Genre : Drame
Durée : 125’
Acteurs : Daisy Edgar-Jones, Taylor John Smith, Harris Dickinson, David Strathairn, Garret Dillahunt, Ahna O’Reilly...
Synopsis :
Kya, une petite fille abandonnée, a grandi seule dans les dangereux marécages de Caroline du Nord. Pendant des années, les rumeurs les plus folles ont conru sur la "Fille des Marais" de Barkley Cove, isolant encore davantage la sensible et résiliente Kya de la communauté. Sa rencontre avec deux jeunes hommes de la ville ouvre à Kya un monde nouveau et effrayant ; mais lorsque l’un d’eux est retrouvé mort, toute la communauté la considère immédiatement comme la principale suspecte. A mesure que la vérité sur les événements dessine, les réponses menacent de révéler les nombreux secrets enfouis dans les marécages.
La critique de Julien
"Là Où Chantent les Écrevisses" est la libre adaptation du roman du même nom de la zoologiste Delia Owens (publié en 2018 aux Editions du Seuil), alors co-produite par l’actrice américaine Reese Witherspoon, via sa société de production Hello Sunshine, souhaitant valoriser les femmes dans l’industrie du cinéma. Dans ce thriller dramatique voyant son intrigue prendre place simultanément en 1953 et en 1965 dans les marécages de Caroline du Nord, il est question de Kya "La Fille des Marais" Clark (Daisy Edgar-Jones), laquelle a grandi seule après le départ de toute sa famille sous la menace d’un père violent, lequel finira également par quitter la maison (ou plutôt la cabane) familiale. Abandonnée toute sa vie, moquée et méprisée pour sa différence par les habitants de toute la ville côtière (fictive) et rurale de Barkley Cove, la jeune demoiselle, naturaliste, mystérieuse et timorée, a pourtant vécu deux relations amoureuses, dont une intense avec Tate Walker (Taylor John Smith), lequel lui a appris à lire ni à écrire avant de quitter les lieux afin de tenter sa chance en métropole, et une autre, poussive, avec le violent Chase Andrews (Harris Dickinson), une célébrité locale issue d’une famille très aisée. Ce dernier, retrouvé mort dans les marais, verra alors Kya être accusée de l’avoir tué...
Réalisé par Olivia Newman, qui signe ici son second film après "Mon Premier Combat" sur Netflix en 2018, "Where the Crawdads Sing" suit une double chronologie, où ses deux segments narratifs vont doucement s’entremêler. Il y a, d’une part, la vie de la demoiselle, de son enfance à son adolescence jusqu’à ses histoires amoureuses, et d’autre part son procès, laquelle est défendue par l’avocat à la retraite Tom Milton (David Strathairn), face à un jury d’habitants qui ne vivent que par leurs préjugés, lesquels s’auto-jugent finalement eux-mêmes en jugeant la différence (qu’ils craignent) si facilement. Si la reconstitution des faits se laisse regarder sans mal malgré un rythme nonchalant, ce choix de mise en scène sirupeux, faussement intriguant, et ses personnages stéréotypés rendent ce drame trop convenu que pour lui permettre de sortir des sentiers battus du genre. Mais "Là Où Chantent les Écrevisses" parvient tout de même à se défendre comme il peut...
Il y a, en effet, dans ce film, un intéressant sous-texte féministe très actuel, au travers duquel une jeune demoiselle qui n’avait - enfant - jamais compris le départ de sa mère, finira alors par le comprendre, étant donné la peur de violences et de représailles masculines, qu’elle ressentira à son tour. La force mentale de son personnage principal, incarné avec satisfaction par Daisy Edgar-Jones (vue récemment dans le trash "Fresh" sur Disney+), est également à soulever, elle qui ne souhaite, en aucun cas, donner à ceux qui la pointent du doigt ce qu’ils souhaitent entendre d’elle. Cependant, son rôle est beaucoup trop écrit et victimisé, malgré un final qui, sans rien en dévoiler, révèle une part rusée et tragique de son personnage. À cet égard, dommage que le dernier acte soit si balayé, et larmoyant. À sa décharge, on apprécie également le contexte spatial dans lequel évolue cette double histoire (qui n’en est finalement qu’une histoire), tournée à la Nouvelle-Orléans, et à Houma, en Louisiane, au sein de zones humides et marécageuses, où vit une faune surprenante, bien que l’imagerie des lieux filmés soit surfaite et faussement idyllique, notamment au travers de scènes romanesques, à fleurs de peu. Quant au procès, distillé par des flash-back, il se révèle être de pacotille, lequel ne repose que sur des ragots et des spéculations qui ne laissent aucun doute... au doute, surtout lorsqu’on écoute les arguments de la plaidoirie de la partie plaignante...
"Là Où Chantent les Écrevisses" reste alors un petit film sans grande prétention, surfant cependant sur la nouvelle vague féministe sans précédent, destiné à un public cible qu’il parviendra à satisfaire sans mal, quitte à réussir à l’évader, au regard de son titre métaphorique, invitant à aller aussi loin qu’on le peut dans la nature, quitte à réussir à l’appréhender par elle-même, et ainsi à l’entendre...