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CINECURE
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Maïwenn
Mon roi
Sortie le 21 octobre 2015
Article mis en ligne le 26 septembre 2015

par Charles De Clercq

Synopsis : Tony est admise dans un centre de rééducation après une grave chute de ski. Dépendante du personnel médical et des antidouleurs, elle prend le temps de se remémorer l’histoire tumultueuse qu’elle a vécue avec Georgio. Pourquoi se sont-ils aimés ? Qui est réellement l’homme qu’elle a adoré ? Comment a-t-elle pu se soumettre à cette passion étouffante et destructrice ? Pour Tony c’est une difficile reconstruction qui commence désormais, un travail corporel qui lui permettra peut-être de définitivement se libérer…

Acteurs : Vincent Cassel, Louis Garrel, Emmanuelle Bercot, Ludovic Berthillot, Camille Cottin, Félix Bossuet

 Là-haut sur la montagne et puis la chute !

Toutes les conditions semblaient réunies pour faire un très bon film et les attentes étaient nombreuses, d’autant plus qu’Emmanuelle Bercot, l’actrice principale, a obtenu le prix d’interprétation à Cannes. Tout démarre sur les sommets : une femme, un homme, un enfant ! Ensuite, c’est la chute ! Une chute évacuée, car il y a une ellipse puisqu’on nous en montre les conséquences. Et, dès cette chute, le film va s’enfoncer. C’est que nous rencontrons l’héroïne face à une psychologue qui cherche à faire dire par sa patiente le pourquoi de sa chute, laissant sous-entendre qu’elle en est responsable (la psy serait-elle lacanienne ?). Elle va pour cela jouer sur le sens du mot genou, de Je/Nous et d’une articulation qui ne se plie que vers l’arrière. Jeu de mots peut-être, mais que l’on s’attend plus à entendre en fin d’une soirée trop arrosée que dans une relation thérapeutique.

 Un genou boiteux !

C’est que Tony est doublement blessée : il y a certes son genou, mais il y a aussi son « âme » et la réalisatrice nous montre alors une larme à l’oeil qui va nous aider à entrer dans le mécanisme du film qui consistera en une série de flashbacks.

Et c’est peut-être la partie la plus boiteuse du film. Je comprends ce qui semble être la pédagogie de Maiwenn : faire évoluer le cheminement de son actrice dans sa remémoration d’une relation en même temps que sa revalidation, sa rééducation. Ce seront autant de rencontres avec des jeunes, qui ne sont pas de son milieu à elle qui est avocate, qui seront autant de tiers externes qui feront advenir le passé au présent pour le relire. Cependant, si je comprends l’intention, sa réalisation ne me séduit pas. Elle a quelque chose d’artificiel qui alourdit le film et l’allonge de manière inutile.

 Théâtralisation de l’action

Dans Mia Madre, la réalisatrice (dans le film !) invite ses acteurs soient « reconnus » dans le rôle qu’ils jouent. Il semblerait que plusieurs acteurs répondent ici à ce critère. C’est un peu comme si l’on reconnaissait, en double et en trouble, les images, l’identité de Vincent Cassel, Louis Garrel, Emmanuelle Bercot, Camille Cottin, en surimpression de leur personnage. Singulièrement c’est que la réalisatrice a bien choisi son casting qui est ici troublant de vérité dans l’identification des acteurs à leurs rôles, comme si il y avait une théâtralisation extrême des rôles. Et justement, il y a un peu de cela, un côté théâtral, presque surjoué, ce qui m’a donné l’impression d’assister à l’un de ces jeux de rôles pédagogiques dans mes cours de « relation d’aide » durant ma formation. Il y aurait quelque chose de « thérapeutique » dans ce film, comme si la réalisatrice faisait œuvre cathartique puisque le film s’inspire en partie de sa propre vie, en particulier de sa relation avec l’homme d’affaires Jean-Yves Le Fur [1]. Pourquoi pas ? Le problème est qu’à l’arrivée, cela ne se soit pas passé en toute quiétude, d’où mon inquiétude (!) : j’ai l’impression qu’en ce « travail », la réalisatrice a privilégié (probablement à son corps défendant) le volet « régler ses comptes » plutôt que « rendre compte » !

 Incohérences !

J’ai relevé quelques incohérences, ainsi un mariage à l’église où la confirmation du mariage par le prêtre se fait après l’échange des alliances [2] ou encore ces médicaments comme le Viagra™, le Xanax™ ou autres que l’on achète, comme cela, sans ordonnance [3] ou encore cette scène où Georgio « égratigne » plusieurs voitures avec la sienne alors que personne (propriétaire, riverain ou autorités) ne se manifeste !

 Interprétations

A côté de cela, bravo pour l’interprétation de certains acteurs. Je ne sais s’il fallait le prix d’interprétation pour Emmanuelle Bercot [4] mais d’autres acteurs méritent un prix tant ils excellent à rendre vie avec emphase à des personnages qui sont détestables et l’on se prend même à détester la « victime » et à se demander comment elle a accepté dix ans durant cette situation et son impudeur (elle dont le vagin serait comme la bouche édentée d’une vieille pour reprendre une des réparties du film). Enfin, je dois mettre en avant un second rôle, celui de Louis Garrel (le frère, Solal). Il excelle à donner corps à cet homme à la sagesse et la force tranquille qui avec lucidité pointe et avertit des dangers. Il est le plus crédible de tous et ici encore, il y a derrière le rôle un Garrel lumineux qui éclaire le personnage de l’ombre !



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