Synopsis : Anas, ancien rappeur, est engagé dans un centre culturel d’un quartier populaire de Casablanca. Encouragés par leur nouveau professeur, les jeunes vont tenter de se libérer du poids de certaines traditions pour vivre leur passion et s’exprimer à travers la culture hip-hop...
Acteurs : Anas Basbousi, Ismail Adouab, Meriem Nekkach, Zineb Boujemaa
Le dernier film de Nabil Ayouch est une sorte de biopic documentaire consacré à la transmission du genre ’Hip Hop". Faute de bien connaître ce genre musical et de pouvoir rendre compte du film en toute connaissance de cause (même si nous avons apprécié la vitalité de celui-ci, son rythme, le dynamisme des jeunes "acteurs" et l’implication d’Anas Basbousi dans son premier rôle au cinéma), nous laisserons surtout la place, dans cette brève critique, à ce qu’exprime et dit Nabil Ayouch( [1]).
Celui-ci voulait donner la parole à la jeunesse. Souhaitant laisser une trace dans son quartier, il a "créé la fondation Ali Zaoua pour faire naître au Maroc des centres culturels et offrir à ces jeunes la même opportunité que j’ai eue quand j’étais gamin. On a ouvert cinq centres à ce jour et celui de Sidi Moumen, qui est dans le film, c’est le premier."
A propos de l’idée et de la genèse de ce film, il ajoute : "ça vient d’une rencontre. Peu de temps après l’ouverture du centre, un jour, un mec débarque. 25-26 ans, pas plus. Il se présente comme un ancien rappeur, un monde ‘derrière lui’ nous dit-il. Mais il arrive au centre avec l’envie de transmettre. Il nous propose un programme La Positive School of Hip Hop, des cours pour apprendre aux jeunes à s’exprimer et à écrire sur leur vie. C’est Anas, qui est devenu le personnage central du film."
Le recrutement des jeunes qui jouent dans le film (et ne sont donc pas professionnels) s’est fait en parcourant tout le pays. La construction du film qui laisse place à une certaine improvisation et une créativité des acteurs et actrices, sur base de grandes idées directrices (tout en donnant des instructions aux cadreurs via des oreillettes !) se fait sur plusieurs années et a donc laissé place à un formidable dynamisme.
Le réalisateur montre aussi que la liberté n’est pas simple et que des menaces pèsent sur ces jeunes et qu’il souhaite aussi montrer que tout n’est pas encore gagné lorsque le film se termine !
"Le centre est un refuge. Dès qu’on est à l’extérieur, je voulais qu’on sente que les choses soient moins simples, les corps peut-être moins libres. Et puis, montrer que cette jeunesse ne se laisse pas faire et essaye de reprendre le pouvoir dans la rue. Notamment, les jeunes filles. J’ai toujours été impliqué dans les combats féministes de ce pays. Je les trouve extraordinaires, ces jeunes filles qui font du rap, qui parlent de leur corps, du regard des hommes sur elles, du poids des grands frères qui veulent les asservir. Leurs problématiques sont très fortes et j’ai envie qu’on les entende. On a parfois une image un peu datée de la jeunesse du Maghreb. Avec ce film, je montre qu’au contraire, elle est tout aussi engagée, tout aussi moderne et politique. Elle ne demande qu’à s’exprimer et à être écoutée. Il suffit juste de lui donner l’opportunité et les armes pour prendre la parole. Bien sûr qu’une certaine partie de la population, très marquée par la religion et les traditions, a tout intérêt à la faire taire. C’était important pour moi de montrer contre quoi ils se battent. Mais, plutôt que de montrer tout ce qui pourrait les faire taire, je crois que c’était plus important encore de célébrer leurs voix, de les faire résonner très fort, de montrer que grâce au corps et à la parole, ils résistent."