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CINECURE
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Marielle Heller (2014)
The Diary of a Teenage Girl
Sortie le 21 octobre 2015
Article mis en ligne le 12 juillet 2015

par Charles De Clercq

Synopsis : Dans les années 70 à San Francisco, une ado artiste brutalement honnête a une aventure avec le petit ami de sa mère.

Acteurs : Bel Powley, Alexander Skarsgård, Kristen Wiig, Christopher Meloni, Margarita Levieva, Miranda Bailey.

Marielle Heller adapte le roman graphique The Diary of a Teenage Girl : An Account in Words and Pictures (2002) de Phoebe Gloeckner. Il s’agit de l’histoire d’une jeune fille de 15 ans Minnie (excellente Bel Powley qui - bien qu’âgée de 21 ans lors du tournage - donne corps à cette ado de 15 ans !) qui a une relation sexuelle suivie d’une aventure avec l’amant de sa mère, Monroe (Alexander Skarsgård). Elle le considère comme le plus bel homme de la terre.

Les dessins et illustrations du film renvoient aussi au roman dont l’auteure fut illustratrice médicale jusqu’à la fin des années 1980. « En 2002, son roman The Diary of a Teenage Girl voit le jour. Il revisite de façon honnête et crue les troubles caractéristiques de l’adolescence. Le livre est composé de ses dessins, d’un ensemble de poèmes, d’illustrations, et de courtes scènes de bandes dessinées. Comme bon nombre de ses nouvelles, ce roman est semi-autobiographique. Gloeckner tient toutefois à garder une certaine dimension fictionnelle lorsqu’il s’agit de raconter sa vie » [1].

Ainsi, les images se mêlent au dessin, à la bande dessinée et à l’intégration de personnages animés au sein du film pour rendre compte au plus près du roman (le physique de Bel Powley est assez proche de l’héroïne de celui-ci). C’est de façon crue, parfois explicite que Minnie Goetze narre ses premiers émois, ses premières expériences en matière de sexe, de drogue, de boissons, de sorties et de relations torrides. Mais c’est aussi sa passion pour le dessin qui est mise en œuvre. Celui-ci lui sert d’exutoire et d’expression de ses expériences qu’elle confie à un magnétophone à cassettes (à l’époque on abrégeait par K7 [2]) ; occasion pour des jeunes de voir un appareil qui leur paraîtra antédiluvien). Elle vit chez sa mère avec sa soeur Gretel (Abby Wait).

Nous sommes au milieu des années 1970, avec comme toile de fond l’affaire Patricia Hearst [3], dont parlent Charlotte, sa mère (Kristen Wiig), et son amant Monroe. Pascal, le père (Christopher Meloni), est absent et tente de renouer le contact avec ses deux filles.

Minnie est aussi en « dialogue » avec la dessinatrice de Comics, Aline Kominsky(en) qui apparaît à l’écran (en mode cartoon) de même que ses personnages. Ainsi nous voyons notre jeune héroïne parcourir et dévorer la bande dessinée de l’auteure qu’elle apprécie et avec qui elle aura un échange épistolaire pour lui demander conseil au sujet de ses propres dessins. Twisted Sisters, les comics de Kominsky, vision underground et alternative des femmes, destinés aux adultes ont été publiés de 1976 à 1994 (en).

Il faut se replacer dans le contexte des années 1970 et de la révolution culturelle pour appréhender ce film et la relation amoureuse et sexuelle d’une jeune ado avec un quadragénaire qui pourrait être son père (thème sulfureux abordé sous un autre ton par Jean-François Richet dans Un moment d’égarement). Situé aujourd’hui le roman de Phoebe Gloeckner ferait scandale. Alexander Skarsgård (Melancholia, True Blood) arrive à transmettre à l’écran les désarrois de cet homme pris entre un double conflit éthique (l’âge de Minnie et le fait qu’il s’agisse de la fille de son amante) et une passion dévorante où le sexe obnubile la raison et tout jugement.

La réalisatrice retranscrit une ambiance et une situation crédibles pour l’époque, bien dans l’air du temps en nous aidant à avoir de l’empathie pour la majorité des protagonistes de son récit et sans porter de jugement sur chacun d’eux. Au-delà des questions éthiques (à replacer dans le contexte d’alors), le film nous invite à avoir un regard tendre et ému sur ces premiers émois d’adolescente et sur leurs interactions sur d’autres jeunes et surtout les adultes qui y sont confrontés. L’adaptation au cinéma des codes graphiques du roman sert vraiment ce film que l’on réservera, à mon estime, à un public averti. Les adultes pourront aussi en discuter avec sérénité avec leurs enfants adolescents qu’ils accompagneraient en salle.



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