Synopsis : Après des mois sans que l’enquête sur la mort de sa fille ait avancé, Mildred Hayes prend les choses en main, affichant un message controversé visant le très respecté chef de la police sur trois grands panneaux à l’entrée de leur ville.
Acteurs : Frances McDormand, Woody Harrelson, Caleb Landry, Jones, Peter Dinklage, Sam Rockwell, Abbie Cornish, Kerry Condon, John Hawkes.
La bande annonce de ce film laisse entendre un film "à la Coen Brothers", mais la bande-annonce est trompeuse, tout comme le titre en français. S’il y a bien une Coen touch, renforcée par le fait que l’actrice principale est l’épouse de Joel Coen, le film porte bien la marque de son réalisateur à qui l’on doit In Bruges en 2008 et Seven Psychopaths en 2012. L’on pourrait parler de "comédie dramatique", mais la catégorie serait elle-même trompeuse, car le drame est bien plus présent que la comédie. Il ne s’agit pas non plus de vengeance, car ce n’est pas la quête de Mildred, mais bien celle de la justice. Ces (ses) panneaux sont un rappel à l’ordre adressé aux autorités, aux forces de l’ordre et en particulier au chef de la police interprété par Woody Harrelson. Bien aimé de tous les habitants qui voient d’un très mauvais oeil celle qui pense et agit aux frontières de la ville, de la loi et de ce qu’ils considèrent comme la bienséance. Sa fille est morte, certes, violée puis brûlée (à moins que ce ne soit l’inverse), mais l’on ne retrouvera pas l’assassin si ce n’est par hasard... alors, laissons tomber et classons cette affaire.
Mildred sera également en tension avec l’adjoint du shérif, très raciste (nous sommes dans le Sud) et qui semble avoir torturé des Noirs lors dans leurs cellules (en fait un Sud qui a évolué et Dixon (Sam Rockwell sublime dans ce rôle), bas de plafonds, sous la coupe de sa mère contredira les éventuels détracteurs : "dans le Sud, on a évolué, on dit ’Il a torturé une personne de couleur !’)". N’empêche, le spectateur aura trouvé son antagoniste en la personne de Dixon... mais les choses seront bien plus complexes qu’une partition entre blanc et noir (le jeu de mots est presque involontaire !), entre bien et mal, entre bons et méchants. Chacun et chacune a sa part d’ombre et une zone de lumière, même s’il faudra du temps pour que les choses cachées se dévoilent au cours d’un film riche en sous-intrigues : la relation entre Mildred et son mari, celle-ci avec son fils, celle de Dixon avec sa mère, ou encore lui et d’autres avec Red Welby (celui qui loue les panneaux). Ajoutons-y la presse, les habitants et tout cela forme un mélange détonnant ou plutôt incendiaire... Et le feu de l’injustice peut alors devenir le feu de la vengeance alors même que les messages laissés par un défunt viennent donner de l’humanité à l’un ou l’autre, ou plutôt éclairer sur l’humanité qui est en eux.
Un film qui décrit une certaine Amérique profonde (bien loin cependant de The Florida Project) où chacun doit vivre avec ses fêlures, les blessures de la vie et de la mort, des relations perverties par le regard (mal) posé sur les autres, par les rancoeurs, l’atavisme... Un film qui offre une fin ouverte ou plutôt qui ne se ferme pas sur une clôture. Un film qui donne à penser tout en permettant à certains des protagonistes de tenter de panser les plaies après avoir été pris dans le feu de l’action ou pris des coups pour garder traces d’une confession...
Bande-annonce :