Signe(s) particulier(s) :
– inspiré de l’histoire vraie de Christian Moullec, l’un des pionniers du vol en ULM avec les oiseaux, elle-même adaptée du roman homonyme de Nicolas Vanier, publié en 2019 ;
– début juin 2018, un ULM utilisé pour le tournage du film a survolé la seule colonie de flamants roses de France installée dans les salins d’Aigues-Mortes, ce qui a créé une panique chez les oiseaux, tandis qu’un nid sur dix a été abandonné, en pleine période de couvaison. Un plainte a donc été déposée contre X pour "perturbation intentionnelle et destruction d’œuf d’espèce protégée", alors que, ironie du sort, le film parle de la protection des oiseaux...
Résumé : Christian, scientifique visionnaire, étudie les oies sauvages. Pour son fils, adolescent obnubilé par les jeux vidéos, l’idée de passer des vacances avec son père en pleine nature est un cauchemar. Pourtant, père et fils vont se rapprocher autour d’un projet fou : sauver une espèce en voie de disparition, grâce à l’ULM de Christian ! Commence alors un incroyable et périlleux voyage...
La critique de Julien
Pour son neuvième film, le réalisateur, écrivain et aventurier français Nicolas Vanier s’est lancé dans l’adaptation de son roman homonyme "Donne-Moi des Ailes" (2019), lui-même librement inspiré par l’histoire vraie de l’ornithologue et précurseur Christian Moullec, lequel a débuté, en 1995, des vols avec des oiseaux à bord d’un delta plane personnellement motorisé, cela dans l’optique de défendre la cause des oiseaux, et notamment ici celle de l’oie naine de Suède, elle dont la route migratoire empruntée depuis toujours est aujourd’hui trop dangereuse pour son espèce, entre pollution lumineuse, dangers des aéroports, zones de chasse non contrôlées, etc.
Ce n’est pas la première fois que le cinéaste et explorateur traite de la nature au cinéma, ainsi que du lien que l’humain tisse avec elle. Ainsi, entre "Loup" (2008), "Belle et Sébastien" (2013), "L’Odyssée Sauvage" (2014) ou encore "L’École Buissonnière" (2017), Nicolas Vanier reste donc dans les clous du spectacle de la sensibilisation à la protection des animaux, et ici des oiseaux migrateurs. Mais il le fait au sein d’une histoire qui peine à se justifier sur grand écran, outre que par les scènes où elle nous envoie en l’air. Il est ainsi question de Christian (Jean-Paul Rouve), un scientifique engagé, lequel s’est lancé le défi un peu fou de voler en ULM avec des oies naines de Suède, afin de leur apprendre un nouvel itinéraire de migration, le leur n’étant plus praticable pour la survie de l’espèce. Installé dans un mas de Camargue, ce père de famille décomposée en vient, par passion et obstination, à sacrifier involontairement ses liens sociaux, dont familiaux, eux qui font pourtant tout le sel de la vie. Alors qu’il échafaude ce projet, en secret, à la lisière de la légalité, ce dernier apprendra qu’il doit garder son fil Thomas (premiers pas au cinéma pour Louis Vazquez), passionné quant à lui de jeux vidéo, étant donné que sa mère (Mélany Doutey) ne peut s’en occuper. L’idée de passer du temps loin des écrans avec son père en pleine nature ne l’enchantera pas du tout, bien que le voyage que va lui partager son père les rapprochera tous deux, sans qu’ils puissent se douter une seule seconde des périls qui les attendent...
Qui n’a jamais rêvé de voler avec les oiseaux ? Si Christian Moullec l’a fait dès 1995, il n’en est pourtant pas le premier. En effet, William Lishman et Joseph Duff sont devenus, en 1998, les premières personnes à diriger le vol d’oiseaux (des bernaches du Canada) avec un aéronef et, en 1993, les premiers à effectuer une migration d’oiseaux dirigée par un avion. D’ailleurs, leur histoire avait inspiré à l’époque le film de Carroll Ballard "L’Envolée Sauvage" ("Fly Away Home" en version originale), sorti en 1996. Dans "Donne-Moi des Ailes", Nicolas Vanier, qui a également volé avec des oiseaux, s’intéresse une fois de plus à un récit d’enfance et d’éveil à la nature, parfois saisissant de beauté, surtout lors des vols de l’ULM entouré, en escadrille, d’oies, survolant alors les décors naturels allant de la Camargue aux îlots et fjords norvégiens. Alors qu’aucun cascadeur n’a été recruté pour les vols, à l’exception de Christian Moullec pour doubler Jean-Paul Rouve dans les parties les plus périlleuses, on applaudit évidemment le message de protection de la vie sauvage que nous partage le film, et forcément la transmission qu’elle engendrera entre les générations. Par contre, on est beaucoup moins convaincu par celle qui se joue devant nos yeux entre un père et son fils.
Alors qu’il met du temps à prendre son envol, ce récit d’aventure humaine frise l’ingestion par ses sentiments familiaux quelque peu sirupeux, et l’invraisemblance de son ensemble. En effet, on imagine difficilement un enfant capable de s’apprivoiser pilote d’ULM en un rien de temps, et de voler à des centaines de mètres de la terre-ferme, alors guidé par son seul GPS. Heureusement, de gentilles personnes seront là pour l’aider à chacun de ses arrêts, elles qui feront de lui le nouveau héros de la toile, tandis que ses parents tenteront de le retrouver, puis de le suivre. Cerise sur le gâteau par la présence d’une journaliste (Lilou Fogli) toujours présente là où il faut, mais on ne sait pas comment. Globalement, le casting n’enchante guère, et encore moins lorsque Mélanie Doutey se met à pleurnicher ou crier sur Jean-Paul Rouve...
On s’ennuie aussi, à vrai dire, la plupart du temps, jusqu’au moment où l’on en aura, jamais pour notre argent, mais parfois pour nos yeux. En effet, "Donne-Moi des Ailes" manque clairement de contenu narratif et d’aspérités, lui qui se traîne en plus sur près de deux heures. Alors certes, il y a de belles images, mais cela ne suffit pas à faire un bon film.
Tandis qu’il est en train de tourner son prochain film "Poly" (attendu pour l’année prochaine) inspiré du feuilleton télévisé écrit et réalisé par Cécile Aubry dans les années 60, et une fois de plus basé autour d’une histoire de relation entre l’homme à l’animal, Nicolas Vanier, à force de vouloir mettre en scène ses souvenirs, ses combats et son histoire, oublie parfois d’en raconter une qui se tient.