Genre : Thriller
Durée : 98’
Acteurs : Benoît Poelvoorde, Mélanie Doutey, Catherine Salée, Jackie Berroyer, Alba Gaïa Bellugi...
Synopsis :
A la mort de son père, éditeur célèbre, Jeanne Drahi emménage dans la demeure familiale en compagnie de son mari, Marcel Bellmer, écrivain à succès, et de leur fille. Mais une étrange jeune fille, Gloria, va s’immiscer dans la vie de la famille et bouleverser l’ordre des choses...
La critique de Julien
Trois années après "Adoration", Fabrice Du Welz redirige Benoît Poelvoorde, mais cette fois-ci en tête d’affiche de son thriller "Inexorable", dans lequel le Namurois interprète Marcel Bellmer, un écrivain ayant connu jadis le succès avec son roman "Inexorable", emménageant alors avec son épouse et éditrice Jeanne Drahi (Mélanie Doutey), dans la demeure ardennaise qu’elle vient d’hériter de son père. Mais alors que Marcel s’apprête enfin à donner suite à son best-seller, au sortir d’une dépression qui l’a terrassé, le couple, qui vit avec leur petite fille et leur chien Ulysse, verra s’immiscer dans leur nouvelle vie une jeune demoiselle, au comportement trop fougueux, serviable, à laquelle ils offriront alors - à tort - une confiance aveugle...
Poelvoorde, que l’on sait pudique et réputé pour ne pas aimer les scènes intimes, se révèle être en parfaite confiance devant la caméra de Du Welz, lequel se met même carrément à nu. Aidé par sa surprenante partenaire de jeu, Mélanie Doutey, qui est une amie de longue date, l’ayant ainsi aidé à se libérer, l’acteur est sans aucun doute la pierre angulaire de ce film, et livre ici une imposante interprétation, autour d’un personnage imposteur, plein de duplicité. La vénéneuse Alba Gaïa Bellugi, que le cinéaste a découvert dans la série d’Arte, "3 x Manon" (2014), est quant à elle une belle révélation, bien que son rôle soit totalement téléphoné...
Alors qu’il laisse planer trop de zones d’ombre sur le passé - pourtant clef - de ses personnages, "Inexorable" ne tient pas la route en termes d’écriture, ne fut-ce qu’au travers des réactions de ce couple, indifférent quant au fait de laisser entrer dans leur vie une parfaite inconnue, et même de la laisser s’occuper à plein temps de leur propre fille, eux qui sont ainsi incapables d’ouvrir les yeux. Énervant ! Mais l’autre gros problème du film, c’est sans doute la démarche de Du Welz, qui tente ici de créer de la tension au travers de son histoire, mais qui s’y méprend. En effet, ce dernier force ici le spectateur, et le prend même en otage dans ce thriller mécanique et faussement oppressant, et pour lequel on lit ainsi trop facilement dans le jeu de l’antagoniste, soit une enfant malheureuse, compromise, et à l’obsession maladive. Cette implosion d’un homme et de sa famille, suite à l’arrivée d’un demoiselle somme toute innocente, se révèle alors attendue, prévisible et, in fine, insupportable, tout en étant éprouvante à regarder. Or, quand on sait qu’il y a un peu de Fabrice Du Welz dans chacun de ses personnages, c’est à se poser des questions...
Empruntant au giallo, mais également au thriller gothique entre Mario Bava et Dario Argento, ainsi qu’aux thrillers sexuels et home-invasion des années 90, le film de Du Welz n’a également pas grand-chose pour lui, dans le sens où il semble ici pomper aux cinéastes dont il s’est nourri jusqu’à maintenant, et cela jusqu’à certains plans, très caractéristiques et identifiables. Heureusement, le cinéaste peut compter sur le jeu plus qu’impliqué de ses acteurs, ainsi que sur la photographie de Manuel Dacosse (chef opérateur de "L’Étrange Couleur des Larmes de ton Corps" d’Hélène Cattet et Bruno Forzani), tout comme de son choix de tourner son film non pas en numérique, mais bien sur pellicule, et précisément en Super 16 "Glorious Kodak", même si le grain sur l’image n’apporte finalement pas grand-chose au récit, si ce n’est de la superficialité...