Genre : Thriller
Durée : 123’
Acteurs : Diane Kruger, Mathieu Kassovitz, Marta Nieto, Amira Casar, Grégory Fitoussi...
Synopsis :
Pilote de ligne confirmée, Estelle mène, entre deux vols long-courriers, une vie parfaite avec Guillaume, son mari aimant et protecteur. Un jour, par hasard, dans un couloir d’aéroport, elle recroise la route d’Ana, photographe avec qui elle a eu une aventure passionnée vingt ans plus tôt. Estelle est alors loin d’imaginer que ces retrouvailles vont l’entraîner dans une spirale cauchemardesque et faire basculer sa vie dans l’irrationnel...
La critique de Julien
Après avoir fait très forte impression avec le thriller paranoïaque "Boîte Noire" (2021) se déroulant dans l’univers de l’aéronautique et porté par Pierre Niney, Yann Gozlan ne perd pas le nord, et poursuit sur sa lancée. "Visions", c’est le titre de son nouveau film, cette fois-ci emmené par la sublime et talentueuse Diane Kruger, laquelle a retrouvé ici les plateaux de tournage francophones, elle qui n’avait plus joué dans l’Hexagone depuis "Tout Nous Sépare" (2017) de Thierry Klifa. Passionné par l’aviation civile, Yann Gozlan s’est donc cette fois-ci aventuré dans un cockpit, puisque l’actrice allemande y incarne un commandant de bord, lequel alterne entre des vols long-courriers et une vie très rangée entre une hygiène de vie très stricte et sa vie de couple, avec son mari Guillaume (Mathieu Kassovitz), avec qui elle essaie d’avoir un enfant, par traitement médical. Amoureuse de son style de vie, Estelle doit cependant faire face aux jets lag et aux troubles du sommeil, elle qui prend un puissant somnifère (le Stilnox, rebaptisé ici Nyxstill) pour réussir à dormir. Elle sera d’ailleurs victime d’un mauvais rêve, dans laquelle elle se retrouvera, après avoir nagé dans la mer infestée de méduses, dans une maison saccagée au bord de la plage, où elle se blessera au pied suite à des débris de verre par terre, et s’y sentira épiée à travers une fissure dans un mur. De plus, ses retrouvailles, par hasard, à l’aéroport avec une certaine Ana (Marta Nieto), avec qui elle avait eu, vingt ans plus tôt une relation amoureuse, feront basculer sa vie du jour au lendemain. Et si ces deux événements étaient finalement liés ?
Alors qu’il s’est plongé dans la lecture de livres traitant de la psychanalyse et de l’inconscient, comme "L’inquiétante étrangeté" (1919) de Sigmund Freud, le cinéaste, (bien) aidé dans l’écriture de son métrage, continue donc de traiter de la perte du contrôle par le biais d’une femme dont le quotidien deviendra un véritable enfer. Entre réalité et irréalité, le film enchaîne visions, prémonitions, hallucinations, cauchemars, confusions, somnolences, fantasmes, séquences oniriques, ainsi que des scènes tournées dans un simulateur de vol, nous entraînant alors dans l’esprit tourmenté de cette femme, laquelle sent que quelque chose ne tourne pas rond. Alors que l’image de l’œil est un motif visuel récurrent dans le film, et fait un clin d’œil au métier de pilote, dont la vue et la clairvoyance sont fondamentales, "Visions" nous immerge ainsi dans une spirale et boucle infernale très froide, forcément inspirée par le cinéma d’Alfred Hitchcock, où une tension tente de se dessiner au fur et à mesure que son personnage principal essaie de s’échapper d’une situation de plus en plus anxiogène, incapable de distinguer le vrai du faux...
Si "Visions" brouille alors volontairement les pistes, se veut menaçant et amène les soupçons notamment via ses personnages secondaires, il reste très longtemps vague dans ses intentions, tout en nous préparant forcément à une chute, livrant, par-ci, par-là, des indices. Or, Yann Gozlan tombe justement dans le piège de sa mise en scène, trop répétitive, où l’on ne fait finalement que sombrer, à chaque scène, un peu plus en compagnie d’une femme, de prime à bord, rigide et infidèle, elle qui perd alors la tête. À moins que ça ne soit le contraire ? L’histoire souffre alors de lenteurs inutiles, d’une mécanique qui prend malheureusement l’eau, étirant de plus ce cauchemar - quelque peu soporifique - vers un twist final pas très surprenant ni méritant, voire confus et incohérent, tout en nous faisant comprendre que toute l’intrigue nous a menés en bateau. Et ce ne sont pas la sublime photographie bleu azur d’Antoine Sanier, les décors (la plage, la mer, la maison familiale et celle de la plage) très graphiques de Thierry Flamand ou encore le jeu schizophrénie et sculptural de Diane Kruger qui parviennent à faire sortir ce thriller mou d’une anesthésie générale...