➡ Vu au cinéma Caméo des Grignoux - Sortie du film le 07 novembre 2018
Signe(s) particulier(s) :
– second long métrage du réalisateur et scénariste Mohamed Ben Attia après "Hedi, un Vent de Liberté", reparti notamment en 2016 avec deux prix à la Berlinale (Meilleur premier film et Ours d’argent du meilleur acteur) ;
– comme pour son précédent film, les frères Dardenne co-produisent ce dernier ;
– présenté à la Quinzaine des réalisateurs au dernier Festival de Cannes.
Résumé : Riadh s’apprête à prendre sa retraite de cariste au port de Tunis. Avec Nazli, il forme un couple uni autour de Sami, leur fils unique qui s’apprête à passer le bac. Les migraines répétées de Sami inquiètent ses parents. Au moment où Riadh pense que son fils va mieux, celui-ci disparaît.
La critique de Julien
Pour son second film après le très touchant "Hedi", racontant le portrait d’un jeune tunisien refusant, malgré le poids familial, de vivre une vie toute tracée d’avance, dans un pays en pleine mutation, Mohamed Ben Attia nous revient avec un second film inspiré d’un témoignage radiophonique de parents partis à la recherche de leur enfant parti en Syrie.
Alors qu’il ne s’intéressait pas dans son premier film comme d’accoutumée au regard de la femme contrainte par le mariage forcé, mais bien à celui de l’homme, le cinéaste détourne une fois de plus ici un fait sociétal contemporain, mais vu d’un autre point de vue, tout aussi pertinent et légitime soit-il. Dans "Weldi", il traite de l’endoctrinement d’un jeune homme, mais vécu par ses parents, restés au pays, totalement impuissants et assommés par les événements, et le choix de leur fils, parti du jour au lendemain, sans aucune explication...
Intime et pudique, ce film permet à Mohamed Ben Attia d’affirmer déjà son propre style de mise en scène, en toute simplicité, sans artifices, ni bande-originale (ou presque). On est une fois de plus plongé au cœur d’un conflit personnel aux répercussions familiales, occasionné par la tournure de notre époque. Plutôt que de chercher alors à trouver des réponses aux questions qu’il soulève (on ne connaîtra rien des motivations du gamin), ce récit fictif, mais que l’on sait véridique dans l’absolu, illustre avec beaucoup de justesse le mal qui doit ronger ces parents, ayant perdu leur seule raison d’être, eux qui doivent involontairement culpabiliser, et associer ce départ à leur modèle éducatif, et la part affective qu’ils ont donnée et transmis à leur enfant.
Extrêmement lent (surtout dans sa première partie, qui installe les personnages), et filmé au plus près des visages des acteurs, "Weldi" convainc moins lors du périple syrien du père, largement dispensable, d’autant plus au vu de l’ellipse scénaristique qu’il le suit, même si ce dernier aidera ce père à "faire son deuil" par rapport au choix de son fils. Mais le voyage reste davantage contemplatif qu’explicatif.
"Weldi - Mon Cher Enfant" n’est donc pas un énième film sur le Djihad, mais plutôt un drame universel sur le questionnement et l’incompréhension de tiers suite au départ imprévu d’un être cher pour un (meilleur ?) ailleurs terrestre. Mais c’est également le témoin d’une génération qui se cherche, et dont les préoccupations et enjeux ne sont plus les mêmes que ceux des aînés.