celle où il n’y a pas de touristes, celle qui souffre", ce qui est tout à son honneur, et dénoté favorablement, en plus d’être bercé par la langue et les coutumes grecques...
Le film, malgré sa bonne volonté, imbrique alors trop lourdement l’intime, l’Histoire, la crise économique, la vie insulaire (entre sa solidarité, ses petits trafics et opérations immobilières illégales) ou encore la tradition, et cela au sein d’une histoire de résilience, de filiation et ses manquements répétés, de reconnexion, ou encore de non-communication entre pairs. Or, c’est beaucoup trop pour ce petit film, qui essaie ainsi le long de ses moins de deux heures de (re)connecter le personnage de Bernard Campan à sa (nouvelle) vie, lequel est, par contre, et comme à son habitude, impliqué et juste dans le registre, bien que n’ayant cependant pas le temps de faire mûrir son jeu à l’écran. Car son personnage est partout à la fois, et finalement nulle part, lequel va devoir, de plus, s’occuper de la maison de sa fille et reprendre le flambeau d’un projet immobilier qu’elle avait envisagé, attaché alors à un autre dossier faisant couler quant à lui beaucoup d’encre au sein de la communauté rurale, soit celui d’un complexe hôtelier sur le site d’un théâtre antique... Ça fait donc également beaucoup pour un seul homme, alors que le roman de Takis Candilis, lui, était pourtant centré sur l’enfant (d’où son titre). "L’Enfant qui Mesurait le Monde", à dès lors naviguer entre les sujets, n’en approfondit finalement aucun, ou reste en surface des choses, quitte à en balayer certains d’entre eux d’un seul trait, malgré pourtant leurs maigres enjeux narratifs pourtant installés. Le film, linéaire, lisse et prévisible, se regarde alors sans véritable accroche, malgré la sensibilité qui s’en dégage.