Genre : Animation
Durée : 92’
Acteurs : Jake Gyllenhaal, Dennis Quaid, Jaboukie Young-White, Gabrielle Union, Lucy Liu, Karan Soni...
Synopsis :
Les Clade, une famille d’explorateurs légendaires, part explorer la terre d’Avalonia, peuplée de créatures fantastiques. Les différends entre les membres de la famille pourraient hélas faire échouer cette mission, la plus importante de leur vie.
La critique de Julien
61ème film produit par le studio aux grandes oreilles, fêtant d’ailleurs ici son centenaire avec un nouveau logo commémoratif spécialement créé pour l’événement, et agrémenté d’un nouvel arrangement de la musique "When You Wish Upon a Star", composée ici par Christophe Beck, "Avalonia" nous invite, tel que son sous-titre nous l’indique, dans un voyage de l’étrange, inspiré par le roman de science-fiction de Jules Verné "Voyage au Centre de la Terre" (1864), du "Voyage Fantastique" (1966) de Richard Fleischer, tandis que certains visuels - lors des présentations des personnages - s’inspirent directement des couvertures de Pulp magazines. Alors qu’il met en scène le premier (jeune) personnage principal ouvertement gay de Disney, le studio a notamment fait le choix de ne pas sortir son nouveau film dans une vingtaine de pays, dont au Moyen-Orient, en Afrique, en Asie du Sud, ou encore en Chine, en raison de l’inclusion de ce personnage LGTBQI+, et ainsi ne pas subir la censure, tout comme il n’a pas sorti "Avalonia" en France, en raison d’un conflit au niveau du système de la chronologie des médias dans ce pays, et qui ne plaît pas à la firme. En assumant ses positions et ses choix, Disney a pourtant coulé la carrière commerciale de son film, à l’imaginaire pourtant débordant, plein de bonnes idées, et de bon sens, et de métaphores inspirées...
Le film suit alors les Clades, une famille légendaire d’explorateurs, dont le patriarche, Jaeger, et son jeune fils, Searcher, bravent les montagnes entourant la ville d’Avalonia, en quête de ce qui se trouve derrière celle-ci, elles qui sont beaucoup trop hautes pour les franchir par les airs. Jusqu’au jour où, en pleine exploration, le fils découvrira une plante, qu’il surnommera le Pando, dégageant de l’énergie verte, capable sans doute d’améliorer la vie d’Avalonia. Ce dernier (qui ne veut pas devenir comme son père) et le reste de l’équipe d’expédition imploreront alors Jaeger de cesser sa folie, sauf qu’il continuera seul sa route, en quête de bien plus... Vingt-cinq ans plus tard, Searcher, qui s’est fait un nom en récoltant du Pando et en l’ayant transformé en carburant pour la ville, s’est marié à la pilote Meridian, une femme de couleur, lesquels ont un fils, Ethan, métisse, ayant donc le béguin pour Diazo... Alors qu’ils vivent une vie heureuse et que Searcher espère que son fils reprendra plus tard les rênes de la ferme familiale, Callisto Mal, la cheffe d’Avalonia, recrutera Searcher pour une expédition de la dernière chance, afin de mettre de doigt sur la cause de la perte de pouvoir du Pando, en remontant ainsi à la source souterraine de cette énergie mystérieuse... L’équipage du dirigeable géant, appelé le Venture, s’enfoncera alors dans un gouffre géant où des racines de Pando ont été localisées, jusqu’à en traverser la croûte, et se retrouver dans un monde surréaliste. Sauf qu’Ethan, et son chien à trois pattes, Legend, sont également de l’aventure, contre les indications de son père...
D’emblée, "Avalonia, l’Étrange Voyage" ne se révèle pas très fin dans ses tentatives d’inclusion des minorités, tant cela est amené ici à la grosse louche ; c’est limite s’il manque d’ailleurs ici un drapeau multicolore... Cependant, cela part d’une bonne intention, et voir un père envahissant bien "qu’assez cool" charrier gentiment son fils à chaque fois que celui-ci lui parle de "son ami" est un pas franchi vers la tolérance, vers l’acceptation de la différence, vers l’amour plus fort que tout, ne s’arrêtant dès lors pas au seuil de ce que beaucoup ne croient pas être la normalité. Mais là n’est pas le cœur de ce film d’animation, riche de messages qu’on n’aurait pu imaginer !
Par le biais de ladite plante dégageant de l’énergie verte, le scénario de Qui Nguyen ("Raya et le Dernier Dragon") nous parle de l’emprise de l’être humain sur la nature, et de ce qu’il en fait, utilisant ses ressources sans vraiment savoir ce qu’il en est. On voit ainsi, au travers de ce Pando, un parallèle à l’énergie nucléaire, bien utile en l’état pour vivre actuellement, mais pourrissant pourtant notre chère Terre de l’intérieur. Par un retournement de situation imprévisible, "Avalonia, l’Étrange Voyage" nous parle alors de la nécessité de réinventer notre style de vie, au risque de voir disparaître tout ce que nous avons bâti par nos propres créations, nées ou non de ce que la nature nous a donnée, bien que cela lui appartenait avant tout. Aussi, cette histoire va à l’encontre de la définition de l’idée "d’ennemi" qu’on s’est construite, Ethan faisant comprendre aux siens qu’il faut créer un monde où ce que nous considérons comme le bien et le mal ont une fonction particulière, indispensable à l’équilibre global, sans devoir "tuer les méchants", les tueurs étant finalement eux-mêmes les méchants. Aussi, il est bien évidemment question ici de filiation, lorsqu’un père, qui ne voulait pas suivre lui-même le chemin de son propre père, espère que son fils suivra le sien, tandis que ce premier est devenu à l’image de son paternel en faisant tout pour l’éviter...
Évidemment, "Avalonia, l’Étrange Voyage" ne passe pas à côte de prévisibilités d’écriture et de surprises qui n’en sont pas, l’humour étant également aux abonnés absents, mais le voyage en vaut la chandelle. Ce périple nous offre un monde imaginaire absolument étonnant, aux couleurs magenta, peuplé de créatures de prime à bord repoussantes (mention spéciale à "Splat"), lesquelles semblent sans cesse s’exécuter à une tâche particulière, une fonction et une origine inimaginable, ouvrant les portes à une vie qui nous dépasse, bien plus grande que la nôtre, et sur laquelle nous nous reposons... Car nous voyons aussi, au travers de ce dessin animé, la Terre comme accueil, comme maison, mais avant tout comme un être vivant à part entière, qui crée, qui vit, et respire, et que l’on se doit donc de protéger, d’entretenir, pour en être digne, et cela pour les années à venir, et donc pour les générations à venir... Bref, de beaux messages insoupçonnés dans un film d’animation d’aventure qui divertit, tout en renouvelant un brin son catalogue, loin des contes de fées habituels.