Genre : Horreur
Durée : 106’
Acteurs : Théo Christine, Lisa Nyarko, Jérôme Niel, Sofia Lesaffre, Finnegan Oldfield, Marie-Philomène Nga, Emmanuel Bonami...
Synopsis :
Kaleb est un jeune adulte qui vit de petits boulots. Fasciné par les animaux exotiques, il trouve une araignée venimeuse dans un bazar et la ramène dans son appartement. Il ne lui faut qu’un instant pour s’échapper et se reproduire, transformant l’endroit en un terrible piège en toile. Au même moment, la police boucle le bâtiment où les habitants sont pris en embuscade. Seule option pour Kaleb et ses amis : trouver la sortie, survivre.
La critique de Julien
Arachnophobes s’abstenir ! Car voilà un film qui porte très bien son nom ! "Vermines", c’est le premier film du français Sébastien Vaniek, après une quinzaine d’années de courts métrages amateurs, tournés avec ses amis et du matériel trouvé sur des plateaux. Réalisé avec le soutien de Netflix, pour qui le film devait d’abord connaître une sortie en salles avec d’être diffusé sur leur plateforme, ce thriller horrifique voit les résidents d’un immeuble de banlieue être pris au piège dans ses murs à la suite d’une invasion d’araignées très venimeuses. Toujours en marge d’un cinéma français de genre qui commence très sérieusement à trouver écho chez les spectateurs (au regard du "Règne Animal" de Thomas Calley), "Vermines" n’est pourtant pas qu’un terrifiant film grand public, situé dans son univers entre "Arachnophobia" (Frank Marshall, 1990) et d’autres séries B, comme "Arac Attack" (Ellory Elkayem, 2001) et "Tarantula" de (Jake Arnold, 1955). Car l’intention première de son metteur en scène n’est - étonnement - pas d’appuyer notre dégoût envers ces bestioles que sont les araignées. Bien du contraire...
Née après des années à galérer, avec le sentiment de ne pas aller au bout de ses projets faute de reconnaissance et de "bonnes adresses", "Vermines" est en avant tout une métaphore à la xénophobie, à l’intolérance. "Elle [l’araignée] existe et se balade un peu partout chez nous, mais on ne veut pas la voir donc on l’écrase immédiatement"., comme nous en parle le réalisateur, dans le dossier de presse de son film. Le délit de faciès est également ici à l’image des arachnides. Car ce n’est pas pour rien que Sébastien Vaniek, originaire d’une banlieue à Noisy-le-Grand, en Seine-Saint-Denis, ait décidé d’infester ce microcosme souvent décrié et caricaturé. Car dans "Vermines", les habitants dudit immeuble vont bon train, malgré des rancœurs internes ou la difficulté à surmonter un deuil familial. Pas donc ici de violence ou de drogues (mais tout de même de la contrefaçon). Sébastien Vaniek témoigne donc ici de la volonté politique d’éradiquer l’image néfaste des banlieues en faisant un grand nettoyage (détruire pour reconstruire), pour cependant y renfermer les mêmes problèmes. Pourtant, telles que les araignées, ce ne sont pas elles qui posent réellement problème ou qui sont dangereuses, mais bien la manière dont on les traite dans la société, en témoigne la scène finale. Car c’est bien la peur de ceux et celles qu’on a en face de nous qui régit nos réactions et, de fait, la violence. C’est le manque de communication envers ce qui nous semble étranger qui nous pousse indirectement à agir de manière négative, et sur la défense, que ça soit ici entre deux amis, entre un frère et une sœur ou entre des jeunes et les forces de l’ordre. Dommage cependant ici que l’action et l’aspect absolument abject des bestioles l’emportent sur le fond...
Avec sa volonté de dépoussiérer le film d’araignées, Sébastien Vaniek et son équipe technique (dont MacGuff et Atelier 69) réussissent ici à donner vie à une effroyable armée d’araignées très réalistes, et surtout à reproduire avec subtilités leurs déplacements, leurs mouvements de pattes, leur vitesse, etc. Outre les araignées géantes, c’est justement leur aspect crédible qui fait froid dans le dos, surtout lorsque les jeunes en question sont confrontés à celles-ci, et lorsqu’elles grimpent sur ces derniers... À plusieurs reprises on a ainsi préféré regarder les murs de la salle (mais pas trop, en espérant ne pas y croiser une araignée !) plutôt que l’écran, le cinéaste jouant sur la tension grandissante, sur l’imprévisibilité desdites bestioles. Car si l’on s’attend à ce qu’elles déboulent, on ne sait cependant pas de quel(s) côté(s), ni vers où ! À cet effet, la musique originale de Douglas Cavanna et Xavier Caux et le travail du son de César Mamoudy et de Samu Bardet contribuent énormément à l’intensité de l’ensemble, tout comme la nervosité de la mise en scène, ou encore sa photographie très sombre, où les lampes détectrices de mouvements et les briquets sont rois...
Enfin, l’autre réussite de "Vermines" vient de l’étau qui se referme autour de ses protagonistes, enfermés dans cet immeuble, où chaque recoin est rempli d’araignées. Impossible alors pour eux d’en sortir, au risque d’être mordu par l’une d’elles. Mais au-delà de cette situation très anxiogène, ses habitants sont tout bonnement confinés par les forces de l’ordre, tentant vainement de canaliser la menace, renvoyant ainsi à la manière dont les autorités ont géré une certaine pandémie... Cependant, au vu du carnage intégral, on doute de l’efficacité de la démarche. A cet égard, l’issue du film, bien qu’évocatrice et puissante, peine à nous convaincre quant au message premier que Sébastien Vaniek essayait de nous faire passer depuis le début, à savoir finalement le vivre ensemble, et la manière dont on apprend à comprendre l’inconnu, afin de ne pas être attaqué par ce dernier. En effet, cette scène, filmée tel un western en apnée, est, en effet, trop idéalisée, voire trop facile au regard de toutes les horreurs que "Vermines" a pu nous montrer. En d’autres termes, peu de chances que le film réconcilie les arachnophobes avec les araignées...