Synopsis : Neïla Salah a grandi à Créteil et rêve de devenir avocate. Inscrite à la grande université parisienne d’Assas, elle se confronte dès le premier jour à Pierre Mazard, professeur connu pour ses provocations et ses dérapages. Pour se racheter une conduite, ce dernier accepte de préparer Neïla au prestigieux concours d’éloquence. A la fois cynique et exigeant, Pierre pourrait devenir le mentor dont elle a besoin… Encore faut-il qu’ils parviennent tous les deux à dépasser leurs préjugés.
Acteurs : Camelia Jordana, Daniel Auteuil, Yasin Houicha, Nozha Khouadra, Nicolas Vaude, Jean-Baptiste Lafarge.
Que voilà une comédie supposée dont ou pouvait craindre de ne rien attendre. Et pourtant (raison pour un critique de ne pas toujours se fier à ses préjugés) que voilà un "drame-comédie" qui se démarque avec... brio des productions françaises habituelles très et trop typiques. Le sujet était... éloquent... mais pouvait-il rivaliser avec l’excellent documentaire A voix haute - La force de la parole de Stéphane De Freitas et Ladj Ly malheureusement quasiment passé... sous silence, avec une sortie juste à l’entrée des vacances en Belgique (mi-avril 2017 en France) ? Tous les ingrédients étaient pour la caricature à défaut du pire : la confrontation entre un professeur excellent dans sa matière et dans ses provocations verbales et une jeune beurette qui ne s’en laisse pas compter. Et pourtant, il n’en sera rien. Le professeur (excellent Daniel Auteuil, dirigé pour la première fois par Yvan Attal) se confronte à Neïla, interprétée par Camélia Jordana. Celle-ci est moins connue que son auguste rival, mais certains se souviendront d’elle dans Cherchez la femme où elle jouait un des rôles principaux, celui de Leila, mais aussi de Nous trois ou rien, Je suis à vous tout de suite ou encore Bird People.
Outre le professeur antagoniste, on retrouve également Yasin Houicha dans le rôle de Mounir, ami - et plus si affinités - de Neïla. Au coeur de ce triangle, le philosophe Arthur Schopenhauer et son opuscule (moins de cent pages) : L’art d’avoir toujours raison (ou La dialectique éristique) publié en 1864. Ce sera un plaisir pour qui l’a lu (ou donnera le cas échéant le goût de l’acquérir ou de le relire) car il nous est donné à entendre et découvrir les différents stratagèmes utilisés et utilisables dans les controverses en toute mauvaise foi. Rien que ce fil conducteur est un pur plaisir. Neïla se verra embrigader, malgré elle dans un concours d’éloquence. A son corps défendant pour commencer jusqu’à ce que l’ivresse des sommets la gagne. Quoique ? Sera-t-elle première comme le proposerait un feel good movie trop classique ? Peut-être que non et peut-être que oui, cela vous le découvrirez à l’écran dans une dernière joute oratoire pour défendre une cause qui paraissait perdue. Dame, c’est son boulot d’avocate... Et justement, après une surprise plutôt qu’un twist final, et une dernière joute oratoire entre Leïla et Pierre Mazard, utilisant de la meilleure façon l’insulte (à la manière de Schopenhauer, cela va de soi) nous retrouvons l’héroïne quelques années plus tard, avocate probable d’un jeune beur pour qui une meuf n’a rien à lui dire, qui déambule dans les couloirs d’un Palais de justice. Ces deux dernières scènes, pour intéressantes qu’elles soient, très ou trop attendues, n’étaient pas totalement nécessaires à notre point de vue. Il n’empêche, des dramédies comme celles-là, on en redemande !