Signe(s) particulier(s) :
– première réalisation du touche-à-tout américain Robert Pickering Burnham, dit "Bo", connu depuis 2006 pour ses vidéos publiées sur sa chaîne Youtube, lequel a depuis notamment publié des albums et des spectacles de stand-up, d’ailleurs disponibles sur Netflix en Belgique ("What" et "Make Happy").
Résumé : Les dernières semaines de collège de Kayla, 13 ans, en huitième année d’études, avant son entrée au lycée.
La critique de Julien
Pour son premier film, Bo Burnham nous invite dans le train-train quotidien de Kayla, une collégienne en phase de terminer sa huitième année de grade, soit celle qui lui permettra de passer les portes du lycée. Sauf que la demoiselle espère que cette étape de sa vie lui permettra de la changer. En effet, élue l’élève la plus timide de l’école, physiquement un peu ronde et en pleine poussée d’hormones, la demoiselle n’a absolument pas confiance en elle, tandis qu’elle n’a, à proprement parler, aucun ami, mais au moins un papa attendrissant, et à l’écoute... Par contre, sur les réseaux sociaux et sur sa chaîne Youtube, Kayla est à l’aise, où donne des conseils de confiance en soi, d’amitié ou encore d’apparence, tandis qu’elle peine à les suivre dans la vie réelle... Bienvenue dans les affres d’une adolescente de la génération connectée.
À l’ère du numérique, le réalisateur et scénariste Bo Burnham nous dévoile le portrait d’une adolescente aussi transparente que touchante. Car Kayla est une fille comme toutes les autres, celles qui doivent se battre dans la vie pour espérer exister et se faire entendre. Moquée, rabaissée, évitée, la jeune fille de quatorze ans connaîtra alors une fin d’année scolaire dans l’urgence et l’angoisse. Il faut en effet que Kayla tourne, d’une part, la page de ces années collègues, et d’autre part qu’elle parvienne enfin à répondre à ses détracteurs, comme il lui faut aussi oser faire le grand pas, et aller vers autrui, même si elle devra pour cela ravaler sa timidité maladive.
"Nul", "cool", tels sont les adjectifs subjectifs les plus utilisés dans le langage de Kayla, ou lorsqu’on lui demande son avis, préférant ainsi rentrer dans le jeu de son interlocuteur, plutôt que de s’affirmer. Ne cessant de s’excuser (même aux yeux de son papa), la jeune fille agit par mécanisme de défense et d’accommodation à un tissu relatif qu’elle ne connaît encore que trop peu, elle qui cherche indirectement la complaisance. De plus, son segment de vie est raconté à la façon d’un enfant qui grandit avec Internet, et qui se réfugie derrière plutôt que d’affronter le monde qui l’entoure. Pourtant, dans la vie, Kayla est sur loin d’être dupe, mais ne sait tout simplement pas comment s’y prendre pour (re)bondir...
Au travers de ce film, une multitude d’adolescent(e)s risquent de se reconnaître, ou en tout cas à un moment de leur existence. Réaliste et sans artifice, ce récit tendre et parfois embarrassant nous montre les déboires de l’adolescence à un âge où côtoyer les smartphones n’est pas la meilleure solution pour s’affirmer et se construire. Aussi, le film offre une très jolie relation paternelle entre un père et sa fille, et montre que de simples mots peuvent tout changer, tout comme de prendre le temps de les dire, et la volonté de les entendre. Décidément, le soutien et le sentiment de se sentir aimer, ça fait pousser des ailes...
"Eighth Grade", c’est un petit film indépendant en toute simplicité, bien ancré dans son temps et à l’âge ciblé, avec humour et empathie. Sans laisser un souvenir impérissable en mémoire, le film s’apprécie pour sa mise en scène à la fois pop et introspective, mais surtout pour son personnage principal, qu’on aimerait à notre tour pouvoir aider.