Synopsis : Le magnat du pétrole J.P. Getty est l’homme le plus riche du monde, quand son petit-fils est kidnappé à Rome par la mafia italienne au cours de l’été 1973. Les ravisseurs réclament 17 millions de dollars. Le milliardaire refuse de payer un cent pour le jeune garçon, et l’oreille coupée de celui-ci est envoyée à la famille. Désespérée de pouvoir sauver son fils à temps, sa mère Gail entreprend de négocier avec les ravisseurs. Malgré l’aide d’un ancien agent de la CIA, Gail devra rivaliser d’ingéniosité pour libérer son fils sans argent.
Acteurs : Michelle Williams, Mark Wahlberg, Christopher Plummer, Timothy Hutton, Charlie Plummer, Romain Duris, Marco Leonardi.
En résumé : Ridley Scott met en images une histoire vraie, celle d’un enlèvement qui a fait la Une des médias en 1973. Il le fait de manière classique avec des acteurs qui sont au service de l’intrigue et du suspens (même si la fin de l’histoire est connue). L’histoire est probablement fortement romancée, mais la relecture qu’en fait le réalisateur permet de mettre en lumière la face d’ombre de plusieurs protagonistes et en particulier le milliardaire J.P. Getty et son rapport à l’argent. Occasion également de prendre conscience de l’acharnement des médias qui agissent comme des rapaces.
C’est une "histoire vraie" que nous propose Ridley Scott, entachée d’une autre "histoire vraie", celle d’un de ses interprètes principaux, Kevin Spacey, célèbre aujourd’hui non pour avoir joué Frank Underwood, un président des USA, mais pour avoir eu des relations sexuelles inappropriées (comme on le dit de manière fleurie en ce pays) et sans consentement avec un adolescent. Il s’agit certes d’un autre débat, mais cette affaire Spacey a eu des conséquences pour le tournage du film puisque l’acteur devenant persona non grata il fallut donc lui substituer un autre acteur et retourner toute une série de scènes dans la dernière ligne droite. Nous ne saurons jamais ce que le film aurait donné avec l’acteur prévu initialement, mais nous pouvons assurer que celui qui le remplace fait un J. Paul Getty très crédible et que, pour autant que l’on puisse en juger, les nouvelles séquences tournées avec Plummer ne nuisent pas à la cohérence du film. De plus, l’âge de Christopher Plummer est plus cohérent avec son rôle. En effet, au moment des faits, J. Paul Getty a 80 ans... et Plummer, 88 ans, est plus crédible non grimé que les images vues antérieurement de Spacey... grimé ! Certes il y a des scènes plus anciennes, qui datent des années cinquante où nous serions en adéquation avec l’âge réel de Spacey. Mais, tous comptes faits, le bilan s’avère largement bénéfique et l’on a tout à gagner avec ce Plummer là.
C’est qu’il est un autre Plummer... qui joue le rôle de Paul Getty III, le petit fils de l’autre Getty joué par Christopher Plummer ! Et c’est ici pure coïncidence, car les deux acteurs n’ont aucun lien de parenté. Toutefois nous avons là un excellent interprète de cet adolescent du début des années septante. Les téléspectateurs l’auront découvert de 2011 à 2013 dans la série Boardwalk Empire, dans le rôle de Michael Thompson et de 2013 à 2015 dans celui de Timmy Sanders dans Granite Flats. Toutefois il faudra attendre l’an prochain (du moins pour la France, car rien n’est - encore annoncé - pour la Belgique) pour le découvrir dans un rôle remarquable dans un film qui l’est tout autant, réalisé par Andrew Haigh à qui l’on doit Greek Pete, Week-End, la série Looking, et 45 ans !
Charlie Plummer incarne donc à merveille cet adolescent qui n’est pas riche, mais à le tort d’avoir un grand-père qui l’est. Il se promène décontracté dans Rome. D’origine américaine, il parle l’italien – et c’est un réel plaisir de découvrir un film où l’emploi des langues est respecté (nous le relevions déjà pour le film Le jeune Karl Marx) plutôt que de tout passer à la moulinette de l’anglo-américain – et semble à l’aise dans la ville et les pièges pour touristes. Jusqu’à ce que... mais nous connaissons l’histoire ! Elle a marqué les esprits dans les années 70. A l’époque il n’y avait pas encore de médias sociaux et l’on écoutait plus encore la radio (le "poste") que l’on ne regardait la télévision. Mais la presse en faisait de larges échos alors que les gens, osons le très mauvais jeu de mots, étaient tout ouïe face à cet événement incroyable : un grand-père multimilliardaire qui ne veut pas payer une rançon... jusqu’au moment qui avait sidéré le grand public : l’envoi à un quotidien italien d’une oreille découpée, celle de l’adolescent enlevé. Ce fait divers avec donc marqué les esprits et puis est devenu une histoire oubliée. Sur un thème qui aurait pu n’être que de pure fiction, probablement déjà exploité au cinéma, le réalisateur revient en proposant une relecture des événements. Il est probable que les faits soient largement romancés pour les besoins de l’intrigue. Qu’il s’agisse du regard et des relations avec les ravisseurs en relevant en particulier l’un d’eux, Cinquanta, interprété par Romain Duris (qui sera atteint de ce que nous pourrions appeler un syndrome de Stockholm inversé !) ou des rapports entre Gail Harris (Michelle Williams) et J. Paul Getty et de celui qui jouera le rôle d’intermédiaire, Fletcher Chase (Mark Wahlberg). Le réalisateur ajoute encore à la tension dramatique en jouant au deus ex machina en faisant mourir le milliardaire la nuit même de la libération de son petit-fils, soit trois ans avant la mort réelle. Dans la "vraie vie", le petit-fils lui a toujours gardé des séquelles, essentiellement psychologiques [1].
Bande-annonce :