Signe(s) particulier(s) :
– second long métrage d’Anne Giafferi après "Ange et Gabrielle" (2015), elle qui est avant tout réalisatrice et scénariste de séries télévisuelles ("Fais pas ci, Fais pas ça", "Qu’est-ce qu’on Attend pour être Heureux ?", etc.) ;
– cette histoire est inspirée d’un reportage télévisuel où il étaient question de jumelles d’origine asiatique, alors séparées à la naissance, et adoptées par deux familles différentes (l’un à Paris dans le 16e arrondissement, et l’autre à Perpignan).
Résumé : Suite à une opération de chirurgie esthétique ratée, une comédienne fait appel à un sosie pour la remplacer sur son prochain tournage... sans se douter qu’il s’agit de sa propre sœur jumelle dont elle ignorait l’existence.
La critique de Julien
Avant de la retrouver dès le 03 juillet dans la comédie estivale d’Arnaud Lemort "Ibiza" face à Christian Clavier, Mathilde Seigner s’offre une gentille petite parenthèse dans "Ni Une, Ni Deux", l’occasion pour la sœur d’Emmanuelle Seigner d’interpréter le rôle inédit de jumelles à l’écran.
Il est alors question de Julie Varenne, une actrice dont la carrière cinématographique bât de l’aile, elle dont les trois derniers projets ont été des échecs critiques et publics. Un peu trop coincée, froide et hautaine, elle se voit alors proposer dans l’urgence, grâce à son manager (François-Xavier Demaison), un rôle dans une comédie qui pourrait bien relancer sa carrière. Entre temps, une certaine Laurette est montée sur Paris depuis Aix-en-Provence afin de lui révéler être en réalité sa sœur jumelle, ce qu’elle ignore. Malheureusement, la coiffeuse n’y parviendra pas, ne lui laissant au passage que sa carte de visite afin de se rendre à son salon pour s’y faire coiffer à l’occasion. Malgré la ressemblance douteuse entre elles deux (que lui fera d’ailleurs remarquer son manager), Julie n’y verra que du feu, elle qui est pour ainsi dire un peu trop obnubilée par son apparence, elle qui pense que son physique et son insuccès sont corrélés. Elle va alors subir une opération de chirurgie esthétique, laquelle va évidemment tourner au vinaigre. Sauf que le tournage de son nouveau film commence d’ici peu, et qu’il va bien falloir trouver une solution, pendant environ deux semaines, le temps que ses lèvres redeviennent normales. Elle engagera alors, dans le plus secret, les services de Laurette pour la remplacer jusqu’à son retour, tout en respectant des règles de conduite, et d’autres à ne pas franchir, afin de faciliter incognito l’échange au moment voulu...
"Ni Une, Ni Deux" est bien plus un instant télévisuel qu’un moment de cinéma, ce qui n’est pas étonnant quand on sait que sa réalisatrice à l’habitude de travailler pour le petit écran. Mais ce n’est pas pour autant que son second film est mauvais. Par contre, il est certainement un peu trop mesuré. Inspiré par un reportage vu à la télévision, le cadre dans lequel s’inscrit son film est quant à lui totalement fictif. Il ne s’agissait ni plus ni moins ici de l’occasion d’y parler également du cinéma, et surtout du métier d’actrices, à l’aube de ne plus pouvoir jouer de jeunes femmes...
En incarnant deux jumelles aux antipodes, Emmanuelle Seigner trouve le ton juste pour ne pas tomber dans la caricature trop facile de la gentille sœur d’un coté, et de la méchante de l’autre. La scénariste nuance de son coté cette histoire par un sous-propos identitaire lié à une blessure d’enfance jamais refermée, elle qui expliquerait peut-être la personnalité antipathique de Julie, elle qui ignore encore son lien de sang avec Laurette. Malheureusement, ce point de vue n’est pas assez approfondi, tandis que le traitement de l’histoire suit une trajectoire toute tracée, ne laissant que peu de place au naturel, et encore moins à la surprise. Aussi, on se pose des questions auxquelles on ne trouve pas ici réponses. Qu’en est-il des photos d’enfance de Julie ? Comment un tel secret a-t-il pu être gardé aussi longtemps ? Par contre, et même s’il ne faut pas y voir un clin d’œil établi et assumé, on apprécie la mise en abyme de Mathilde dans un rôle qui renvoie à la tenue actuelle de sa propre carrière d’actrice, qui peine à retrouver la gloire d’un rôle à succès...
Techniquement, "Ni Une, Ni Deux" affiche un travail bien exécuté, n’abusant absolument pas des champs-contrechamps, malgré le fait que l’actrice principale se donne sa propre réplique dans de nombreuses scènes. Les contraintes techniques de ce rôle n’entachent en rien la fluidité de cette rencontre, toujours aussi cocasse et cinématographiquement intéressante, non loin sans nous rappeler notamment l’excellent film "Legend" de Brian Helgeland, dans lequel Tom Hardy interprétait les gangsters et jumeaux Kray, dans un Londres des années 60. Par contre, on ne peut pas en dire autant de la mise en scène, qui manque cruellement d’audace, et d’énergie.