Genre : Drame
Durée : 93’
Acteurs : Hassan Madjooni, Pantea Panahiha, Rayan Sarlak, Amin Simiar...
Synopsis :
Iran, de nos jours. Une famille est en route vers une destination secrète. A l’arrière de la voiture, le père arbore un plâtre, mais s’est-il vraiment cassé la jambe ? La mère rit de tout mais ne se retient-elle pas de pleurer ? Leur petit garçon ne cesse de blaguer, de chanter et danser. Tous s’inquiètent du chien malade. Seul le grand frère reste silencieux.
La critique de Julien
Dans la famille Panahi, il n’y a pas que le père, Jafar, qui fait carrière dans le cinéma. Son fils, Panah, né à Téhéran en 1984, a ainsi étudié le cinéma à l’Université des Arts de Téhéran avant de devenir photographe de plateau, assistant opérateur et assistant réalisateur, puis de seconder les films les plus récents de son père, de l’écriture jusqu’à la post-production. "Hit the Road" marque pour l’occasion son premier passage derrière la caméra pour un long métrage, lequel a été présenté à la Quinzaine des réalisateurs au Festival de Cannes 2021.
Inspiré du parcours d’un ami qui lui a fait le récit de son voyage, ce drame intimiste et réel, filmé sur les routes des régions reculées d’Iran, à la frontière de la Turquie, met en scène un phénomène de plus en plus courant dans l’Iran d’aujourd’hui. Mais dans une démarche loin de toute approche sociologique, son cinéaste choisit ici un prisme pour le moins situé aux antipodes du cinéma de son père. Faussement plus léger dans la forme, moins frontal dans ses propos, ce film suit alors une famille dont on ne sait rien au départ, voyageant vers une destination pour le moins inconnue, alors que chacun de ses membres se comporte étrangement, comme s’ils étaient animés pas une troublante excitation, voire une appréhension, ce qui sera vite confirmé. En effet, au plus ils traceront leur route, au plus le réalisateur Panah Panahi glissera, ici et là, des indices sur les enjeux qui se jouent pour cette famille, dans cette voiture, vers un lieu où leur vie prendra un nouveau départ...
Alors que son metteur en scène a toujours vécu avec la sensation d’avoir été surveillé et sur écoute, étant donné un régime iranien exerçant une pression constante sur les familles d’artistes ou d’intellectuels, "Hit the Road" raconte une histoire universelle de quête de liberté, et d’émancipation humaine, loin des filets d’une politique répressive, malgré le déchirement familial. Filmé au travers de sublimes paysages désertiques et rocailleux, sous un soleil de plomb, tout en ponctuant son récit de rencontres insolites, Panah Panahi a tourné majoritairement son film dans une voiture, témoignant alors du refuge qu’elle est notamment devenue, telle une maison ambulante, pour les Iraniens, eux qui ne sont pas (systématiquement) réprimandés s’ils y commentent le moindre écart, à l’image d’écouter de la musique pop (les carreaux cependant fermés), elle qui est interdite dans ce pays depuis la révolution islamique de 1979, et qui a vu beaucoup d’interprètes quitter leur pays, en exil.
Nébuleux dans sa construction, voire dispersé, et renfermé dans ses émotions, "Hit the Road" peine malheureusement à venir chercher l’empathie du spectateur, la faute à un angle de vue, certes original, mais qui ne reflète pas en profondeur le mal-être qui ronge ses personnages, derrière ce voyage en voiture, des plus anodins en apparence, duquel on reste trop longtemps extérieur. Mais ce premier essai n’en demeure pas moins le fruit d’un témoignage actuel des plus courageux, et nostalgique pour toute une population, elle qui n’aura sans doute jamais l’occasion de le voir...