Genre : Comédie dramatique
Durée : 108’
Acteurs : Sally Hawkins, Steve Coogan, Harry Lloyd, Lewis Macleod...
Synopsis :
Inspiré d’une histoire incroyable mais vraie, "The Lost King" retrace l’extraordinaire aventure de Philippa Langley, passionnée d’histoire à la volonté de fer qui, sur une simple intuition et malgré l’incompréhension de ses proches et la défiance du monde universitaire, a voulu rétablir la vérité autour de Richard III, l’un des monarques les plus controversés de l’histoire.
La critique de Julien
"The Lost King", c’est d’abord l’occasion de retrouver l’équipe derrière le superbe "Philomena" (2013) de Stephen Frears, à savoir le réalisateur lui-même, et les scénaristes Steve Coogan et Jeff Pope, tandis que le premier y joue le mari séparé ici de l’historienne Philippa Langley, jouée par Sally Hawkins, laquelle est une secrétaire de la branche écossaise de l’association Richard III Society, visant à réhabiliter le monarque controversé. Or, les recherches de Philippa, souffrant de fatigue chronique, ont justement permis de découvrir la dépouille du Roi Richard III, en 2012, reposant sous un parking en plein air, sous le chœur des restes d’un couvent de l’Ordre des Frères Mineurs, situés à Greyfriars, à Édimbourg. Mais tandis qu’elle avait procédé à la collecte de fonds, à l’organisation et à la direction des fouilles du site, ce sont bien l’Université de Leicester en partenariat avec le conseil municipal de Leicester qui se sont vanté les mérites de cette découverte, en en revendiquant ainsi les crédits, mettant notamment à l’écart Philippa, elle qui fut tardivement nommée membre de l’Ordre de l’Empire britannique pour "services à l’exhumation et à l’identification de Richard III". C’est justement de cette incroyable histoire dont traite cette comédie dramatique, inspirée du livre "The King’s Grave : The Search for Richard III" (2013) de Philippa Langley et Michael Jones...
Volontairement dramatisé, "The Lost King" suit une cinquantenaire qui vient de perdre une promotion dans le bureau qui l’emploie, et cela au profit d’une femme moins expérimentée, et plus belle, tandis qu’elle vit avec son ex-mari dans la maison familiale, eux qui ont bien besoin d’argent, tandis que lui qui s’occupe beaucoup de leurs deux jeunes adolescents. C’est après avoir assisté avec ses enfants à une pièce de théâtre sur Richard III (d’après l’œuvre de jeunesse de William Shakespeare) qu’elle s’identifiera à ce dernier, tout en en étant obsédée. C’est à partir de là qu’il lui apparaîtra, ce qui la poussera à rejoindre la société locale qui lui est consacrée, elle qui se bat pour réhabiliter Richard III. En effet, ce dernier aurait été injustement vilipendé par les Tudor, ayant ainsi perpétué de lui l’image d’un tyran machiavélique et monstrueux, coupable d’infanticide, alors que ce dernier a perdu la vie à la bataille de Bosworth (22 août 1485) contre le dernier prétendant de la maison de Lancastre, Henri Tudor, lequel lui a succédé sur le trône d’Angleterre, sous le nom d’Henri VII. Philippa arrêtera alors d’aller travailler, et se planchera exclusivement sur ses recherches pour retrouver le corps de Richard III, comme s’il s’agissait-là pour elle d’une mission de survie, qui lui permettra de se retrouver et de s’accomplir elle-même, elle qui est finalement aussi perdue que ce roi, alors que des historiens de premier plan disent que son corps aurait été jeté du haut d’un pont dans la rivière Soar...
Dans la vraie vie, l’intérêt de Langley pour Richard III a commencé non pas en 2012, mais bien en 1998, lorsqu’elle a lu la biographie du Roi de l’historien américain Paul Murray Kendall, elle qui a rapidement abandonné son travail dans le marketing suite à son trouble, pour ensuite écrire un scénario sur Richard III, tandis qu’elle avait elle-même formé la branche écossaise de la Richard III Society. Autant dire qu’elle a consacré une grande partie de sa vie à ce roi, sans pour autant recevoir pleinement les mérites de sa découverte. "The Lost King" met alors en scène l’histoire d’une femme modeste, alors ignorée et oubliée par la société, et plus précisément par un système institutionnel quelque peu misogyne, lui volant ainsi la vedette, et cela malgré son scepticisme de départ. Et autant dire que le film de Stephen Frears ne plaît pas à l’Université de Leicester, voyant d’un mauvais œil le rôle prédominant que s’octroie Langley dans cette découverte, minimisant ainsi leur implication dans le projet. Aussi, Richard Taylor (ici joué par Lee Ingleby), qui n’est autre que le registraire adjoint de l’Université de Leicester, est dépeint ici comme quelqu’un de mauvais, se comportant de manière sexiste, tout en se moquant de l’handicap de Richard III (lequel souffrait d’une grave scoliose). Or, ce dernier a déclaré être susceptible d’intenter une action en justice contre les cinéastes du film pour ses inexactitudes et sa diffamation, lesquels lui ont répondu que les téléspectateurs se feront leur propre opinion sur les passions que Richard III suscite encore, tandis qu’ils ont écrit cette fiction inspirée de faits réels suivant la version des événements vécus du point de vue de Philippa, corroborés par leurs recherches. Affaire à suivre, donc !
Malgré la polémique qu’il soulève, "The Lost King" reste un film (bien trop) léger dans son discours, raconté par le biais d’une comédie métaphorique, en témoigne la place qu’y joue Richard III (sous les traits de l’acteur Harry Loyd), né du subconscient de l’héroïne, qui, en réalité, se parle à elle-même quand elle pense pourtant interagir avec le défunt roi. Aussi, on a connu Stephen Frears et Steeve Coogan beaucoup plus inspirés en termes d’humour british, alors que la mise en scène du film manque certainement d’entrain. On regrette également que le combat féministe mené par Philippa Langley pour sa reconnaissance dans cette affaire ne soit pas proportionnel à l’importance faite ici à son parcours (il est vrai atypique), et à son obstination obsessionnelle. La place de la femme que le film tente ainsi d’incomber à cette histoire aurait donc pu être davantage appuyée. "The Lost King" donne alors l’impression de ne pas savoir vers où il se dirige ni ce qu’il défend pleinement. En demeure un feel-good movie qui se laisse pleinement regarder, mais qui ne passionne jamais à hauteur de ses sujets, dont Sally Hawkins, toujours impeccable de justesse...