Signe(s) particulier(s) :
– premier long métrage du scénariste et réalisateur Benjamin Parent (il a co-écrit "Mon Inconnue" d’Hugo Gélin), lequel a été découvert en 2012 avec son court-métrage "Ce n’est pas un Film de Cow-boys", lui qui a ensuite notamment créé la série "Les Grands" (une série qu’il a créée), les deux projets traitant déjà de l’adolescence.
Résumé : Tom, un adolescent timide et sensible, s’apprête à faire sa rentrée dans un nouveau lycée. Pour l’aider à s’intégrer, il peut compter sur les conseils de Léo, son grand frère et véritable mentor. Léo va s’employer à faire de Tom un mec, un vrai, mais son omniprésence va rapidement se transformer en une influence toxique. Tom va devoir batailler pour s’affranchir de l’emprise de Léo et trouver son propre chemin...
La critique de Julien
Sorti en France au début de l’année, "Un Vrai Bonhomme" débarque directement chez nous en vidéo à la demande, faute d’avoir pu bénéficier d’une sortie en salle. Mais c’est déjà mieux que rien, et cela vous donnera surtout l’opportunité de découvrir ce beau et bon film, même si c’est depuis votre canapé, car ce drame lumineux est une agréable surprise, qui mérite d’être vue par le plus grand nombre. Mais pitié, ne regardez pas la bande-annonce du film.
Après avoir réalisé son premier court métrage "Ce n’est pas un Film de Cow-boys" (2012), traitant de la perception de l’homosexualité et de la virilité chez les adolescents, Benjamin Parent poursuit l’exploration de cette tranche d’âge et de ses comportements avec l’histoire de Tom (Thomas Guy), un jeune ado introverti qui s’apprête à faire ses premiers pas angoissés au lycée. Souffrant de troubles développés à la suite d’un accident survenu deux ans plus tôt, Tom trouve alors beaucoup de réconfort et de conseils en la personne de Léo (Benjamin Voisin), son grand-frère, et modèle, puisqu’il semble tout mieux faire que lui. Tandis que Tom s’apprête à jouer à son tour de ce même et nouveau rôle (sa maman est enceinte), le voici lâché dans la cour des "grands", où il va devoir s’affirmer afin de ne pas se faire marcher dessus...
Dès les premières minutes, on a la mauvaise impression que Benjamin Parent va tenter maladroitement de nous cacher une vérité pour le moins prévisible. Or, force est de constater qu’il rebondit rapidement sur cette dernière, et avec intelligence, laquelle servira et portera ses propos. Pourtant, dans l’absolu, "Un Vrai Bonhomme" parle, comme de nombreux films, plus anciens ou récents, de l’adolescence. Mais le cinéaste le fait ici en arpentant une intrigue familiale et personnelle très forte, jusqu’à révéler un climax émotionnel intense, auquel on ne s’attendait absolument pas. Et il faut bien dire que ses quatre acteurs principaux, dont surtout la révélation Thomas Guy, apportent beaucoup en réalisme à cette histoire. Le jeune garçon qu’il incarne touche alors au plus profond de nous, lequel transparaît un manque de confiance en lui, et une terrible angoisse qu’il combat, à tort, par les injonctions de masculinité de son frère, que ce dernier renvoie sur lui, et qui l’aident ainsi à surmonter ses peurs, mais pas de la meilleure façon qui soit. Comme quoi, l’un n’est pas l’autre, d’où l’importance de trouver son propre chemin, ses propres valeurs.
Par le portrait touchant de Tom, Benjamin Parent traite de l’estime de soi, quand on est d’autant plus déstabilisé et conditionné à réagir à la suite d’événements qui nous dépassent et desquels on se relève avec des séquelles, tel un deuil. Aussi, il est question de la rivalité masculine entre les adolescents d’aujourd’hui, et notamment ici pour une fille. Pour autant, elle n’est jamais stéréotypée, ni gratuite, et offre un bel apprentissage à son héros, qui s’en relève ainsi avec la tête haute.
Tous ces thèmes sont alors abordés au sein d’une intrigue certes des plus simples, mais qui se construit autour de la personnalité si riche de Tom, alors entouré de parents bienveillants, qui réagissent en conséquence, et interprétés ici par Isabelle Carré et Laurent Lucas. Maintenant, on ne va pas se mentir, et dire que l’écriture de certains personnages secondaires n’est pas des plus originales, dans le sens où certaines réactions sont courues d’avance. De plus, la mise en scène n’est pas très folichonne, bien qu’elle se laisse suivre avec énormément de naturel. Qu’importe, ces obstacles sont vite franchis par le spectateur, étant donné l’authenticité de l’ensemble, dont des interprétations des acteurs, très bien dirigés.
Oui, "Un Vrai Bonhomme" pourrait être montré à des adolescents, duquel on pourrait très bien en analyser les comportements, eux qui reflètent ici une certaine réalité, agrémentée d’un bagage dramatique correspondant alors au contexte extérieur du jeune, et venant ainsi jouer dans la balance. Bref, la mise en situation que nous propose alors Benjamin Parent est des plus pertinentes, et permet de traiter l’émancipation et l’affirmation de soi par la matérialisation physique des repères qui nous manquent, alors arrachés par la vie, ce qui est d’autant plus compliqué emmagasiner lorsque l’on est un adolescent, en pleine quête identitaire.
Comédie dramatique fraternelle et "adulescente", sur base du "teen-movie", mais tout en allant plus loin, "Un Vrai Bonhomme" a tout pour engendrer l’empathie. C’est un film à la fois dur et doux, mais pas trop, remplit d’humanité et d’espoir. Bref, un vrai moment de cinéma, lequel nous emporte par sa fraîcheur instantanée, et sa finesse émotionnelle.