Synopsis : Elisabeth de Raincy, Présidente de la République, a choisi de se retirer de la vie politique. A trois jours du premier tour de l’élection présidentielle, elle apprend par son Secrétaire Général, Franck L’Herbier, qu’un scandale venant de l’étranger va éclabousser son successeur désigné et donner la victoire au candidat d’extrême-droite. Ils ont trois jours pour changer le cours de l’Histoire.
Acteurs : Léa Drucker, Denis Podalydès, Alban Lenoir, Benjamin Biolay
Diastème est le pseudonyme de Patrick Asté. Celui-ci est un auteur-compositeur-interprète, musicien, écrivain, dramaturge, scénariste, metteur en scène et réalisateur français. On lui doit notamment le film Un français qui racontait l’histoire de Marco, qui, avec ses copains Braguette, Grand-Guy et Marvin, cognait les Arabes et collait les affiches de l’extrême droite. Jusqu’au moment où il sentira que, malgré lui, toute cette haine l’abandonnait. Mais comment se débarrasser de la violence, de la colère, de la bêtise qu’on a en soi ? C’était le parcours d’un salaud qui tentera de devenir quelqu’un de bien. Ce salaud était interprété par Alban Lenoir que l’on retrouve ici dans le rôle d’un garde du corps, très proche de la présidente de la république, interprétée par Léa Drucker. Elle est Elizabeth de Raincy, malade (on peut penser à un cancer) mais est signée en secret et seuls quelques-uns sont au courant, dont sa fille et son garde du corps. Diastème ne précise pas à quel parti elle appartient mais l’on peut penser à un parti républicain de droite ou de centre droit. C’est son premier ministre qui est appelé à lui succéder mais elle apprend qu’une bombe va éclater, non pas celle d’un attentat mais médiatique qui réduira à néant les chances d’être élu pour son successeur. Et face à lui, un candidat populiste, d’extrême droite. L’on pourrait songer à L’Exercice de l’État de Pierre Schoeller (2011), même si le film de Diastème n’atteint pas le même niveau. N’empêche, son film aurait pu s’intituler "La Française" car il s’agit ici de faire découvrir les enjeux nationaux (et plus possiblement) intrinsèquement liés à l’intime. Et l’intime sur plusieurs niveaux : la relation de la présidente avec sa fille, avec son garde du corps et avec son secrétaire (Denis Podalydès, qui met en lumière l’importance d’un personnage qui oeuvre souvent dans l’ombre, Secrétaire Général de l’Élysée et donc de la Présidente). Diastème qui se veut ici critique de l’extrême droite n’a pas voulu mettre en scène des personnes réelles (et donc, puisque c’et de cela qu’il s’agit au moment où le film sort en France, une semaine avant la Belgique, pas E. Macron et M. Le Pen !). Il n’empêche que la sortie du film au moment même où se déroule son intrigue fictionnelle invite à penser, à réfléchir. Le monde d’heir est donc un film à voir, en particulier pour le jeu de ses interprètes, malgré quelques faiblesses, en particulier dans le dernier tiers du film dont la fin reste ouverte. A ce sujet le réalisateur précise : "Je ne sais pas ce que va décider Elisabeth, la scène finale offre un dénouement ouvert. Je ne donne aucune indication sur ce que, moi, je trouverais souhaitable (et très sincèrement je ne sais pas), les personnages ne parlent pas par ma voix… La question du crime d’État est complexe, comme le rappelle Franck : quand la France fait exécuter un soldat de Daech, s’agit-il d’un crime d’État ? Il y a quelque temps, le Président se réjouissait par un tweet que l’armée française ait “neutralisé” un émir d’Al-Qaïda. Neutraliser, c’est tuer. À quel moment peut‑on décider qu’on peut juger tel être inhumain et pas tel autre ?". L’on retiendra un moment symbolique lors d’un moment crucial du film où un des protagonistes corne la page du livre qu’il est en train de lire, Moby Dick... Un geste si insignifiant mais auquel on pensera longtemps après avoir quitté la salle...
Mise à jour 12/4/22
Ce 12 avril, Diastème publie sur son compte Facebook :
J’aurai donc écrit et réalisé deux films sur la montée de l’extrême-droite en France.
Quelques années de ma vie, donc. Pas les plus reposantes. Mais j’en suis très très fier. Je crois que je connais bien le sujet, maintenant. Et je connais bien le parti de Marine Le Pen, je connais sa violence, je connais ses méthodes, je connais ses mensonges. J’apprends qu’un réalisateur français s’est filmé en train de brûler sa carte d’électeur après les résultats du premier tour. Je vois tous ces gens de gauche, dépités, qui ne veulent pas choisir, voire même voter Marine Le Pen. La colère est compréhensible, la folie non.
Le parti de Marine Le Pen a été créé par des collaborateurs et des Waffen SS, et il porte encore en son seing nombre de nostalgiques du Reich, antisémites, racistes, homophobes, anciens skins, membres du Gud – dont des amis intimes de sa Présidente. Le parti de Marine Le Pen est soutenu et financé par la Russie, la Russie de Vladimir Poutine – comme tous ses alliés d’extrême-droite en Europe.
J’ai passé beaucoup de temps, ces dernières semaines, à discuter avec des députés ou des maires, des journalistes politiques, des spécialistes de l’extrême-droite, et je n’ai entendu qu’une seule chose, la peur. Pour la première fois de leur vie, vraiment, ils pensent que l’extrême-droite peut remporter cette élection. Je le pense aussi. Il suffirait de pas grand chose, comme dans mon film, un dérapage, un événement, une désertion. J’aurais adoré, moi aussi, que la gauche remporte cette élection. Ce ne sera pas le cas (et j’espère qu’elle remportera les législatives). Mais si l’on se dit de gauche, ou de droite républicaine – ou tout simplement humaniste, ne pas aller voter Emmanuel Macron au second tour est un acte suicidaire. C’est être responsable du plus grand drame que connaîtra notre pays depuis la seconde guerre mondiale. C’est se tirer une balle dans la bouche.
PS : En troisième semaine d’exploitation, LE MONDE D’HIER garde ses 200 copies et est visible partout en France. Un film c’est peu, bien sûr, ça reste un film. Mais dîtes au réalisateur qui a brûlé sa carte d’électeur que si Marine Le Pen est élue, il n’y aura plus de Culture en France, d’exception culturelle. Des films, il ne pourra plus en faire.