➡ Vu au cinéma Caméo des Grignoux - Sortie du film le 31 octobre 2018
Signe(s) particulier(s) :
– dédié aux parents du réalisateur (morts en 1989, juste avant la chute du mur de Berlin), lequel a donné leurs prénoms aux protagonistes du film (Wiktor et Zula - diminutif de Zuzanna) ;
– sélectionné en compétition officielle au Festival de Cannes 2018, où il a remporté le Prix de la mise en scène, et sélectionné par la Pologne pour représenter le pays en tant que candidat à l’Oscar du meilleur film étranger 2018.
Résumé : Pendant la guerre froide, entre la Pologne stalinienne et le Paris bohème des années 1950, un musicien épris de liberté et une jeune chanteuse passionnée vivent un amour impossible dans une époque impossible.
La critique de Julien
Reparti du dernier Festival de Cannes avec le Prix de la mise en scène, le cinéaste polonais Pawel Pawlikowski nous revient avec "Cold War", une romance torturée se déroulant en pleine Guerre Froide, entre un pianiste et chef d’orchestre d’un groupe folklorique professionnel, et une chanteuse.
Récompensé de l’Oscar du meilleur film en langue étrangère pour "IDA" en 2015, le réalisateur d’origine polonaise nous livre ici un drame amoureux dédié à ses parents, sans pour autant raconter leur histoire.
Instantanément, le spectateur retrouve le noir et blanc significatif de l’oeuvre du cinéaste, ainsi que le format de l’image 1.33, quasi-carré. Plutôt que de jouer sur des couleurs inexactes ou d’imiter le rendu des premiers films soviétiques en couleur, le cinéaste a préféré uniformiser l’image suivant deux couleurs, et en accentuant les contrastes entre elles deux. Dès lors, le résultat appuie le caractère dramatique de cette histoire d’amour universel, ainsi que la cruauté et la dureté du régime politique communiste dans lequel elle s’inscrit. À ne pas s’y m’éprendre, "Cold War" n’est pas un film de guerre, mais il l’utilise pour dramatiser son récit. Visuellement, l’image soignée est donc à elle seule un bon prétexte pour se rendre en salle découvrir ce film, d’autant plus au vu de la qualité de la reconstitution de l’époque, tout d’abord en Pologne stalinienne, puis en France parisienne et bohème, avant de revenir à la case départ. On y ressent autant d’un côté la pauvreté et la saleté des campagnes que les privilèges du milieu artistique.
"Cold War" est également renchéri par un travail du son exceptionnel. On peut ainsi y écouter des chants folkloriques chantés par la troupe polonaise Mazowsze, fondée après la guerre, mais toujours en activité. Et sa tombe bien, puisque les deux tourtereaux travaillent tous les deux dans le monde de la musique, ce qui nous permet de nous immerger à de nombreuses reprises dans la culture musicale polonaise, avec ses mélodies, ses voix, et ses danses uniques.
Finalement, "Cold War" est avant tout une expérience cinématographique au service d’une histoire d’amour impossible entre les frontières de l’Est et l’Ouest de l’Europe des années 1950, et pendant une quinzaine d’années. Maintenant, la durée assez courte du film (à peine 90 minutes), qui aligne les ellipses narratives déroutantes, ne permet pas d’installer une empathie pour ses personnages, ce qui est dommage, surtout vis-à-vis de la tournure de leur idylle. On reste alors en surface, d’autant plus que l’on ne comprend pas toujours de manière évidente (faute de dialogues, et d’explications) les enjeux directs qui se dessinent pour chacun des personnages suite à leurs choix, alors qu’ils se succèdent à une certaine cadence.
Lien vers la critique de Cinécure