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CINECURE
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Paul Thomas Anderson
Licorice Pizza
Sortie du film le 05 janvier 2022
Article mis en ligne le 10 janvier 2022

par Julien Brnl

Genre : Romance

Durée : 133’

Acteurs : Cooper Hoffman, Alana Haim, Sean Penn, Tom Waits, Bradley Cooper, Benny Safdie, Skyler Gisondo, Maya Rudolph, John C. Reilly, Mary Elizabeth Ellis, John Michael Higgins...

Synopsis :
L’histoire d’Alana Kane et Gary Valentine, deux adolescents qui grandissent, s’égarent et tombent amoureux dans la vallée de San Fernando, en 1973.

La critique de Julien

De Paul Thomas Anderson, nous avions notamment adoré son dernier, « Phantom Tread », sorti en 2017, dans lequel, plus minutieux que jamais, il nous livrait le portrait fictif - mais très documenté - d’un grand couturier anglais névrosé dans l’Angleterre victorienne (interprété alors par l’immense Daniel Day-Lewis), lequel allait alors rencontrer sa nouvelle muse (jouée par l’actrice luxembourgeoise Vicky Krieps), elle qui allait faire prendre une toute autre tournure à sa vie. Pour son neuvième long métrage, et second où il officie également en tant que chef-opérateur, le cinéaste revient ici à du cinéma aux apparences plus juvéniles, étant donné qu’il y filme un amour naissant entre Alana (Alana Haim), 25 ans, et Gary (Cooper Hoffman), de dix ans son cadet (si ce n’est treize !), filmée dans la vallée de San Fernando (pour la quatrième fois pour le cinéaste), et se déroulant en 1973. Alors certes, « Licorice Pizza », qui tire son titre d’une ancienne chaîne de magasins de disques installée à l’époque dans le sud de la Californie, repose sur un scénario très court, et pourtant, cette histoire en dit long sur la jeunesse qu’il filme, autrefois plus libre, fougueuse, et ici en pleins émois amoureux.

« Licorice Pizza » marque ici les débuts au cinéma d’Alana Haim et de Cooper Hoffman, la première étant l’une des musiciennes du groupe Haim, qu’elle forme avec ses deux grandes sœurs (et pour lequel le cinéaste avait déjà tourné une dizaine de clips vidéo), tandis que le second est le fils du regretté Philip Seymour Hoffman, avec qui Thomas Anderson avait tourné cinq films. Alors qu’ils se découvrent d’une part acteurs, les deux jeunes se découvrent aussi vis-à-vis de leur personnage, et de la romance qui se joue entre eux. Car le réalisateur filme ici deux êtres qui se cherchent, et s’attendent la plupart du temps, mais sans se l’avouer, lesquels se lieront d’abord d’amitié, après que l’un d’eux ait tenté de courtiser vainement l’autre.

Inspiré par l’adolescence du producteur Gary Goetzman, ami du cinéaste, le personnage de Cooper Hoffman, alors très mature pour son âge, s’essaie alors ici à plusieurs combines pour gagner de l’argent facile, telles qu’une audition pour une émission de variétés, un casting pour un film, une entreprise de lits à eau, ou encore l’ouverture d’une salle d’arcade. Alana, elle, le suivra, la plupart du temps, quittant ainsi son poste d’assistante d’un photographe, bien que souhaitant cependant donner plus de sens à sa vie. Leur quotidien sera alors fait de péripéties inattendues, mettant parfois à mal leur gagne-pain, tandis qu’ils rencontreront sur leur chemin des personnalités anticonformistes que l’on pouvait croiser dans la Vallée de San Fernando au début des années 70, ou tout simplement des personnalités de la culture populaire américaine de ces années-là, comme le compagnon de Barbara Streisand, Jon Peters (Bradley Cooper), l’acteur William Holden (Sean Penn), le candidat aux élections Joel Wachs (Benny Safdie), et bien d’autres encore, mais dont les noms ont été ici changés. Face à ces nombreuses guest-stars, Paul Thomas Anderson offre pourtant une sphère étonnamment intime au jeu des deux acteurs principaux, et principalement pour Alana Haim, dont les sœurs (Este et Danielle) et les parents (Donna et Moti) jouent ici leur propre rôle, pour encore plus d’authenticité, de naturalisme, ce que représente bien « Licorice Pizza ».

Si le dernier né du cinéaste perfectionniste suit une trajectoire imprévisible dans la construction de cette idylle, quant à elle prévisible, les pérégrinations de ce jeune homme et de cette moins jeune femme peinent cependant à soulever des enjeux dignes de ce nom, à trouver un rythme de croisière, comme si « Licorice Pizza » n’était finalement qu’une double photographie amoureuse d’un cinéaste pour sa vallée et son couple, envers lequel on ne se questionne pas sur son écart d’âge, étant donné qu’il n’en était nullement question à l’époque.

Belle, mélancolique, nostalgique, et évoluant durant le contexte de la première crise pétrolière, cette idylle à en devenir, filmée sous le soleil fiévreux de la Californie des années 70, est alors sublimée par la photographie de Michael Bauman et d’Anderson lui-même, lesquels ont d’ailleurs tourné « Licorice Pizza » sur un film 35 mm, en utilisant d’anciens objectifs, afin de recréer la texture du film des années contées. Sans parler ici de la bande-originale pop-rock et électrique du film, à laquelle Jonny Greenwood a participé. Et autant dire qu’on ne peut qu’adhérer à celle-ci, surtout quand il y est question de bon goût, Sonny & Cher en faisant partie ! Bref, le plaisir d’y redécouvrir une époque révolue s’y trouve à chaque coin de rue, face à une jeunesse insouciante, sans filtre, ni fard...



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