Genre : Drame
Durée : 106’
Acteurs : Seidi Haarla, Yuriy Borisov, Yuliya Aug...
Synopsis :
Une jeune Finlandaise prend un train à Moscou pour se rendre sur un site archéologique en mer arctique. Elle est contrainte de partager son compartiment avec un inconnu. Cette cohabitation et d’improbables rencontres vont peu à peu rapprocher ces deux êtres que tout oppose.
La critique de Julien
Grand prix ex-æquo avec "Un héros" d’Asghar Farhadi au Festival de Cannes 2021, cette adaptation du roman du même nom paru en 2011 de l’écrivaine finlandaise Rosa Liksom nous embarque pour une virée en train, de Moscou à Mourmansk, avec Laura (Seidi Haarla), une étudiante finlandaise qui étudie l’archéologie et qui souhaite aller jusqu’à cette ville (la plus grande du monde au nord du cercle polaire arctique), située à l’extrême nord de la Russie d’Europe, et cela afin d’y voir des pétroglyphes, soit des dessins symboliques gravés sur une roche naturelle, et faisant ainsi partie de l’art rupestre. Mais alors qu’elle devait s’y rendre avec Irina (Dinara Droukarova), sa compagne cachée et professeur d’Université, c’est finalement seule qu’elle prendra le train (très rustique), pour de nombreux jours. Sauf qu’elle devra partager sa voiture-couchette avec Ljoha (Youri Borissov), un inconnu - de prime abord - rustre, maladroit avec les femmes, solitaire, et fan de vodka. Pourtant, les kilomètres vont rapprocher ces deux êtres partageant alors plus de points communs qu’ils ne le pensaient...
Après "Olli Mäki" (2016), tourné en noir et blanc et mettant en scène l’histoire du premier Finlandais à boxer dans un championnat du monde, le cinéaste finlandais Juho Kuosmanen adapte (très) librement le voyage de cette jeune femme déconnectée, cherchant un idéal de vie qu’elle pensait alors trouver dans sa relation amoureuse, mais pas très saine, avant se rendre compte grâce à une rencontre imprévue que ce qu’elle cherchait était finalement ailleurs. Quête de l’Autre et de soi-même, "Compartment n°6" va donc au-delà des stéréotypes que l’on peut avoir envers autrui, lequel peut en plus nous en apprendre sa propre personne. Avec sa narration volontairement intemporelle (bien qu’un grain est bien visible à l’écran), le film installe alors une relation complexe, au travers duquel deux êtres vont se livrer, malgré ce qu’ils portent (de lourd) en eux, sans pour autant être une romance, mais bien une histoire d’amour, de sentiments insensés, alors (à) découvert(s).
Tourné la majeure partie du temps dans un train, la mise en scène du film n’en demeure pas moins amovible, et permet à ses personnages de quitter leur couchette très étroite au cours de leur voyage (rythmé d’ailleurs le titre de Desireless), et cela afin notamment de rencontrer d’autres personnes, et de découvrir des bribes de la Russie profonde, filmée ici en hiver. Dès lors, la caméra de Juho Kuosmanen, filmant avec proximité les visages, laisse place à la neige, au froid, à une lumière du jour peu présente, mais qui fait tout de même du bien face au caractère exigu et irrespirable de la cabine de train que partagent ses personnages. Par contre, le concept des représentations anciennes que sont ici les pétroglyphes n’est métaphoriquement pas une évidence vis-à-vis du parcours de son héroïne, même si on comprend qu’à force de chercher quelque chose de permanent, elle en oublie les choses temporaires, et importantes, bien que c’est grâce à ces pétroglyphes qu’elle a pu ouvrir les yeux...