Synopsis : Neil et Alice Bennett forment le noyau d’une famille aisée en vacances au Mexique jusqu’à ce qu’une urgence lointaine écourte leur voyage. Lorsqu’un membre de la famille perturbe l’ordre établi, les tensions latentes se font jour.
Avec : Charlotte Gainsbourg, Tim Roth, Iazua Larios , Henry Goodman, Monica del Carmen
Sundown arrive sur nos écrans quasiment neuf mois après Nuevo Orden (Nouvel Ordre), mais il a été réalisé avant celui-ci ! Il est très difficile de présenter Sundown sans en dévoiler les rouages de l’intrigue. Tout au plus, pouvons-nous, sans trop nous tromper, affirmer que le titre convient bien s’agissant de crépuscule, mais que l’on ne pourra vraiment comprendre cela qu’à la fin du film. Un film qui donnera certainement envie de retourner dans une salle pour le revoir après qu’il ait décanté comme un grand cru. Et nous avons affaire à un grand film de Michel Franco et, en réalité, comme chacun de ses films en est un. Ici, celui-ci bonifie grâce à Tim Roth (Neil), un acteur qui a déjà tourné avec lui. Mais il y a aussi Charlotte Gainsbourg (Alice) dont les liens entre les deux ne sont pas explicites dès le début, même si l’on a la réponse sous les yeux, fût-elle ambigüe, dès les premiers mots du synopsis : Neil et Alice Bennett.
En fait ce qui les lie et qui sera finalement révélé assez vite dans le film est moins important, moins essentiel que ce qui les délie ! A savoir pourquoi Neil ne retourne pas au pays avec Alice et les adolescents ! Et il nous semble que dès les premières images du film une clé nous est donnée. Nous sommes dans un bateau et la caméra se focalise sur des poissons, sur le pont, hors de l’eau, qui agonisent. Ce plan dure une bonne dizaine de secondes et ensuite nous montre le visage de Neil qui regarde ces poissons mourir. On ne reviendra pas sur ce plan qui parait simplement anecdotique et donner une couleur locale à l’intrigue. A dire vrai, la "couleur locale" est cependant essentielle puisque la plage d’Acapulco est un personnage essentiel du film.
Il est important de noter que le réalisateur n’a pas fait appel à des figurants, mais a tourné sur les lieux mêmes avec les personnes qui fréquentent habituellement la plage. Il a inséré "ses" scènes dans ce décor "naturel" en veillant à garder le naturel (difficile parfois d’éviter un "regard caméra" de la part de ces "figurants" !).
Mais Acapulco n’est pas le seul personnage du film. Il y a Neil qui passe son temps sur la plage, à ne rien faire, semble-t-il, et qui a choisi de se "déclasser" en choisissant un hôtel bien éloigné du luxe de celui où il séjournait avec Alice. Il y a le pourquoi de ce changement et toutes les questions que le spectateur se pose (ainsi qu’Alice) sur les atermoiements de Neil et ce qui semble son apathie par rapport à ce qui se passe autour de lui (ainsi un acte de violence, coutumier au Mexique, sans cependant atteindre ici la violence de Nouvel Ordre ! mais cependant qui semble faire partie de la banalité du quotidien). Neil apparait ici comme un dilettante que rien n’affecte et qui vit le cours du temps dans une insouciance parfois digne de Diogène. A tel point que nous avons pensé Neil comme un cynique au sens philosophique du terme.
En revanche, Alice est tout sauf cynique, pas plus que les adolescents d’ailleurs, eux qui doivent vivre une épreuve à Londres où ils ont retrouvé leur richissime niveau de vie tout en étant confrontés à l’absence incompréhensible de Neil qui postpose sans cesse la possibilité d’un retour au pays pour porter avec Alice ce qu’elle subit. Car Neil ne subit rien ou ne semble rien subir. Non seulement cynique (cf. supra), c’est l’ataraxie qui semble le caractériser. Et ce n’est que dans la dernière partie du film qu’une clé nous est donnée "en négatif" et que nous découvrons, grâce à une réplique relative à un dossier d’assurance, que Neil "savait". Et en arrivant aux derniers plans du film, ce savoir de Neil explique son intrigue et l’étrange et lumineuse (mais paradoxale) conclusion du film. Possédant désormais cette clé qui donne sens à la totalité du film et à l’attitude de Neil, l’on ne peut que convier le spectateur à revoir ce crépuscule d’un homme.
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