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CINECURE
L’actualité du cinéma

Cinécure est un site appartenant à Charles Declercq et est consacré à ses critiques cinéma, interviews. Si celui-ci produit des émissions consacrées au cinéma sur la radio RCF Bruxelles, celle-ci n’est aucune responsable du site ou de ses contenus et aucun lin contractuel ne les relie. Depuis l’automne 2017, Julien apporte sa collaboration au site qui publie ses critiques.

Quentin Tarantino
The Hateful Eight (Les huit salopards)
Sortie le 6 janvier 2016
Article mis en ligne le 21 décembre 2015

par Charles De Clercq

Synopsis :
1. Après la Guerre de Sécession, huit voyageurs se retrouvent coincés dans un refuge au milieu des montagnes. Alors que la tempête s’abat au-dessus du massif, ils réalisent qu’ils n’arriveront peut-être pas à rallier Red Rock comme prévu...
2. Quelques années après la Guerre de Sécession, le chasseur de primes John Ruth, dit Le Bourreau, fait route vers Red Rock, où il conduit sa prisonnière Daisy Domergue se faire pendre. Sur leur route, ils rencontrent le Major Marquis Warren, un ancien soldat lui aussi devenu chasseur de primes, et Chris Mannix, le nouveau shérif de Red Rock. Surpris par le blizzard, ils trouvent refuge dans une auberge au milieu des montagnes, où ils sont accueillis par quatre personnages énigmatiques : le confédéré, le mexicain, le cowboy et le court-sur-pattes. Alors que la tempête s’abat au-dessus du massif, l’auberge va abriter une série de tromperies et de trahisons. L’un de ces huit salopards n’est pas celui qu’il prétend être ; il y a fort à parier que tout le monde ne sortira pas vivant de l’auberge de Minnie… (source Allociné).

Acteurs : Jennifer Jason Leigh, Kurt Russell, Samuel L. Jackson, Tim Roth, Walton Goggins, Zoe Bell, Michael Madsen, Bruce Dern (entre autres !).

 Un grand cru. Un grand vu !

Autant l’écrire de suite : les fans de Tarantino ne seront pas déçus. Sans renoncer à son style le réalisateur nous offre une véritable proposition de cinéma, présentée comme son « huitième film », même s’il faut probablement solliciter les chiffres pour faire les coïncider avec son nouveau long métrage. Parce qu’il s’agit vraiment d’un « long », même pour la version brève (2h48 en 35 mm, 2h47 en digital). La version longue, au format 2.76, dure 3h07 en 70 mm. Nous ne verrons pas celle-ci en Belgique. En revanche, elle sera proposée en France et aux Pays-Bas. Elle serait précédée d’un prologue musical de 10 minutes et entrecoupée d’un entracte, comme au théâtre.

 Du théâtre au grand écran !

Tout est presque dit dans ce titre. C’est que tout commence le 19 avril 2014 par une lecture du scénario des « huit salopards » sur la scène du Ace Hotel Theatre de Los Angeles. Ce spectacle accueille près de 1600 fans de Tarantino venus assister à une représentation inédite de son dernier opus dans cette ancienne salle de cinéma. «  Le réalisateur interprète donc le scénario, didascalies comprises, aux côtés de ses plus fidèles comédiens comme Samuel L. Jackson, Kurt Russell, Walton Goggins, Tim Roth, Michael Madsen, Bruce Dern, James Parks, Dana Gourrier et Zoë Bell. » Cette expérience fut si fascinante, si enthousiasmante que cela ne pouvait conduire qu’à la réalisation, au passage au grand écran. Cela se fera en 70 mm, «  idéal pour restituer au mieux les paysages désolés de l’Ouest américain sous la neige et cerner la beauté des sites » selon Tarantino qui choisira le procédé Ultra Panavision 70 qui nécessite des objectifs anamorphiques et n’avait plus été utilisé depuis 1966.

 Du grand écran au théâtre !

Nous ne spoilerons pas le film parce qu’il faut se laisser prendre et surprendre par l’histoire, l’intrigue, les rebondissements, les petits plus que le réalisateur nous offre ainsi qu’une voix off. Il théâtralise son film et l’action et cela à plusieurs niveaux. Ainsi, ce sont des « actes », comme au théâtre, qui se succèdent. Bien plus, l’action est souvent concentrée dans un espace réduit. Ce seront l’intérieur d’une diligence, de l’écurie et surtout de la mercerie de Minnie qui condenseront l’intrigue en la focalisant sur des personnages, souvent ambigus et dont on découvrira peu à peu qui est qui, qui fait quoi et pourquoi. Il s’agit donc, littéralement, d’une « apocalypse » ou des choses cachées nous seront peu à peu dévoilées pour notre plus grand plaisir. Etonnant donc d’avoir choisi le format très large pour de si nombreuses scènes d’intérieur ! Et pourtant c’est totalement réussi et totalement nécessaire ! Robert Richardson, le chef opérateur précise ainsi : « Quand on est dans la même pièce et qu’on filme huit personnages, on peut faire en sorte que le cadre soit constamment rempli », et encore, « chaque spectateur est à même de choisir ce sur quoi il veut concentrer son attention. La largeur du format procure un sentiment de claustrophobie puisqu’on distingue tous les murs de la pièce qui ferment le cadre. Cela suscite une impression d’enfermement et, à mon avis, le jeu des acteurs est démultiplié ».

 Un film de noir et blancs !

Dès l’ouverture du rideau, pardon, le cadre se met en place : un noir, des cadavres de blancs, une diligence et surtout le blanc de la neige sont là. Ce blanc est éclatant, brûle presque l’image et nous savons que nous aurons droit à un vrai western, mais dans la neige ! Bien que l’intrigue soit différente, nous n’avons pu nous empêcher de penser à Day of The Outlaw (La chevauchée des Bannis) réalisé en 1959 par André DeToth. Là aussi, également dans le Wyoming, les femmes sont peu nombreuses, et les lieux hostiles. L’équipe de tournage et les acteurs durent également « affronter des conditions climatiques difficiles : le froid, des tempêtes de neige, du blizzard, mais qui contribuèrent à l’authenticité du film ».

Certes, il y a la neige, le blanc, et le blanc mis à nu par un noir ! Un « Noir », un « nègre » qui revient sans cesse au cœur du film. Ce mot, honni, retentira de nombreuses fois durant le film. L’on se souviendra des controverses au sujet de son emploi dans son film précédent que certains taxèrent de raciste. On a bien l’impression que Tarantino jubile en réutilisant « nègre », en se le réappropriant, nous faisant entendre bien des décennies plus tard, un racisme omniprésent dans la société et aujourd’hui disparu (enfin là, non, ce n’est pas encore gagné) - racisme que l’on découvrira aussi dans le film Chocolat en février - jusqu’à s’en prendre plein les boules !

 Un film haut en couleur et en détails !

S’il s’agit d’un film de noir et de blancs, si le blanc de la neige domine l’image, celle-ci s’assombrit lors des nombreuses scènes d’intérieur. Si le film est en « noir et blanc », il est aussi en couleur, en particulier le rouge sang. Parce que nous avons droit à beaucoup de coups, de coups bas, de coups de coudes et beaucoup de sang. L’hémoglobine est là, fait tache sur l’écran et, il faut l’avouer, c’est proprement jubilatoire. Malgré ou grâce à l’écran large, les détails emplissent l’écran, ainsi les gros plans sur les visages, véritables mines patibulaires, mais aussi sur les accessoires, y compris un petit bonbon sur le sol, entre deux lattes du plancher, ou sur les chevaux, la diligence, les armes, les bottes même ! Et si les images nous en mettent plein les yeux, si le scénario, l’intrigue et les rebondissements nous font rire et nous calent aussi dans le fauteuil, il faut mettre en exergue la bande-son du génial Ennio Morricone ! Le compositeur transcende ici sa musique pour nous offrir un score qui est à la fois un hommage à ce qu’il a fait, en particulier pour le western, mais en nous proposant quelque chose de neuf. C’est comme si, à l’image de Tarantino pour ses films, le compositeur revisitait sa propre musique pour en retirer la quintessence. Concluons en soulignant l’importance des dialogues, ciselés comme des objets d’orfèvrerie. Un véritable coup de cœur !

The Hateful Eight : Trailer HD VO st bil
The Hateful Eight : Trailer HD VO st bil

Après la Guerre de Sécession, huit voyageurs se retrouvent coincés dans un refuge au milieu des montagnes. Alors que la tempête s’abat au-dessus du massif, ils réalisent qu’ils n’arriveront peut-être...
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