Genre : Action, science-fiction
Durée : 146’
Acteurs : Chris Pratt, Bryce Dallas Howard, Jeff Goldblum, Laura Dern, Sam Neill, Campbell Scott, Omar Sy, Scott Haze, Justice Smith...
Synopsis :
Quatre ans après la destruction de Isla Nublar. Les dinosaures font désormais partie du quotidien de l’humanité entière. Un équilibre fragile qui va remettre en question la domination de l’espèce humaine maintenant qu’elle doit partager son espace avec les créatures les plus féroces que l’histoire ait jamais connues.
La critique de Julien
Dire qu’on attendait ce film est (si) peu dire. Sixième volet de la série cinématographique "Jurassic Park", initiée en 1993 par Steven Spielberg et son cultisme film ayant bercé notre enfance, "Le Monde d’Après" fait suite à "Fallen Kingdom" (2018) de Juan Antonio Bayona (2018), lequel débarque également trois années après le court-métrage "Battle at Big Rock", et six mois après la sortie en ligne du prologue à ce troisième épisode de la seconde trilogie, lesquels étaient tous deux réalisés par Colin Trevorrow, lui qui était déjà aux manettes du retour des dinosaures au cinéma, en 2015, et qui fut un succès planétaire fulgurant. Venant boucler la boucle, cet (ultime ?) épisode était notamment celui d’une double promesse : y faire côtoyer les dinosaures et les humains à l’issue des précédents événements, et surtout y retrouver l’ancienne génération de personnages emblématiques de la franchise, joués par Sam Neill, Laura Dern et Jeff Goldblum. Malheureusement, ni l’une ni l’autre n’est vraiment tenue. Pire : "Le Monde d’Après" est le moins bon film de "l’ère Jurassique" sur grand écran...
Souvenez-vous, en quelques mots... Il y a quatre ans, Isla Nublar était détruite par un volcan. Certains de ses dinosaures génétiquement modifiés avaient été alors vendus aux enchères au manoir d’un certain Benjamin Lockwood (James Cromwell), un vieil ami et ancien collègue fortuné de John Hammond. On apprenait alors que Lockwood avait créé Maisie (Isabella Sermon), un clone de sa propre fille décédée accidentellement, initialement élevée comme sa petite-fille. C’est alors cette dernière qui libérait, après moult péripéties, ces dinosaures dans la nature, estimant qu’ils avaient le droit, tout comme elle, de vivre. Aujourd’hui, Maisie a été adoptée par Owen (Chris Pratt) et Claire (Bryce Dallas Howard), tandis que l’actuel écosystème se voit désormais confronté à ces animaux préhistoriques. Mais outre cet équilibre fragile, des corporations aux intentions sinistres guettent la jeune fille (ayant pourtant soif de liberté et d’exploration), ainsi que le bébé de Blue, lesquels possèdent, en effet, un A.D.N. révolutionnaire. Des braconniers mettront alors la main sur eux, ce qui ne laissera d’autres choix au couple de se lancer à leur poursuite, ce qui ainsi les mettra sur la piste de Biosyn, une entreprise de génétique basée en Californie, ayant créé un sanctuaire de dinosaures, là où séjournent les plus grands spécimens terrestres capturés. Parallèlement, Ellie Sattler (Laura Dern), enquêtera également sur Biosyn, avec l’aide d’un ancien ami, et cela autour de criquets également génétiquement modifiés, lesquels sont en train de faire des ravages dans les cultures californiennes...
Ce n’est donc une surprise pour personne : Laura Dern, Sam Neill et Jeff Goldblum (lui qui était déjà là dans "Fallen Kingdom") reprennent du service, étant donné la menace qui guette l’humanité toute entière. On attendait donc beaucoup de leur retour, mais force est de constater que le film ne leur offre jamais au moins une scène digne de l’émotion que soulève leurs personnages fictifs. C’est à se demander à quoi sert ici le retour du trio Alan Grant-Ellie Sattler-Ian Malcolm, si ce n’est à amasser des sous. Figuratifs et spectraux, leurs segments narratifs font en effet pâle figure face à l’aura initiale de leurs personnages, qui semblent ne pas avoir beaucoup évolués. Et c’est triste pour eux, et pour nous... C’est donc à se demander pourquoi ils ont accepté - outre le (gros) chèque à la clef - de revenir dans l’aventure...
Parlons maintenant du scénario, catastrophique... Après une ouverture qui a la prétention de nous faire croire que l’invasion citadine de dinosaures a déjà eu lieu, et que ses principaux et dangereux représentants sont déjà en lieu sûr, le film, écrit pourtant à l’aide de trois scénaristes (dont le metteur en scène lui-même), s’engouffre rapidement dans ce qui semble être une redite de volets précédents, ou en tout cas dans leurs grandes lignes, et en plus sans aboutir. En effet, le film de Trevorrow fait ici rapidement machine arrière, et reconcentre tout son beau petit monde dans un énième sanctuaire, et fait donc obstacle narratif et visuel des conséquences de l’arrivée des dinosaures dans le monde habité des humains, outre que via ses premières minutes, bâclées. Bien qu’il l’avait expliqué, Colin Trevorrow n’avait pas l’intention de représenter ici les dinosaures en train de terroriser les villes, lui qui considérait cette idée comme irréaliste. Mais nous ne sommes pas d’accord avec cette vision, allant dans la direction opposée de celle vers quoi tendait l’issue de "Fallen Kingdom". Dès lors, on vous invite à (re)voir les deux court-métrages (via les liens ci-dessus) qui introduisaient, tel que dans nos rêves les plus fous, ce "Monde d’Après", et au travers desquels vous en aurez pour vos... dinosaures. Bref, c’est un gâchis, une arnaque et, surtout, d’un réel ennui...
Foutage de tête ou maladresse absolue, le scénario de ce film, censé clôturer la trilogie en apothéose, nous fait justement penser que celle-ci n’avait finalement pas lieu d’être, faute de pouvoir nous mettre quelque chose de consistant sous la dent. Avec ses incohérences aussi grosses qu’un diplodocus, ses facilités scénaristes et ses hasards déconcertants, son humour et son second degré extrêmement faibles, on aurait presque envie de dire que ce "Monde d’Après" est une honte envers le travail de Spielberg. Jamais dans l’intimité, ou dans la recherche d’une mise en scène cherchant à créer une quelconque tension ou dramaturgie, ce troisième film enchaîne les scènes d’action faciles et improbables, voire sombres (le final dans le noir, on en parle ?), au travers desquelles les personnages s’en sortent toujours sans aucune égratignure. Mention spéciale à celui de l’actrice DeWanda Wise (qui arrive d’ailleurs dans l’intrigue comme un cheveu dans la soupe), parfaitement maquillée du début à la fin, et arborant un brushing comme si elle sortait de chez le coiffeur après avoir fui chacun des dinosaures. Quel manque total de crédibilité, allant à l’encontre de ce qu’est censé créer et engendrer un film d’un tel acabit, précédé du mythe du cinéma qu’est "Jurassic Park"...
Pas donc une seule fois la mise en scène de Colin Trevorrow ne fait preuve ici d’un minimum d’audace, de réalisme, d’inventivité, ou de menace. Et puis, l’intrigue tourne toujours autour des mêmes thèmes (génétique, trafic de dinosaures, etc.), quitte à finalement ne jamais avancer dans la chose qu’il nous raconte, ou prendre des risques. Quid aussi de ces criquets dévastateurs, et du combat final titanesque entre carnivores que tout le monde attendait ? C’est finalement un peu ici une chaîne aliment... scénaristique sans fin, et surtout sans faim pour le spectateur. Ainsi, même les quelques promesses du précédent film ne sont ici pas tenues (le cas de Maisie ne sert à rien, exit Blue, soit le seul dinosaure avec lequel on s’était familiarisé, etc.). "Le Monde d’Après" ne fait alors que ce qu’il sait faire, à savoir appâter le spectateur, sans jamais lui offrir une scène qu’il n’est pas prêt d’oublier, ou qu’il n’a tout simplement jamais vue...
On se souvient encore de "Jurassic World", premier du nom, qui nous avait offert une bonne dose de nostalgie, et donner à vivre un rêve d’enfant éveillé, l’occasion de nous en mettre plein les yeux, notamment lors d’un affrontement final grandiose dont on se souvient encore (au contraire de celui de ce dernier film, déjà oublié). Quant à sa suite, signée Juan Antonio Bayona ("L’Orphelinat", "Quelques Minutes Après Minuit"), le cinéaste faisait ce qu’il pouvait avec la patate chaude qu’on lui avait refourguée, lui qui avait réussi, ici et là, à imprégner l’univers des dinosaures de sa patte de narrateur de cinéma fantastique imprégné de ténèbres et d’enfance, en filmant par exemple un manoir gothique ou une chambre d’enfant en proie au danger. Le sous-texte écologique y était également fort, filmant également des scènes touchantes, notamment lors de l’évasion extrêmement impressionnante d’Isla Nublar. On a d’ailleurs encore en tête l’image du diplodocus ne parvenant pas à s’échapper de l’île, victime de la stupidité et de la lâcheté humaine. "Le Monde d’Après", lui, n’a pas grand-chose pour lui. Si on devait ainsi énumérer ses quelques points positifs, on pourrait citer l’utilisation plus appuyée de dinosaures en animatronique (ce qui est déjà en soi très appréciable), l’apparition inédite de dinosaures (le gigantosaure, l’oviraptaure, le lystrosaure, le dimetrodon), ou encore quelques (rares) clins d’œil à "Jurassic Park". Mais cela est bien trop anecdotique face au reste...
"Jurassic World 3 : le Monde d’Après" est le film de la franchise qui risque donc bien de laisser les plus mauvaises empreintes derrière lui. Le rêve éveillé se transforme donc ici en un mauvais rêve, pour ne pas dire en cauchemar. Colin Trevorrow et son équipe ne sont pas parvenus à raviver ici la flamme, leurs dinosaures et leurs apparitions faisant ici le même effet que des personnes déguisées dans un train fantôme à wagonnets, bondissant alors maladroitement sur nous pour tenter de nous impressionner. Triste comparaison. Et pourtant... Cette galerie de dinosaures, certes plus diversifiée, ne se justifie alors que par du pur fan-service, totalement artificiel. En d’autres termes, ce film, vainement complaisant, se regarde sans passion, loin d’être à la hauteur d’un grand final attendu. Enfin, si vous avez eu le malheur de regarder la bande-annonce du film, alors sachez que vous en aurez tout vu, ou presque. Quelle déception donc que ce "Jurassic World 3 : le Monde d’Après"...