Genre : Horreur
Durée : 109’
Acteurs : Melissa Barrera, Angus Cloud, Kathryn Newton, Dan Stevens, Kevin Durand, Giancarlo Esposito...
Synopsis :
Suite au kidnapping de la fille d’un puissant magnat de la pègre, un groupe de criminels amateurs pensait simplement devoir enfermer et surveiller cette jeune ballerine afin de pouvoir réclamer une rançon de 50 millions de dollars. Retirés dans un manoir isolé, les ravisseurs commencent mystérieusement à disparaître, les uns après les autres, au fil de la nuit. C’est alors qu’ils découvrent avec horreur, que la fillette avec lesquels ils sont enfermés n’a rien d’ordinaire.
La critique de Julien
S’ils sont parvenus à ressusciter la saga "Scream" avec les épisodes 5 (2022) et 6 (2023) c’est surtout avec leur sympathique thriller horrifique "Wedding Nightmare" (2019) que le duo de réalisateurs Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett ont mis les fans du genre d’accord, lequel mettait en scène une nuit de noces diabolique et parsemée d’humour noir et satirique, au travers d’un rite familial initiatique à vivre par une jeune mariée (Samara Weaving) afin d’être acceptée par sa belle-famille bourgeoise aux traditions assez spéciales. Et autant dire qu’on se souvient encore de ce film comme si on l’avait vu hier, étant donné le plaisir aussi brutal que réjouissant qu’il mettait en scène. Or, force est de constater que le duo de metteurs en scène a tenté de rejouer la même carte avec leur nouveau long métrage, "Abigail", dans lequel six criminels sélectionnés kidnapperont une fillette, dans l’espoir d’une rançon destinée à l’homme qui les embauche, lesquels devraient ainsi toucher un chèque de sept millions de dollars s’ils parviennent à assurer la sécurité de la petite durant vingt-quatre heures, dans un manoir. Sauf que cette dernière n’a pas que des talents de ballerine, tout en étant - sans qu’ils le sachent encore - la fille d’un puissant baron de la pègre et seigneur du crime new-yorkais...
Basé sur une réimagination du film Universal Classic Monsters "Dracula’s Daughter - La Fille de Dracula" (Lambert Hillyer, 1936), "Abigail" est tout d’abord dédié à la mémoire de l’acteur Angus Cloud (vu notamment dans la série HBO "Euphoria"), lequel est décédé le 31 juillet dernier, tout en ayant avait déjà tourné l’ensemble de ses scènes avant son décès. On comprend alors très vite où veut en venir ce film coécrit par Guy Busick, lequel était (en partie) aux manettes du scénario des précédents films du duo, tandis qu’il a coécrit celui du sixième volet de la franchise "Destination Finale", intitulé "Bloodlines", prévu pour l’année prochaine. En effet, il s’agit là du massacre décomplexé, et en bonne et due forme, d’une bande de criminels et bras cassés en manque d’argent, eux dont les pseudonymes sont directement dérivés ici du Rat Pack, et dans lequel on retrouve ainsi Joey (Melissa Barrera, qui retrouve les réalisateurs après leurs deux précédents films), dans la peau d’une ancienne médecin de l’armée et toxicomane, laquelle a abandonné son fils face à ses problèmes, mais espère renouer à l’issue de cette mission avec ce dernier, mais aussi de Frank (Dan Stevens), soit un ancien détective du NYPD, ou encore d’une riche hackeuse (Kathryn Newton), d’un sociopathe (feu Angus Cloud), d’un tireur d’élite (Will Catlett) et d’un agent timbré et aux gros bras de la mafia canadienne (Kevin Durand). Mais il aurait été trop simple pour ceux-ci de simplement surveiller ladite fillette, jouée avec beaucoup de malice par l’irlandaise Alisha Weir, quatorze ans, laquelle a interprété Matilda Wormwood dans le film Netflix "Matilda the Musical" (Matthieu Warchus, 2022). Car pensant devoir faire attention à leurs arrières après la découverte de ses origines familiales, par peur ainsi de représailles de la part de son père, c’est bien de cette dernière dont lesdits criminels vont devoir se méfier...
On ne va attendre longtemps avant d’enfoncer un pieu dans le cœur du dernier film de Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett. Car celui-ci est bien une petite déception en l’état, malgré des qualités indéniables. Ainsi, Alisha Weir fait, par exemple, un excellent travail dans le costume d’une ballerine manipulatrice et en mal d’attention paternelle. La mise en scène horrifique du duo repose d’ailleurs sur le décalage entre ses pas de danse (sur la pointe des pieds) et ses talents de suceuse de sang, et cela lorsque s’attaque et joue - de surcroît - avec ses proies. La voir dès lors en pleine action s’avère amusant, d’autant plus qu’elle vole (!), tel que pourra s’exclamer ses victimes. Or, les réactions désabusées et déstabilisées de celles-ci engendrent aussi une part d’humour propre au cinéma de leurs metteurs en scène, avec donc un second degré bien assumé. Ainsi, ils vont devoir user des bons vieux clichés sur les vampires pour tenter d’arrêter Abigail... Dommage cependant qu’on ait que faire de ces personnages peu développés, et de ce qui leur arrive, même celui de Melissa Barrera, qu’on ne trouve d’ailleurs pas très expressive, sans compter sur celui, très antipathique et profiteur, de Dan Stevens...
Mais là où "Abigail" perd surtout des occasions de mordre, c’est dans son écriture, laquelle ne repose finalement que sur des rebondissements sommaires et poussifs, auxquels on ne croit pas, et relatifs à la fois aux choix souvent grotesques de ses personnages, et aux pouvoirs trop inexploités d’Abigail. Or, on aurait apprécié davantage ici de finesse, d’imagination, voire aussi de méchanceté, à hauteur de celle "Wedding Nightmare", à l’égard de ses personnages. Il nous manque aussi une part de mythologie vampirique, tandis qu’on en sait finalement peu sur l’endroit où se déroule l’action principale. Ici, tout va finalement très vite, tandis que les seules touches horrifiques résident dans des corps démembrés ou qui explosent de toutes parts, laissant ainsi jahir des litres et des litres de sang. Qu’à cela ne tienne, l’ensemble se regardera sans déplaisir par les amateurs de films de genre, et divertit, tandis que le rythme de croisière ne laisse aucun répit au spectateur, bien plus amusé qu’effrayé...