Genre : Drame, thriller
Durée : 107’
Acteurs : Virginie Efira, Bruno Salomone, Quim Gutiérrez, Jacqueline Bisset, Valérie Donzelli, Nadav Lapid, Thomas Gioria...
Synopsis :
Judith mène une double vie entre la Suisse et la France. D’un côté Abdel, avec qui elle élève une petite fille, de l’autre Melvil avec qui elle a deux garçons plus âgés. Peu à peu, cet équilibre fragile, fait de mensonges, de secrets et d’allers-retours, se fissure dangereusement. Prise au piège, Judith choisit la fuite en avant, au risque de tout perdre.
La critique de Julien
"Madeleine Collins" n’est que le troisième long métrage du cinéaste français Antoine Barraud, lequel s’essaie pourtant déjà ici au dur exercice du drame sous forme de thriller à indices, en témoigne la scène d’ouverture, tournée en plan-séquence, dans un magasin de mode, laquelle est la première pièce du puzzle, sans que le spectateur ne sache encore où la placer... Virginie Efira interprète ici Judith, une mère de famille qui joue sur sa profession de traductrice afin de mener une double vie. Il y a d’abord en Suisse, où elle vit avec Abdel (Quim Gutiérrez) et Nino, la petite fille qu’ils élèvent, et ensuite en France, avec Melvil (Bruno Salomone) et leurs deux garçons. Son équilibre se verra alors peu à peu fragilisé par ses mensonges et allers-retours incessants...
Fidèle à l’exploration du thème de l’identité, de l’image, du paraître, Antoine Barraud met en scène ici un film intriguant, à la plastique formelle, et à la structure morcelée, lui qui amène le spectateur à être actif, étant donné qu’il lui livre, à chaque scène, des indices. Son personnage principal s’y invente alors de la fiction en permanence, avant de tomber dans son propre piège. Et autant dire que Virginie Efira est parfaite dans ce rôle, laquelle prouve une fois de plus toute l’étendue de son talent, dans le rôle ici d’une femme et maman capable de cacher ses efforts de dissimulation même à ses propres enfants, malgré ses malaises récurrents, et une folie intérieure qui s’extériorisera peu à peu, malgré elle. Sublime, persuasive, tempétueuse, autant dire que l’actrice est la pierre angulaire de ce film, lui qui ne nous livre malheureusement pas toutes les pièces dudit puzzle. Et cela est fort dommageable à son dénouement, et dès lors au souvenir très vaporeux qu’il nous laisse après séance, tandis que les clefs de compréhension du plan-séquence d’ouverture ne trouvent réponse qu’au sein d’une brève réplique. Sans rien en révéler, on comprendra que ce dernier est une nouvelle fois un jeu de miroir avec lequel s’amuse son réalisateur. Son casting éclectique, principalement masculin, appuie également ici cette entreprise collective du mensonge, de Bruno Salomone à l’acteur espagnol Quim Gutiérrez, en passant par le jeune et déjà troublant Thomas Gioria. Or, face à Madeleine, sa propre mère, Patty, jouée par Jacqueline Bisset, est sans doute le personnage qui a le plus induit sa conduite, outre ses rapports illicites/transgressifs personnels.
On ne va pas se mentir et dire qu’on a apprécié plonger dans le quotidien de la vie sinueuse de cette femme, que Virginie Efira porte largement sur ses épaules. Cependant, le scénario de "Madeleine Collins" finit par nous laisser perplexe, et sur notre faim, faute d’éclaircies, d’épisodes énigmatiques, et d’incohérences, avec lesquelles sont metteur en scène, Antoine Barraud, a sans doute voulu nous piéger, à son tour...