Genre : Drame, romance
Durée : 113’
Acteurs : Emma Corrin, Harry Styles, David Dawson, Linus Roache, Gina McKee, Rupert Everett...
Synopsis :
Le destin de Tom, policier, de Marion et de Patrick, conservateur de musée. Tous trois vont vivre un voyage riche en émotions dans la Grande-Bretagne des années 50. Dans les années 90, Tom, Marion et Patrick sont toujours transportés par le désir et le regret, mais ils ont une dernière chance de réparer les dégâts du passé.
La critique de Julien
Adaptation du roman du même nom de Bethan Roberts sorti en 2012, "My policeman" raconte l’histoire d’un triangle amoureux impossible, lequel met en vedette le chanteur Harry Styles dans un second premier rôle quelques semaines après celui qu’il campait dans "Don’t Worry Darling" d’Olivia Wilde, face à Florence Pugh. Réalisé par Michael Grandage, à qui l’on doit le film "Genius" (2016) qui relatait la relation entre l’auteur Thomas Wolfe et son éditeur Max Perkins, cette romance dramatique se déroule alors à la fin des années nonante. Marion (Gina McKee), un enseignante retraitée, accueille alors chez elle un certain Patrick (Rupert Everett), ancien directeur des galeries d’art occidental de Brighton victime récemment d’un AVC, et cela sans l’accord de son mari, Tom (Linus Roache), lequel a rangé depuis très longtemps son uniforme de policier, lui qui ne cautionne pas qu’elle prenne soin de cet homme, tout en étant distant avec son épouse depuis plusieurs années. Marion mettra ainsi la main sur le journal intime de Patrick, relatant le passé, et principalement les faits qui se sont déroulés en 1957, lors de la rencontre entre Patrick (David Dawson) et Tom (Harry Styles), coïncidant avec celle où Marion (Emma Corrin) a croisé le chemin de son futur mari...
Raconté sur deux échelles temporelles qui se chevauchent continuellement, "My Policeman" met en scène une liaison homosexuelle à une époque où cela était encore considéré en Angleterre comme un délit criminel, comme quelque chose d’immoral, de pas naturel, alors que les contraintes sociales de l’époque ("un homme doit se marier"), la question du métier (de policier, qui empêche encore plus d’enfreindre la loi) et l’envie de fonder une famille ont poussé un homme à vivre une relation avec une femme, également pour se protéger, mais dont il s’efforcera d’être amoureux. Or, Marion et Tom ne semblent pas être devenus parents... Quarante ans plus tard, celle-ci, à la lecture du journal intime de l’amant de son époux, découvrira alors des secrets dont elle n’avait pas idée, tout en étant au courant de leur relation depuis le début, elle qui offrira d’ailleurs une chance aux deux amants de réparer les erreurs du passé, qu’elle a causées malgré elle, et ainsi d’effacer leurs (nombreux) regrets respectifs, et espérer (enfin) vivre une vie heureuse, en paix.
Michael Grandage réalise ici un drame très classique dans sa construction, sans véritables éclats ni grande inspiration, mais avec une très jolie reconstitution d’époque, tandis que la photographique de Ben Davis (qui rappelle celle du récent film "Hope Gap" de Guillaume Nicholson), se révèle irrésistible, alors que le village de Saltdean, dans le Sussex de l’Est anglais, le long de la Manche, a servi de lieu de tournage pour les scènes se déroulant dans les années 1990, le film ayant été majoritairement tourné à Brighton, à quelques kilomètres de là.
Étonnement, ce n’est pas pour son couple homosexuel, ni pour leur relation clandestine à l’époque que cette histoire émeut, mais bien par la position de la femme, vivant dans l’ombre de celui-ci, elle qui est jouée par Emma Corrin (Marion jeune) et Gina McKee (Marion âgée), volant entièrement la vedette aux hommes de l’histoire, dont les segments narratifs manquent de profondeur d’écriture. D’ailleurs, on pourrait reprocher à l’écriture de Ron Nyswaner, d’après le roman de Bethan Roberts, de naviguer trop en surface, faisant usage abusif d’ellipses temporelles, abandonnant durant près de quarante ans ses personnages, ou bien lors des premiers émois - supposés - amoureux entre Tom et Marion, leur mariage étant célébré, en termes de montage, quelques secondes à peine après que Tom ait annoncé à Patrick, sur la plage, vouloir se marier... Tout cela va donc un peu trop vite pour soulever toute la complexité et tristesse autour de cette histoire d’amour sacrifié, ayant quelque part volé la vie d’une femme, humiliée, qui n’aura jamais cessée de vivre seule. Les moments les plus touchants sont dès lors ceux où Gina McKee regarde, pensive, l’horizon, ou ceux où elle replonge dans le passé, au grès des pages qu’elle tourne, au travers desquelles elle prendra conscience de la souffrance de Patrick, abandonné, lequel a vu sa vie s’écrouler très vite... Emma Corrin (révélée dans la série "The Crown", sous les traits de Diana) est également très convaincante dans la peau de la jeune femme amoureuse, en 1957, découvrant, impuissante, la liaison de son époux avec un homme, alors que celle-ci avait déjà commencé avant qu’elle ne le rencontre, ce qui est d’autant plus blessant pour son personnage, forcément jaloux. Mais globalement, "My Policeman" manque de contextualisation de ses sujets, et de passion, à l’image du jeu sans relief d’Harry Styles, surtout par rapport à celui de son partenaire de jeu, David Lawson (vu dans les séries "Peaky Blinders" et "The Last Kingdom"), plus vulnérable et en danger...