Genre : Drame
Durée : 99’
Acteurs : Nassim Lyes, Loryn Nounay, Vithaya Pansringarm, Olivier Gourmet, Sahajak Boonthanakit...
Synopsis :
Sam est un détenu exemplaire. A quelques mois de sa sortie de prison, il prépare assidument sa réinsertion. Lors d’une permission, son passé le rattrape et un accident ne lui laisse qu’un seul choix : la fuite. Cinq ans plus tard, il a refait sa vie en Thaïlande, où il a fondé la famille dont il a toujours rêvé. Mais Narong, le parrain local, l’oblige à plonger à nouveau dans la délinquance. Quand Sam veut tout arrêter, Narong s’attaque à sa famille... Sam va traverser la Thaïlande pour se venger de son bourreau.
La critique de Julien
Un "farang", c’est, en Thaïlande, un mot utilisé pour désigner un étranger occidental blanc, ou plutôt ici un "Français", étant donné la couleur de peu de l’acteur principal, Nassim Lyes, 35 ans, d’origine algérienne, lui qui fut champion de France Junior de kick-boxing, catégorie 67 kilos, en 2009, à Paris. Alors qu’on avait déjà pu le croiser dans plusieurs (mini-)séries télévisées et web-séries, mais toujours dans des rôles secondaires, ce dernier tient ici, pour la première fois, le haut de l’affiche, qui plus est dans un film, lequel est voué, si succès à la clef, à en appeler d’autres. Réalisé par le cinéaste français Xavier Gens, à qui l’on doit autant l’éprouvant smasher "Frontière(s)" (2007), produit par Luc Besson, que la comédie "Budapest" (2018) inspirée de la naissance de la société française Crazy-EVG (Enterrement de Vie de Garçon), "Farang" s’inscrit lui dans un cinéma de genre, en l’occurrence (très) musclé, alors qu’on lui doit aussi l’adaptation du jeu vidéo "Hitman" (2007) portée par Timothy Olyphant, tandis qu’il a réalisé, ces dernières années, trois épisodes de la série britannique "Gangs of London" (2020), créée par Matt Flannery et Gareth Evans. C’est d’ailleurs du cinéma de ce dernier que s’inspire ici Xavier Gens, dont de ses films d’action et d’arts martiaux "The Raid" (sortis respectivement en 2011 et 2014), tandis qu’on y décèle aussi, et forcément, des parallèles avec la franchise "John Wick" de Chad Stahelski et Keanu Reeves. Et pour cause...
L’intrigue suit un certain Samir Barda, qui purge sa peine dans un centre pénitentiaire pour trafic de stupéfiants. Alors qu’il est en permission, et retourne dans son logement après avoir travaillé à l’essai sur un chantier, ce dernier sera retrouvé par ses anciens commanditaires. Mais à la suite d’une rixe, Samir n’aura d’autres choix que de fuir s’il tient à sa vie. Cinq ans plus tard, ce farang a dès lors refait sa vie à Bang Chan, dans l’est de la Thaïlande, où il s’adonne à des combats clandestins de boxe thaïe, et surtout à son métier de navetteur et bagagiste pour une chaîne d’hôtels. Ce dernier va également devenir le père de l’enfant que porte sa compagne Mia (Loryn Nounay), laquelle est déjà la maman d’une petite fille, Dara (Chananticha Tang-Kwa), née d’une précédente relation. Tandis que Mia travaille comme serveuse dans un restaurant tenu par leur ami Sombat (Sahajak Boonthanakit), le couple a pour projet d’acheter un terrain sur la plage, afin d’y construire leur propre restaurant. Sauf qu’une offre supérieure (et inatteignable) sera faite par un certain Narong (Olivier Gourmet), un expatrié français et criminel local très dangereux, lequel fournit notamment les touristes en drogues et prostituées. Ce dernier proposera ainsi à Samir de lui laisser ledit terrain, mais à condition qu’il fasse passer pour lui de la marchandise dans l’aéroport où il sera rend quotidiennement. Mais la mission ne se déroulera évidemment pas comme prévu, conduisant Samir à retomber dans ses anciens travers. À moins que ceux-ci n’aient jamais arrêté de le poursuivre ? Une nouvelle fois, il lui faudra fuir, alors que Narong s’attaquera à sa famille. Laissé lui-même pour mort, Samir fera tout pour venger ce que Narong et son bras droit Kasem (Yothin Udomsanti) lui ont fait subir, à lui et aux siens...
Rythmé par des scènes de combats codirigées par le chorégraphe et fidèle collaborateur du cinéaste Gareth Evans, Jude Poyer, à qui l’on doit notamment l’exceptionnelle scène de l’église du premier "Kingsman" (2014) de Matthew Vaughn, "Farang" est un film d’action attendu, mais plutôt efficace dans sa narration, sans temps mort (une fois l’histoire installée), et sa mise en scène, tournée dans les bas fonds thaïlandais avec une photographie soignée, et laissant place à des séquences extrêmement violentes, voire sanguinaires, ce qui devrait plaire aux amateurs du genre. La scène de l’ascenseur, filmée de manière très immersive et nerveuse, représente d’ailleurs le summum de ce film qui n’y va pas par quatre chemins. Cependant, les combats en question semblent ici trop prémédités par l’adversaire, comme s’il attendait finalement Samir de pied ferme, bien que ce personnage n’avait, pourtant, aucun plan prédéfini dans sa tête. D’ailleurs, qui se jetterait, d’une telle manière, dans la gueule du loup, sans penser une seule seconde que les armes à feu existent, alors que lui n’a rien, pour se défendre ? Tout cela sonne donc assez artificiel, et peu crédible, tandis que Xavier Gens en fait des tonnes, quitte à sacrément endommager la santé de cet homme, prêt à tout pour venger, non pas la mort de son chien, mais bien le mal fait à sa famille. S’il s’avère pourtant très investi dans son rôle et la rage qu’il porte, Nassim Lyes n’interprète ici qu’une redite d’un (nouveau) héros d’action increvable, lequel parvient, par exemple, à tuer l’ennemi avec la lame d’un énorme couteau toujours planté dans son propre bras. Autant dire qu’il est fort, très fort, même s’il sera aidé dans sa catharsis de vengeance, et cela face à un Olivier Gourmet qui fait les gros yeux, et qui n’a pas l’occasion d’exister à l’écran pour longtemps.
S’il est un divertissement hexagonal redoutable dans la forme, bien que surfait, "Farang" se permet aussi quelques écrins bien sentis envers les différents trafics qui sévissent, ici en Thaïlande, tels que celui de la drogue, mais surtout celui de la prostitution, qui a de quoi profondément dégoûter, révulser, effrayer, au regard de celui que porte Samir sur des (jeunes, voire très jeunes) femmes qu’il croisera, soumises à l’esclavage sexuel, et souvent vendues par leurs familles endettées à des réseaux mafieux, tout en y projetant l’idée qu’il pourrait s’agir là de sa fille. À cet égard, Nassim Lyes est étonnement touchant derrière ses muscles et sa détermination à tuer, lequel n’aura aucun mal à vous convaincre, et nous avec, au sein alors d’un film sans grande originalité, bien qu’orchestré avec savoir-faire, et générosité.