Genre : Action, thriller
Durée : 95’
Acteurs : Gabrielle Union, Jeremy Pope, Raul Castillo, Bokeem Woodbine, McCaul Lombardi...
Synopsis :
Un jeune Noir homosexuel, rejeté par sa mère et ayant peu d’options pour son avenir, décide de s’engager dans les Marines. Il fait tout ce qu’il faut pour réussir dans un système qui le mettrait de côté. Mais malgré les préjugés profondément ancrés et la routine exténuante de l’entraînement de base, il trouve dans cette nouvelle communauté une camaraderie, une force et un soutien inattendus, qui lui donnent un sentiment d’appartenance durement acquis qui va façonner son identité et changer sa vie à jamais.
La critique de Julien
Difficile de rester insensible face au premier film du réalisateur américain Elegance Bratton, inspiré par sa propre vie. Expulsé à 16 ans de chez lui à cause de son homosexualité, ce dernier s’est ainsi engagé au corps des Marines après avoir passé dix ans dans la rue. Faisant suite au documentaire « Pier Kids » (2019), parlant des trois jeunes LGBTQ sans domicile fixe, « The Inspection » marque ainsi son premier passage, sans filtre ni fioriture, au long. On y suit alors Ellis French (Jeremy Pope) qui se sait condamné s’il reste dans la rue, lui qui est rejeté par sa mère (Gabrielle Union), laquelle considère le « bout de papier » qu’est son certificat de naissance comme tout ce qui reste du rêve qu’elle avait pour lui. Ça, c’est dit ! Or, quitte à ne pas être le héros de sa mère, autant être celui de quelqu’un d’autre, et donc de s’enrôler dans l’armée, en quête donc de sens à sa vie, mais également d’appartenance à un groupe. Deux ans après l’invasion et l’occupation de l’Irak, French se retrouvera alors dans le camp d’entraînement de Parris Island, en Caroline du Sud. S’il répond aux exigences physiques, French devra cependant redoubler de vigilance quant à son orientation sexuelle, lui qui sera la cible d’un bizutage quasi mortel sous l’ordre de son instructeur aux abois, Leland Laws (Bokeem Woodbine)...
Acteur de théâtre révélé en 2020 dans la série Netflix de Ryan Murphy « Hollywood », Jeremy Pope crève littéralement l’écran dans « The Inspection », un drame intimiste et mesuré, lui qui jouera prochainement dans « The Collaboration », soit l’adaptation de la pièce du même nom, où il tenait d’ailleurs l’un des deux rôles principaux, dans la peau de l’artiste Jean-Michel Basquiat, face à Paul Bettany dans celle d’Andy Warhol. Tandis qu’il est également chanteur (découvrez sa chaîne YouTube ici), l’acteur étonne à plus d’un titre, affichant ici un profond regard, et déterminé. C’est que son jeune personnage a sans doute vécu bien pire que ce qu’il vit face à ces futurs soldats, gardant sans cesse en ligne de mire ce pour quoi il est là, malgré donc les intimidations, et la violence dont sera ici victime, dans l’univers de l’armée, ne laissant aucune place à l’homosexualité, elle qui y est absolument tabou. À cet égard, l’image de la nouvelle recrue engagée dans les Marines, devant y faire sa place et ses preuves (cf. « Full Metal Jacket » de Stanley Kubrick, sorti en 1987), n’est en rien nouvelle, et embrasse même ici les stéréotypes du genre, tandis que la mise en scène du film, épurée, est sans doute trop aérienne par rapport à ce qu’il nous montre, et nous dit. Qu’importe, cela n’empêche en rien « The Inspection » de toucher, nous qui y voyons une quête de rédemption personnelle, de résilience, mais face à sa propre condition, ainsi qu’un besoin urgent d’identité, trouvée (ou non) ici au sein de l’armée, de l’engagement. Mais ce film ne serait pas aussi poignant sans la partition, brève, mais profonde, de Gabrielle Union, dans le rôle d’une mère qui aimera son fils jusqu’au jour où elle mourra, sans aimer pourtant « ce qu’il est ». On vit dès lors au travers de leur relation éclatée un véritable branle-bas de combat et face-à-face maternel pour l’amour, qui y survit encore, quelque part, ce qui est d’une rare intensité, tel un cri venant du cœur, sans être entendu... « The Inspection » est ainsi une première œuvre à la fois complexe, douloureuse et lumineuse, impartiale, et puissante, malgré quelques errances scénaristiques.
