Signe(s) particulier(s) :
– après le thriller politique "Le Grand Jeu" sorti en 2015, le cinéaste Nicolas Pariser revient avec un second long métrage qui traite aussi de politique, mais via l’angle de la comédie dramatique.
Résumé : Le maire de Lyon, Paul Théraneau, va mal. Il n’a plus une seule idée. Après trente ans de vie politique, il se sent complètement vide. Pour remédier à ce problème, on décide de lui adjoindre une jeune et brillante philosophe, Alice Heimann. Un dialogue se noue, qui rapproche Alice et le maire et ébranle leurs certitudes.
La critique de Julien
Quelques mois après avoir joué "Un Homme Pressé" d’Hervé Mimran" (2018), Fabrice Luchini semble l’être toujours autant. Pire, dans la peau du maire de Lyon Paul Théraneau, il est même fatigué et en manque d’inspiration, alors que sa ville est en plein mouvement. Heureusement, la jeune et jolie Alice Heimann (Anaïs Demoustier), ultra-diplômée, mais quelque peu paumée, et qui a déjà donné des cours de philosophie à Oxford, va lui venir en aide dans sa tâche.
Il faut d’emblée s’intéresser au monde de la politique pour apprécier pleinement ce film, dans lequel il n’y a, en plus, pas vraiment d’intrigue. On y suit les coulisses de la politique actuelle à l’échelle de la mairie de Lyon, soit une ville qui bouge énormément, tandis que l’Europe a les yeux rivés sur elle. Or, son maire, un homme très apprécié, et dans le moule depuis trente années, est en panne sèche. Pourtant, à force de discution, de remise en question avec une charmante recrue, ce dernier retrouvera tout le swing nécessaire à sa position politique, et ses stratégies.
Mise en scène à la fois classique et nerveuse, ainsi qu’éloquence de la parole sont au rendez-vous dans ce film emmené avec conviction d’interprétation par ses deux interprètes principaux, parfaitement en cohésion. Car "Alice et le Maire" nous parle aussi de deux êtres en proie aux doutes. D’un côté, Luchini est un homme ambigu qui a instantanément arrêté de penser contrairement à son milieu, mais lequel a trouvé dans la politique une vraie vocation, alors que de l’autre, le personnage de Demoustier ne cesse de penser, mais n’a toujours pas trouvé son propre chemin, malgré l’instruction et la culture dont il fait preuve. Voilà pourquoi, entre ces deux-là, ça matche, tandis que la rencontre est passionnante à suivre. Pourtant, leurs seuls moments de rencontre se feront entre deux réunions, sur un trajet en voiture, dans un couloir, etc. En effet, le milieu dans lequel ils travaillent - non-stop - est toujours en circulation. Et à cet égard, le cinéaste parvient à illustrer différents styles de paroles politiques, telles que la parole technique, lyrique, les négociations, mais aussi l’écriture d’un discours. Car d’une manière ou d’un autre, il faudra que les deux protagonistes arrivent à correspondre ensemble malgré l’emploi du temps surchargé du maire, et à ressortir des idées de leurs entrevues, aussi brèves soient-elles.
Le cinéaste filme aussi une opposition politique entre le vieux et le nouveau monde, soit la pensée et l’action. Ainsi, Pariser s’interroge ces thématiques dont ne font preuve aujourd’hui en même temps les gens de pouvoir, comme s’ils en étaient incapables, et comme si elles étaient, dès lors, des extrêmes. Pourtant, il ne le fait jamais dans une démarche agressive, mais plutôt nostalgique, et fine. Et au regard de la manière dont il aborde ces sujets, on est ici davantage dans de l’introspection plutôt que dans une prise de position qui se tient. Certes, ce regard insoupçonné sur le burn-out politique a du sens (et prouve qu’il pourrait toucher tout le monde), mais il manque ici considérablement de mordant.