Synopsis : Alors que s’accroissent la colère et le mécontentement devant les injustices sociales, de nombreuses manifestations citoyennes sont l’objet d’une répression de plus en plus violente. « Un pays qui se tient sage » invite des citoyens à approfondir, interroger et confronter leurs points de vue sur l’ordre social et la légitimité de l’usage de la violence par l’Etat.
Le documentaire de David Dufresne aurait dû être présenté dans le cadre de La quinzaine des réalisateurs lors du Festival de Cannes 2020. Hélas, la pandémie Covid19 en a décidé autrement.
Lien vers l’interview de David Dufresne.
Le réalisateur est également, voire surtout, journaliste et écrivain. Pour ce qui est de la réalisation, il s’était spécialisé jusque-là au "web-documentaire" ; il s’est intéressé depuis fin 2018 au mouvement dit des "gilets jaunes" et se consacre surtout aux violences policières. Le documentaire Un pays qui se tient sage est son premier long-métrage pour le cinéma. Le titre fait référence à ces images que l’on a pu voir dans les médias (et reprises dans le film) de lycéens agenouillés, les mains sur la tête, avec le commentaire d’un membre des forces de l’ordre selon lequel, "Voilà une classe qui se tient sage".
Le documentaire se structure sur base de trois éléments : des interviews ou plutôt des prises de parole ou des commentaires de plusieurs personnes face à des images projetées en très grand devant elles ; des images filmées par David Dufresne et de nombreuses vidéos, "capturées" en pleine action par des personnes sur le terrain, protagonistes ou témoins grâce à leurs smartphones.
L’on ne découvre qu’à la fin l’identité et la fonction des intervenants. Pour le réalisateur, il s’agit de ne pas biaiser la prise de parole en lui donnant un statut dû à la fonction, mais, simplement une parole d’un humain parmi d’autres humains (on renverra pour cela à l’interview de David Dufresne qui sera diffusée sur RCF début octobre 2020. Si le documentaire semble être un réquisitoire, il n’en est cependant pas un selon le réalisateur qui donne la parole également à des voix de membre des forces de l’ordre, des "autorités" en quelque sorte, du moins qui ont accepté de s’exprimer.
Pour David Dufresne : « Tous les pays du monde sont confrontés aux violences policières. Pour les démocraties, c’est un enjeu devenu crucial à leur propre survie.
Le film questionne cette définition de Max Weber :« l’État revendique le monopole de la violence physique légitime » Qu’est-ce que l’État ? La violence légitime ? Qui lui dispute son monopole ? Et qui en tient le récit ? »
Ces questions de définition, de vocabulaire constituent la trame même de ce qui est donné à voir pour que l’on réfléchisse. Légitimité et légalité ne sont pas des concepts équivalents et ceux-ci sont questionnés durant un film glaçant. Des images sont parfois très dures, choquantes. Bien sûr, l’on pourra toujours (se) poser la question de qui a commencé, du contexte qui précéde(rait) celles-ci et les interventions policières, mais l’on ne pourra nier qu’elles ont conduit à de véritables abus d’une violence parfois inouïe face à des événements qui s’inscrivent dans une dynamique révolutionnaire qui a structuré le pays lui-même.
L’on reteindra aussi l’importance des images, filmées par des citoyens qui deviennent témoins d’événements qui seraient autrement occultés. Certes il faut toujours garder un esprit critique, car l’on peut faire dire aux photos et aux images des choses qui en modifient la perception, mais la quantité de matériaux récoltée montre bien la réalité des faits, des actions et, justement, les abus qui ont été commis. Depuis quelque temps, des images qui nous parviennent d’autres pays nous font découvrir d’autres abus, raciaux ceux-là, et qui ont des enjeux qui dépassent de loin les individus concernés. L’on retiendra aussi que si une Nation ou ses responsables sont prompts à dénoncer les dériver dans d’autres pays et/ou régimes, il sera dur d’entendre que des reproches analogues leur sont faits !
Lien vers l’interview du réalisateur.