Genre : Comédie
Durée : 89’
Acteurs : Marina Foïs, Benjamin Voisin, Jean-Charles Clichet, Albert Delpy...
Synopsis :
La folle histoire de Louise qui se retrouve un beau matin, prise au piège dans sa propre voiture, terrassée par une attaque de panique dès qu’elle veut en sortir, et de Paul qui vole la voiture et du coup la kidnappe. Les voilà tous les deux embarqués dans un road-movie mouvementé !
La critique de Julien
Au rayon des comédies de cet été 2022, on parie fortement sur le succès de "En Roue Libre", premier long métrage de Didier Barcelo. Bien que son cheminement et sa résolution soient connus d’avance, ce road-movie, filmé pourtant pratiquement en huit-clos, est une surprise dans son genre, lequel donne le sourire tout au long de son voyage jusqu’au Cap Ferret, en compagnie de deux personnages d’âge différent, aussi bien paumés l’un et l’autre, lesquels vont alors s’apprivoiser, confronter leur situation personnelle (bien aidés par des rencontres qui vont les ramener à leur normalité), eux qui forment un couple sans en être un, lequel va s’aider mutuellement vis-à-vis de leur problématique, lesquels souffrent en effet d’un même lien indicible...
On y découvre alors Louise (Marina Fois), une infirmière de bientôt quarante-cinq ans qui, un beau matin, sera prise de panique, l’empêchant de quitter sa Volvo 240 Break, de couleur moutarde, elle qui appartenait à son père. Effondrée sur elle-même, cette femme, divorcée, un brin déboussolée dans sa vie monotone, ne parviendra pas, en effet, à mettre un seul pied dehors, de là à dormir à l’intérieur de son bolide de compétition. Pendant la nuit, celle-ci sera alors volée par un jeune homme, Paul (Benjamin Voisin), en situation d’explosion, elle qui tentera vainement de se cacher dans sa voiture, avant qu’il la découvre, mais sans parvenir à l’en extraire. Commencera alors pour ces deux passagers un trajet plus libérateur qu’attendu, culotté part leur tempérament, et parsemé de rencontres aussi cocasses les unes que les autres.
Ça roule fort bien entre Marina Foïs et Benjamin Voisin ! César du meilleur espoir masculin en 2022 pour son rôle dans "Illusions Perdues" de Xavier Giannoli, l’acteur de vingt-cinq ans est à la fois naturel, imprévisible et touchant dans la peau de ce jeune homme en colère, lequel cherche à se venger, lui dont la violence n’est, bien évidemment, pas innée. Face à lui, Marina Foïs, vingt-cinq ans de carrière quant à elle, fait ce qu’elle sait faire de mieux, à savoir jouer un personnage perché, capable de passer du comique à l’intense, et en moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire. Son personnage va alors retrouver ici sa liberté en étant paradoxalement enfermé dans sa voiture. Leur duo, plein d’ardeur, fonctionne à merveille, irrésistible de fraîcheur, tandis que l’écriture enlevée et aux petits oignons des dialogues s’en donne à cœur joie, forte de nombreuses répliques tempétueuses qui font mouche. Les deux compagnons de route ne se laisseront pas alors marcher sur les pieds, quitte à se provoquer, mais pour mieux chercher à émanciper l’autre. Bref, une relation qui prend, et fait sens, et qui parvient à toucher.
"En Roue Libre" enchaîne alors malicieusement les sorties de route narratives, venant mettre des bâtons dans les roues de ces deux acolytes, à la fois forcés de se côtoyer et de devoir jongler avec des imprévus, ce qui viendra apporter ici une surprenante fougue mal élevée à la narration du métrage, qui dépoussiérer, à sa façon, le style cinématographique très codifié du road-movie. Ainsi, une bonne dose de rencontres atypiques et un humour pince-sans-rire sont ici parfaitement intégrés aux sous-propos traumatiques des personnages, que Didier Barcelo et Marie Deshaires n’oublient pas pour autant de développer, eux qui les rapprochent, sans pour autant forcer, à leur tour, le trait.
Le metteur en scène sait également filmer ses personnages, et capter les nuances de leur jeu, et leurs émotions. Et là où son film étonne également, c’est bien dans sa réalisation, au travers desquelles les images semblent avoir été tournées en route, dans la voiture en question. Pourtant, il était impossible pour l’équipe de tourner dans celle-ci, le moteur étant trop bruyant. C’est pourquoi tous les intérieurs dialogués ont été enregistrés en studio, avec une technique de mur LED, donnant ainsi l’aspect confondant de réalité aux décors extérieurs.
Malgré quelques clichés, "En Roue Libre" trace ainsi sa route, et nous rappelle par moments - à son avantage - le film "En Liberté !" (2018) de Pierre Salvadori, du moins dans le traitement de ses personnages principaux, mais également dans la relation qui se noue entre eux, et la drôlerie de son écriture. On y retrouve également quelques points communs avec "Presque" de Bernard Campan et Alexandre Jollien, sorti en début d’année. C’est une agréable comédie qui, au contraire de bien d’autres, parvient à nous faire (sou)rire à de nombreuses reprises, tout en racontant une histoire solaire et amusante, autour de personnages profondément humains, tendres et cocasses. Vous auriez donc tort de ne pas vous laisser tenter par le voyage !