➡ Vu au cinéma Acinapolis Jambes - Sortie du film le 03 janvier 2018
Signe(s) particulier(s) :
- s’inspire du best-seller "Le grand jeu : Les mémoires d’une reine du poker déchue" de Molly Bloom, ex-reine du poker revenue sur son parcours, et plus particulièrement sur son expérience dans le milieu de ces parties de poker clandestins ;
- première réalisation du scénariste des films "Des hommes d’Honneur", "Steve Jobs ", "Le Stratège" ou encore "The Social Network" (pour lequel il a été récompensé) ;
- pour ce film biographique, Aaron Sorkin a pris soin de réécrire les personnages secondaires afin de préserver leur anonymat, lui qui en connaît certains, tandis que certaines grandes célébrités se sont retrouvés autour de la table de poker de Molly Bloom, telles que Tobey Maguire, Leonardo DiCaprio, Ben Affleck, ou encore Matt Damon...
Résumé : La prodigieuse histoire vraie d’une jeune femme ex-skieuse et surdouée devenue la reine d’un gigantesque empire du poker clandestin à Hollywood. Née d’une mère psychologue et d’un père moniteur de ski, Bloom intègre l’équipe nationale de ski américaine à l’âge de 21 ans, puis étudie à l’Université du Colorado où elle se spécialise en sciences politiques. En 2003, elle se rend à Los Angeles et devient l’assistante d’un agent immobilier organisant lui-même des parties de poker privées. Elle épaule aussi son patron qui réunit toutes les semaines des joueurs de poker autour de parties clandestines. Virée sans ménagement, elle décide de monter son propre cercle : la mise d’entrée sera de 250 000 $ ! Très vite, les stars hollywoodiennes, les millionnaires et les grands sportifs accourent. Le succès est immédiat et vertigineux. Acculée par les agents du FBI décidés à la faire tomber, menacée par la mafia russe décidée à faire main basse sur son activité, et harcelée par des célébrités inquiètes qu’elle ne les trahisse, Molly Bloom se retrouve prise entre tous les feux…
La critique
Récompensé d’un Oscar pour le scénario adapté du film "The Social Network", Aaron Sorkin se lance ici dans sa première réalisation, lui à qui l’on doit un style d’écriture assez reconnaissable parmi mille, tant il privilégie le cinéma de parole, au débit accentué et effréné, sans mettre pour autant l’aspect divertissant de côté. C’est bien tout le contraire, notamment ici !
Avec "Le Grand Jeu" (qu’il scénarise également), il adapte le best-seller de Molly Bloom, une ex-reine du poker clandestin revenue sur son parcours, et avec laquelle il a directement travaillé pour l’aspect authentique de l’écriture. Bref, le genre de destin puissant que le grand cinéma affectionne tout particulièrement. Et nous aussi.
Pour son premier saut derrière la caméra, on tire notre chapeau au monsieur, tant son film passe comme une lettre à la poste, malgré le côté discursif et éloquent de l’histoire, prépondérant face au divertissement. Pourtant, il met en scène la vie de Molly Bloom avec une telle habilité qu’elle en devient passionnante.
En effet, Sorkin pose sa caméra avec maîtrise et respect dans la vie de cette femme douée et audacieuse, qui n’aura eu de cesse de se créer une place dans un milieu majoritairement masculin.
Ainsi, de son enfance tumultueuse face à son éducation patriarcale, en passant par la mise en place de ses affaires à LA, ou encore par le procès la condamnant pour ses parties clandestines, "Le Grand Jeu" joue cartes (et jetons) sur table !
Efficaces, le montage et la mise en scène enchaînent avec fluidité ses passages de vie marquants, qui permettent au spectateur de construire la personnalité de Molly, telle qu’elle se l’ait construite également. Certes, il faut parfois s’accrocher face au déluge d’informations, mais la découverte de ce personnage téméraire vaut le détour, d’autant plus qu’il est magistralement interprété par Jessica Chastain, quelques mois seulement après avoir littéralement brillé dans "Miss Sloane" (de John Madden), dans un rôle de femme tout aussi forte, bien qu’il soit encore plus complexe ici, au regard ce qui l’a forgé.
C’est que cette actrice s’y connaît en rôle féminin intensif et assez fort, elle qui est aussi engagée personnellement dans la vie, que ça soit contre la discrimination envers les femmes, l’intimidation et l’humiliation des corps, ou pour la santé mentale. Féministe, cette fantastique actrice possède le don de choisir des rôles qui mettent en valeur l’image de la femme, ce qui est très important dans cet Hollywood (on peut le dire) sexiste. Face à cette jolie rousse, Idris Elba et Kevin Costner interprètent des personnages moins bien construits, bien qu’une bonne partie du caractère de Molly résulte de sa relation avec son père, joué par le second (l’inverse aurait été étonnant). D’ailleurs, on retiendra particulièrement ces échanges (malheureusement trop rares) entre père et fille, qu’ils soient tantôt provocateurs, sincères, ou libérateurs. C’est finalement en creusant la psychologie de son personnage principal qu’Aaron Sorkin lui donne de l’épaisseur, et même de l’émotion.