Synopsis : Josh travaille dans une ferme biologique en Oregon. Au contact des activistes qu’il fréquente, ses convictions écologiques se radicalisent. Déterminé à agir, il s’associe à Dena, une jeune militante, et à Harmon, un homme au passé trouble. Ensemble, ils décident d’exécuter l’opération la plus spectaculaire de leur vie...
Acteurs : Dakota Fanning, Jesse Eisenberg, Peter Sarsgaard, Alia Shawkat, Matt Malloy
Il s’agit du quatrième long métrage de Kelly Reichardt (1964), réalisatrice et scénariste américaine indépendante. Chacun de ses films s’attache tout particulièrement à l’être humain en relation.
Night Moves suit de près trois personnages, trois citoyens quasi lambda. L’un d’eux, Joe (Jesse Eisenberg – vu dans Social Network) travaille dans une ferme biologique de l’Oregon. Il fréquente des écologistes activistes (entre autres, Dena, une jeune militante issue d’une famille riche, et un ancien militaire, Harmon) et se radicalise. En renforçant mutuellement leurs convictions, ils vont mettre au point une opération choc très spectaculaire. Ils feront sauter un barrage notamment parce que celui-ci empêche la remontée des saumons.
La réalisatrice s’attache à nous faire découvrir les trois protagonistes, leurs motivations, la recherche de moyens pour mettre en œuvre l’opération (ici, trouver un bateau et de grandes quantités d’engrais riche en nitrates, ce qui n’est pas simple dans un climat post 11 septembre). Elle ne juge pas ces jeunes : Comment résister « quand un Etat peut marcher main dans la main avec l’industrie du pétrole ou une autre industrie ? ». Très sobre dans son écriture, elle ne montrera pas l’explosion (d’autant que comme cinéaste indépendante, elle doit tourner à peu de frais, avec des acteurs motivés qui ont travaillé avec un salaire minimal pour la « bonne « cause »). En revanche, elle montrera les conséquences. Les choses tournent mal : il y a mort d’homme. Comment vivre après cela ? Comment gérer le stress d’être pris mais plus encore la culpabilité. Le dernier tiers du film sera ainsi plus psychologique que policier et se concentrera surtout sur Joe.
Depuis plus de deux siècles, notre éthique s’est développée : passant des droits de l’homme à ceux de la femme et des enfants puis à ceux des animaux nous en sommes arrivés à penser aux droits de « la nature ». En ceux-ci, le regard de Kelly Reichardt est d’une neutralité bienveillante. Elle ne prétend pas défendre une action éco-terroriste. Néanmoins le spectateur peut se mettre dans la peau et dans la tête de ceux qui ont une conscience éthique exacerbée. Il comprend que par rapport aux pouvoirs et aux moyens en jeu, l’homme et la nature sont souvent perdants. La cause semble bonne et il est donc possible de comprendre les motivations de ces écologistes… jusqu’à ce que l’imprévisible et l’inéluctable se concrétisent.
Pour eux et pour le spectateur, la remise en question est brutale : est-ce qu’une juste cause peut être défendue par des actes contestables ? L’enfer est pavé de bonnes intentions, dit-on… Rien de manichéen dans ce film loin des blockbusters : au-delà de la fiction et de son intrigue minimaliste, il invite à réfléchir aux conséquences de nos actes, d’une part, tout en ouvrant des pistes de réflexions sur le rapport à la nature, d’autre part.