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CINECURE
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Pieter Van Hees (2014)
Waste Land
Sortie le 26 novembre 2014
Article mis en ligne le 27 octobre 2014

par Charles De Clercq

Synopsis : Leo Woeste est inspecteur de la brigade criminelle. Il habite avec Kathleen et Jack, leur fils de 5 ans. Jour après jour, Léo explore les bas-fonds de la ville. Sa famille lui permet de garder pied. Mais cet équilibre est de plus en plus précaire. Kathleen tombe accidentellement enceinte. Alors qu’il doit enquêter sur l’étrange meurtre rituel d’un jeune Congolais avec un nouveau collègue bon vivant, Johnny Rimbaud, il a une aventure avec la sœur de la victime... Tout semble éloigner Léo de ses responsabilités de père de famille. Il s’enfonce dans le waste land...

Acteurs : Jérémie Renier, Natali Broods, Peter Van den Begin, François Beukelaers, Peter Van Den Eede, Babetida Sadjo, Mourade Zeguend.

Que voilà un film belgo-belge-bruxellois dont les francophones retiendront surtout le nom de l’acteur principal Jérémie Renier, la majorité du casting étant surtout connue dans le Nord du pays !

J’étais un peu déçu en sortant de la projection presse (d’où ma note un peu en-dessous de la moyenne). Je disais à un ami critique cinéma, à mes côtés, que je me demandais où le réalisateur voulait en venir. Alors que le scénario me décevait et que j’appréciais la performance (hallucinante !) de Jérémie Renier, lui reconnaissait la valeur du scénario mais regrettait la piètre performance de Renier, et probablement la direction d’acteurs de manière générale.

Il semble, à fureter la Toile, que la gestation du film et le choix des acteurs n’a pas été simple. Voir ici, sur le site de Cinevox. Peu importe. C’est le film tel que nous le voyons qui mérite notre attention.

Il s’agit tout d’abord d’un objet filmique très belge ! Je craignais qu’il ne passe la frontière vers l’Hexagone, mais il semble annoncé en France pour début mars 2015. Très belge parce que nous sommes à Bruxelles, que le film est bilingue (au moins) et que les protagonistes évoluent du français au flamand, parfois dans une même phrase (ceux qui visitent ou habitent Bruxelles ne seront pas surpris). Jérémie Renier joue le rôle d’un policier flamand !!!! dans la police fédérale.

Le film annonce quelques plans après l’ouverture « 5e semaine ».
[attention ne cliquez pas sur la phrase suivante si vous voulez garder la surprise]

Ici, un petit dévoilement de l’intrigue...

On comprendra après la deuxième annonce temporelle (6e semaine) que nous suivons le rythme de la grossesse de la compagne de Léo.

Il nous fera visiter Bruxelles de façon très noire (et au double sens du mot : symbolique mais aussi « physique ») car nous sommes en lien avec la communauté africaine et qu’une partie du film se déroule dans le quartier de Matongué.

L’Afrique (et le Congo en particulier) est un des protagonistes essentiel du film de Pieter Van Hees. L’autre, humain, Léo donc étant, croit-on, descendant de Léopold II, le roi, notre roi donc, qui eut disons, une relation difficile, contentieuse, colonisatrice avec le Congo.

Et cette relation trouble habite également le film qui a une composante policière a priori importante. En effet, l’intrigue, ou plutôt une des intrigues [qui ne peut même plus être principale car elle semble, à terme, ne pas avoir (besoin) de réponse] se base sur la découverte d’un meurtre, probablement, rituel, d’un jeune congolais de 19 ans qui fait le trafic de statuettes africaines. Léo soupçonne(ra) « Géant », un homme d’affaire belge qui a une relation d’amour conflictuelle avec le Congo et ses dirigeants. Leo va le rencontrer à Bruxelles... mais selon d’autres sources il serait retourné au Congo... voire même ne l’aurait jamais quitté !

Mais, peu importe car la piste policière semble seconde, voire même totalement secondaire pour le réalisateur belge. En effet, le film aborde plusieurs axes.

1. Il y a bien sûr le contentieux entre la Belgique et son ancienne colonie ; malheureusement plutôt que de « rendre compte » de cela, le réalisateur semble « régler ses comptes » avec ce passé... et ce qui s’est passé ! Est-ce là l’important ?

2. Car tout se joue entre ce que l’on voit et ce que l’on ne voit pas, entre le réel et l’imaginaire. Tout particulièrement dans la relation entre les policiers blancs, et surtout Léo, avec des congolais, sur fond de maraboutage.

3. Cette relation (qui passe également par une autre, adultérine, celle-là, entre Léo et la soeur aînée du jeune congolais assassiné) nous fait découvrir aussi une descente aux enfers de Léo dont on peut douter à certains moments de la santé mentale, lui qui s’auto-mutile, se scarifie à plusieurs reprises. Quel est cet homme qu’il voit, qu’il poursuit et que d’autres ne voient pas ? La dernière image du film me renvoie à l’univers d’Enemy de Denis Villeneuve (sans en atteindre la force !) dans le thème du double (déjà abordé par plusieurs films cette année) mais je conviens que cette lecture là est personnelle et probablement sujette à caution...

4. et celui du père et de la paternité ! Paternité ascendante et paternité descendante ! En effet, la relation de Léo avec son père, atteint de la maladie l’Alzheimer le renvoie, comme lui, à l’immaturité d’un enfant (et rappelons que l’infans est le « sans parole » ce qui est la situation de Léo face à son père...). Mais Léo a son tour va être père. Une paternité qui peut avorter, au sens propre et au sens figuré...

Tout cela est passionnant, servi par une musique qui ajoute encore à l’ambiance glauque des images et des personnages... mais il y a tant d’ingrédients disparates dans la sauce que celle-ci a bien du mal à prendre.

Alors, malgré le scénario tarabiscoté, il faut probablement aller voir ce film, non seulement parce qu’il est belgo-belge (cocorico) mais surtout, je me répète, pour la prestation proprement hallucinante (et le mot est pesé, choisi en connaissance de cause) de Jérémie Renier !

http://www.youtube.com/embed/gvvuNSQndgk
WASTE LAND Trailer | Festival 2014 - YouTube


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