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CINECURE
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Cinécure est un site appartenant à Charles Declercq et est consacré à ses critiques cinéma, interviews. Si celui-ci produit des émissions consacrées au cinéma sur la radio RCF Bruxelles, celle-ci n’est aucune responsable du site ou de ses contenus et aucun lin contractuel ne les relie. Depuis l’automne 2017, Julien apporte sa collaboration au site qui publie ses critiques.

Farhad Safinia (sous le pseudonyme PB Shemran)
The Professor and the Madman
Sortie du film le 24 juillet 2019
Article mis en ligne le 9 août 2019

par Julien Brnl

Signe(s) particulier(s) :

  • adaptation cinématographique du livre « Le Fou et le Professeur » (« The Surgeon of Crowthorne ») de Simon Winchester, publié pour la première fois en Angleterre en 1998, lequel raconte l’histoire de la création de l’Oxford English Dictionary (OED) ;
  • réalisé et co-scénarisé par Farhad Safinia, co-scénariste et co-producteur du film « Apocalypto » de Mel Gibson.

Résumé : Chester Minor, médecin militaire américain, souffre d’une schizophrénie post-traumatique après les horreurs vécues pendant la guerre de Sécession. Il est interné dans un hôpital psychiatrique britannique suite à un meurtre commis lors d’un séjour à Londres. Il va alors correspondre avec James Murray, le lexicographe et philologue écossais. Depuis 1878, ce dernier est embauché pour rédiger l’OED (Oxford English Dictionary). Chester Minor va également y participer fortement en remplissant des milliers de fiches d’une remarquable qualité qu’il envoie très régulièrement.

La critique de Julien

Voilà maintenant plus d’une vingtaine d’années que Mel Gibson tentait d’adapter le roman « Le fou et le Professeur » (« The Surgeon of Crowthorne ») de Simon Winchester, soit depuis qu’il en possédait les droits (1998), tout comme Luc Besson, les avait également acquis fut un temps. Gibson, qui avait initialement l’intention de le diriger, a finalement embauché le co-scénariste de son film « Apocalypto », tout en campant l’un de deux rôles principaux, avec Sean Penn.

« The Professor and the Madman » raconte la rédaction titanesque de l’Oxford English Dictionary (OED), le dictionnaire de la langue anglaise regroupant tous les mots pouvant exister dans le monde anglophone, et dans toutes leurs nuances. Mais ce travail a été marqué par une rencontre hors du commun, laquelle aurait ainsi suscité le mécontentement de l’Oxford University Press, étant donné la situation et le passé de l’un de ses plus grands contributeurs. James Murray (Gibson), lexicographe et philologue écossais, en fut lui le principal éditeur, de 1879 jusqu’à sa mort, en juillet 1915. Mais il fut aidé dans sa tâche par William Chester Minor (Penn), qui était ainsi un ex-chirurgien de l’armée américaine, alors détenu de 1872 à 1910 à l’asile psychiatrique de Broadmoor, dans le village de Crowthorne, dans le Berkshire, étant donné l’assassina qu’il commis sur un homme du nom de George Merrett qui, selon lui, avait pénétré de force dans sa chambre. Hanté par la paranoïa, il ne fut finalement pas jugé dangereux, et placé dans un logement confortable, où il put acheter, lire des livres, et ainsi consacrer une bonne partie de sa vie à sa tâche volontaire. Libéré sur ordre du ministre de l’Intérieur Winston Churchill suite à la campagne qu’avait menu Murray pour lui, il fut déporté chez lui, aux États-Unis, et diagnostiqué comme souffrant de schizophrénie.

C’est donc d’une histoire plutôt incroyable dont nous parle ce film, elle qui l’est tout autant que sa production, plutôt compliquée. En effet, la société de production Voltage Pictures aurait refusé à Mel Gibson et au réalisateur Farhad Safinia la possibilité de réaliser cinq jours de tournage supplémentaires, étant donné que le film avait déjà dépassé son budget de production, ainsi que son calendrier de tournage. Gibson et Safinia ont alors fini par s’en éloigner, lesquels ont également perdu la bataille juridique contre Voltage Pictures. Le film est finalement distribué par Vertical Entertainment, tandis que Gibson et Safinia ont refusé toute promotion du film, alors que ce dernier est toujours crédité en tant que réalisateur, mais sous le pseudonyme PB Sherman.

D’un point de vue filmographique, « The Professor and the Madman » suit un cahier des charges très classique en tant que film d’époque. Des rues du quartier de Lambeth au centre de Londres, en 1872, jusqu’aux costumes et maquillages, rien n’est laissé au hasard pour reconstituer au mieux, et avec les moyens du bord (une vingtaine de millions de dollars), l’époque en question. Maintenant, le piège, avec ce genre de film, c’est la question de la véracité des propos racontés, et surtout des sous-intrigues, qui viennent mettre un peu de piments à tout ça. Pourtant, ici, dans l’ensemble, force est de constater que tout ce qui est raconté l’est dans les grandes lignes. Évidemment, certains événements vrais ont été enrôlés pour les besoins du film, comme notamment la relation ici ambiguë entre la veuve de l’homme que William Chester Minor avait tué, et ce dernier, elle qui lui rendait souvent visite à l’asile, et lui fournissait même des livres pour l’aider dans sa tâche. Pourtant, aucune trace d’une idylle entre eux dans la réalité, alors que le film en joue pour appuyer de graves conséquences psychologiques sur William Chester Minor, et même physiques, qui même si elles ont existées, ne sont pas nées des mêmes raisons que celles contées... De même, l’amitié naissante entre Murray et Minor est quelque peu bâclée, et sert pourtant un énorme dévouement de la part de Murray, que l’on ne comprend dès lors pas toujours. Aussi, la jalousie et rancœur exprimées par certains délégués de l’Oxford University Press envers Murray, étant donné son manque de diplômes et son autoformation, ne sont pas reprises dans les grandes lignes de l’Histoire.
Et malheureusement, ces intrigues disparates éloignent chacune d’elles un peu le film de son sujet principal, tandis que le montage, qui subit quelques longueurs, n’aide pas non plus à nous reconnecter sur l’essentiel.

L’une des raisons incontestables de découvrir ce film, c’est bien pour son duo d’acteurs principal. Mel Gibson et Sean Penn sont très convaincants dans leur partition, même si Gibson est un peu trop redondant dans ses expressions (la faute à sa barbe) par rapport à son homologue, qui lui est absolument saisissant. Cela faisait longtemps que l’on avait plus vu l’acteur aussi investi dans un rôle, au contraire de Gibson, qui nous avait récemment bluffé dans l’excellent « Dragged Accross Concrete » de S. Craig Zahler.



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