Genre : Thriller, romance
Durée : 104’
Acteurs : Kristen Stewart, Katy O’Brian, Jena Malone, Ed Harris, Dave Franco...
Synopsis :
Lou gère une salle de sport où elle rencontre et tombe amoureuse de Jackie, une culturiste ambitieuse qui traverse la ville pour se rendre à Las Vegas, à la poursuite de son rêve. Mais leur amour déclenche une succession d’événements violents.
La critique de Julien
Projeté en avant-première dans le cadre du BIFFF (Brussels International Fantastic Film Festival) le 13 avril dernier, "Love Lies Bleeding" avait subi "des propos homophobes, discriminatoires et offensants émanant du public" lors de sa présentation, et cela d’après son distributeur belge The Searchers, lequel a dès lors condamné ces "comportements inappropriés" envers ce film réalisé par une équipe majoritairement queer, et mis en scène par l’Anglaise Rose Glass, pour qui il s’agit du second métrage après l’inédit film d’horreur psychologique "Saint Maud" (2019). Thriller queer et sous stéroïdes, "Love Lies Bleeding" a heureusement trouvé une date de sortie chez nous, et cela pour notre plus grand plaisir, lequel réunit à l’écran Kristen Stewart et la révélation Katy O’Brian, notamment vue dans la peau de l’antagoniste Elia Kane de la série Disney+ "The Mandalorian". Et autant dire que les deux femmes crèvent ici l’écran dans ce film fiévreux !
Se déroulant en 1989, le film nous amène à la rencontre de la solitaire Lou (Stewart), elle qui tient une salle de sport dans l’état du Nouveau-Mexique, tout en faisant partie, malgré elle, d’une famille de criminels, chapeautée par sa figure paternelle, Lou Sr. (Ed Harris). Elle tombera alors sous le charme de l’ambitieuse culturiste Jackie Cleaver (O’Brian), laquelle s’entraîne dans sa salle de sport, en espérant pouvoir gagner une compétition organisée à Las Vegas. Sauf que cette dernière a, entre temps, eu une relation sexuelle avec le beau-frère infidèle et violent de Lou (Dave Franco), tandis qu’elle a accepté un emploi dans un stand de tir appartenant à Lou Sr. Les effets secondaires de sa prise de stéroïdes (sous l’impulsion de Lou) lui feront alors perdre son sang froid à la suite d’un incident conjugal, les entraînant, elle et Lou, dans une situation très embarrassante, et aux conséquences inéluctables...
"Love Lies Bleeding" est typiquement le genre de film qui s’apprécie au plus on y goûte, au plus ses muscles s’y dénouent, et cela pour nous frapper d’un uppercut. Intelligemment référencé et pop, ce film transpire la sueur et la rage au ventre, au sein d’une idylle lesbienne luxuriante, mais rapidement rattrapée par la violence masculine qui manipule le monde corrompu qui les entoure. Or, bien que les demoiselles, par leur activité quotidienne, tentent déjà d’y résister, elles feront tout ici pour s’en défaire, et surtout s’en extraire, avec autant de stéroïdes, et même de testostérones que nécessaires, malgré la peur, et la dynamique toxique qui les gagnera.
Rose Glass, en plus de réussir à pleinement nous immerger dans cette bourgade reculée de l’Amérique profonde de la fin des années 90, offre alors un certain charme désuet et électrique à cette course contre la montre à la disculpation face à l’emprise masculine, et à l’amour fou. En témoigne, par exemple, des plans rougeâtres énigmatiques, hallucinatoires et hors du temps, notamment sur les visages des antagonistes, ou vers l’inconnue d’un décor inquiétant (un champ, un ravin, etc.). La photographie sombre et pulpeuse de Ben Fordesman, éclairée de nuit ou à la dernière heure de la journée, ou encore la musique signée Clint Mansell et surtout le travail du son, notamment de la chair humaine ou des muscles en plein travail, participent également à la réussite de ce trip féroce et émancipateur, à l’engrenage palpitant.
Alors oui, le sang gicle souvent dans "Love Lies Bleeding", la psychose y prend le pas sur la réalité, l’excès, le nihilisme des années 90 en débordent et le fantastique s’invite même dans cette cavale alors qu’on ne l’attendait pas... Et c’est tant mieux, car cela ne fait que renforcer la force libératrice, féministe et fantasmée du film. Et ce dernier est d’autant plus porté par ses deux sublimes et puissantes actrices, que sont Kristen Stewart et Katy O’Brian, lesquelles font leur "Thelma et Louise 2.0" dans ce thriller néo-noir qui mélange les genres, lequel est aussi glamour que glauque. Bref, on en redemande !