Signe(s) particulier(s) :
– treizième long métrage du cinéaste français Cédric Klapisch, qui retrouve ici Ana Girardot et François Civil, lesquels avaient tourné dans son précédent film "Ce Qui Nous Lie" (2017) ;
– dernier film de l’actrice Renée Le Calm, qui apparut dans six films de Cedric Klapisch, morte en avril 2019 à l’âge de cent ans.
Résumé : Rémy et Mélanie ont trente ans et vivent dans le même quartier à Paris. Elle multiplie les rendez-vous ratés sur les réseaux sociaux pendant qu’il peine à faire une rencontre. Tous les deux victimes de cette solitude des grandes villes, à l’époque hyper connectée où l’on pense pourtant que se rencontrer devrait être plus simple… Deux individus, deux parcours. Sans le savoir, ils empruntent deux routes qui les mèneront dans une même direction… celle d’une histoire amour ?
La critique de Julien
Autant dire dès le départ qu’on a connu Cédric Klapish beaucoup plus inspiré qu’avec son dernier film, "Deux Moi". Alors qu’il y redirige Ana Girardot et François Civil, déjà présents dans son précédent film, le cinéaste les met en scène dans le rôle de deux trentenaires parisiens vivant dans leur bulle, un peu paumés dans l’immensité de la capitale (et surtout dans leur vie), lesquels, sans s’en rendre compte, se croisent, et avancent dans la même direction...
On y découvre alors Rémy, joué par le très actif François Civil (déjà à l’affiche du "Chant du Loup", "Celle que Vous Croyez" et "Mon Inconnue" cette année), et Mélanie, interprétée par Ana Girardot, qui commence quant à elle à prendre de la place dans la paysage cinématographique francophone, qui cherchent à pimenter leur vie après des déceptions. Lui, qui vient pourtant de se voir offrir un nouveau travail, est plus qu’éteint au quotidien, tandis qu’elle vient de connaître une douloureuse fin de relation. Alors qu’ils habitent l’un à côté de chez l’autre, mais dans deux immeubles différents, séparés alors d’un mur citoyen, ces deux âmes-sœurs déambuleront dans leur existence vers un futur commun. Du psychothérapeute pour lui, des rendez-vous Tinder manqués pour elle, à l’adoption d’un chat pour lui, où encore aux cours de danse pour elle, "Deux Moi" nous invite dans le quotidien fort peu réjouissant de ces êtres qui ne trouvent plus leur place dans la société, sauf peut-être à l’épicerie du coin.
À l’heure des réseaux sociaux, et de leur place plus que douteuse (et pourtant prédominante) dans le lien social, Cédric Klapish nous parle du besoin d’amour d’hommes et femmes dans un monde où le travail, et sa rentabilité (surtout en pôle économique) est devenue une priorité de (sur)vie. Le réalisateur filme alors tour à tour ses deux personnages qui se cherchent, et se recherchent quelque part mutuellement, alors qu’ils se trouvent seulement espacés de quelques mètres l’un de l’autre, et dès lors d’une toute autre vie, où non pas le Redbull leur donnera des ailes, mais bien un regain de sentiments amoureux, dans leur triste existence. Bref, pas de quoi raconter quelque chose de bien révolutionnaire, et surtout pas de quoi fouetter un chat (même si le film rappelle par moment son long métrage "Chacun Cherche son Chat" sorti en 1996)...
Le gros problème du film, c’est donc sa prévisibilité, où le dénouement est connu d’avance, ce qui n’offre évidemment aucune perspective de surprise au spectateur. Alors qu’il était pourtant intéressant de traiter des prémisses d’une relation au travers d’une situation plus ou moins originale, "Deux Moi" souffre à la fois d’un grave problème de rythme et d’un montage poussif, où l’on ne fait que passer sans cesse d’un personnage à l’autre, sans grande évolution personnelle et narrative, et avec donc autant de passion que les personnages en ont. À vrai dire, il ne s’y passe finalement pas grand-chose, ni même la moindre action qui viendra remuer un peu la mélancolie générationnelle installée dans cette chronique urbaine de la solitude humaine connectée.