➡ Vu au Cinéma Caméo des Grignoux - Sortie du film le 14 février 2018
Signe(s) particulier(s) :
– dernier film de la trilogie réalisée par Luca Guadagnino sur le thème du désir, après "Amore" (2010) et "A Bigger Spash" (2016), le remake de "La Piscine" (1969) de Jacques Deray ;
– adapté du premier roman d’André Aciman paru en 2007, ayant été salué pour son érotisme brut et son profond impact émotionnel chez le lecteur ;
– prix du meilleur scénario adapté aux Bafta 2018 pour Luca Guadagnino et James Ivory ;
– quatre nominations aux Oscar 2018 dont celui du meilleur film.
Résumé : Été 1983. Elio Perlman, 17 ans, passe ses vacances dans la villa du XVIIe siècle que possède sa famille en Italie, à jouer de la musique classique, à lire et à flirter avec son amie Marzia. Son père, éminent professeur spécialiste de la culture gréco-romaine, et sa mère, traductrice, lui ont donné une excellente éducation, et il est proche de ses parents. Sa sophistication et ses talents intellectuels font d’Elio un jeune homme mûr pour son âge, mais il conserve aussi une certaine innocence, en particulier pour ce qui touche à l’amour. Un jour, Oliver, un séduisant Américain qui prépare son doctorat, vient travailler auprès du père d’Elio. Elio et Oliver vont bientôt découvrir l’éveil du désir, au cours d’un été ensoleillé dans la campagne italienne qui changera leur vie à jamais.
La critique
Alors que les températures hivernales commencent (enfin) à se ressentir chez nous, un petit voyage en Lombardie, le temps d’un été, n’est pas de refus, et encore moins en compagnie d’Elio, un jeune homme particulièrement touchant et authentique, découvrant pour l’occasion les joies et les peines d’un premier amour. Adapté du roman d’André Aciman, "Call Me By Your Name" clôt la trilogie sur le désir initiée par le cinéaste italien Luca Guadagnino, ayant ici la particularité de se centrer sur un amour homosexuel de jeunesse.
Depuis les premières visions du film lors de différents festivals, la presse semble ne plus s’emballer que pour son jeune acteur principal d’origine franco-américaine, Timothée Chalamet. Et cela se vérifie et se comprend aujourd’hui lors de notre découverte du film. Bien plus qu’un espoir masculin, Timothée Chalamet pourrait déjà s’inscrire dans la cour des grands acteurs de cinéma, tant il transcende avec maestria le rôle d’Elio, et cela à travers toutes les émotions possibles d’un adolescent de son âge. Difficile d’imaginer que l’on puisse acquérir autant de maîtrise de jeu et de naturel devant une caméra avec si peu d’expérience. Pourtant, Timothée Chalamet est juste bouleversant d’un bout à l’autre de cette idylle, dans laquelle quiconque pourrait s’identifier, au-delà du fait qu’elle se déroule entre deux personnes de même sexe. Il incarne ainsi la joie de vivre d’un garçon de son âge, qui découvre son corps et ses pulsions sexuelles pour la première fois, qu’elles soient en accord ou en contradiction avec son environnement. À ce propos, Luca Guadagnino remet en question l’essence même du désir, à savoir la tendance et découverte consciente et suscitée de tensions sexuelles envers quelqu’un. En effet, cette attirance d’Elio pour Oliver vient d’elle-même, sans contrôle de ses émotions. C’est tout simplement là la naissance d’un amour au-delà des frontières de la conscience. Avec passion, le réalisateur retranscrit, avec (un peu trop de) langueur, et tendresse, ce rapport particulier de séduction qui s’installe entre ses deux acteurs principaux, tout en ayant l’intelligence de ne pas catégoriser l’attirance sexuelle initiale de ses personnages, laissant ainsi des portes ouvertes. En découle une œuvre sensible, et profondément humaine.
Face à l’incroyable jeu de Timothée Chalamet, Armie Hammer existe malgré les ellipses entourant son personnage, et satisfait dans la peau de cet Américain désirant, aux cris d’appel non-équivoques envers Elio.
Mine de rien, "Call Me By Your Name" est un film qui invite aussi au voyage, et s’affiche inlassablement comme une magnifique carte-postale vendant la Lombardie, avec ses décors suaves et recoins de paradis. Sa caméra parvient aussi à recontextualiser le dépaysement caractéristique propre d’un été des années quatre-vingt en Italie du Nord, dans une demeure de bonne famille. Enfin, le réalisateur nous offre, le temps d’un dialogue entre père et fils, un discours de tolérance qui touche en plein cœur, d’autant plus venant de cette époque, où la question de l’homosexualité était déjà tabou.