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CINECURE
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Cinécure est un site appartenant à Charles Declercq et est consacré à ses critiques cinéma, interviews. Si celui-ci produit des émissions consacrées au cinéma sur la radio RCF Bruxelles, celle-ci n’est aucune responsable du site ou de ses contenus et aucun lin contractuel ne les relie. Depuis l’automne 2017, Julien apporte sa collaboration au site qui publie ses critiques.

Mikhaël Hers
Les Passagers de la Nuit
Sortie du film le 25 mai
Article mis en ligne le 17 juin 2022

par Julien Brnl

Genre : Drame

Durée : 111’

Acteurs : Charlotte Gainsbourg, Emmanuelle Béart, Noée Abita, Ophélia Kolb, Thibault Vinçon, Laurent Poitrenaux, Didier Sandre...

Synopsis :
Paris, années 80. Elisabeth vient d’être quittée par son mari et doit assurer le quotidien de ses deux adolescents, Matthias et Judith. Elle trouve un emploi dans une émission de radio de nuit, où elle fait la connaissance de Talulah, jeune fille désœuvrée qu’elle prend sous son aile. Talulah découvre la chaleur d’un foyer et Matthias la possibilité d’un premier amour, tandis qu’Elisabeth invente son chemin, pour la première fois peut-être. Tous s’aiment, se débattent... leur vie recommencée ?

La critique de Julien

Après « Amanda » (2018), lequel suivait Vincent Lacoste dans la peau d’un oncle qui devait s’occuper de sa nièce (à moins que ça n’était l’inverse) après la mort de la mère de cette dernière à la suite des attentats terroristes parisiens, Mikhaël Hers filme le début des années quatre-vingts, alors que « Les Passagers de la Nuit » débute exactement le 10 mai 1981, soit le jour de l’élection de François Mitterrand, elle qui allait changer la vie de toute une génération. Qu’elle ait changé ou non celle d’Élisabeth (jouée par Charlotte Gainsbourg), ça, on ne le saura jamais. Quoiqu’il en soit, trois ans plus tard, cette dernière se retrouve mère célibataire, avec ses deux adolescents à charge, elle qui doit ainsi refaire sa vie, et chercher, pour la première fois, du travail...

Hommage à une époque qu’il n’a vécu qu’enfant, mais qu’il a toujours fantasmée vivre en tant qu’adolescent, Mikhaël Hers filme le Paris de ces années-là avec un grain sur image, ainsi qu’en la filtrant, et cela afin de retirer l’aspect trop propre du numérique, lui qui a également tourné quelques plans d’extérieur en 35mm. On sent dès lors au travers de ce drame familial et générationnel l’amour du cinéaste pour cette période révolue, lui qui a également été bercé par ses voix mystérieuses de la nuit, dont il a le souvenir, elles qui jouaient le rôle de passerelle entre animateur et auditeur, et qui colorent ici le film, en plus d’appuyer davantage l’imaginaire de cette époque. En effet, le personnage de Charlotte Gainsbourg trouvera ici un petit travail de standardiste sur l’émission de Vanda Dorval (Emmanuelle Béart), « Les Passagers de la nuit », elle qui, souffrant d’insomnie, en était d’ailleurs sa plus fidèle auditrice. C’est donc ici l’histoire d’une femme à la fois fragile (aucune confiance en elle) et forte (elle a vaincu la maladie), ainsi que de son fils, Matthias (Quito Rayon Richter), un étudiant bien plus concentré sur les filles et les poèmes qu’il écrit plutôt que sur ses cours, lesquels vont accueillir chez eux Talulah (Noée Abita, vue l’année dernière dans « Slalom » de Charlène Favier), une jeune fille « de la nuit », désœuvrée et fugueuse, dont on ne saura pas grand-chose de son passé, elle dont la voix est si particulière (le réalisateur y a vu un écho à celle de Pascale Ogier, une actrice française au destin foudroyé). Une séparation, une rencontre, le début d’une histoire d’amour, un passage à l’âge adulte : il y a donc un peu de tout cela dans « Les Passagers de la Nuit »...

Amené par sa bande-originale électronique et synthétique et ses nombreux plans iconiques filmés de nuit s’inscrivant parfaitement dans l’ambiance des eighties, « Les Passagers de la Nuit » est un film planant, regardant ses personnages solitaires avec une grande bienveillance, sans jugement, tout en gardant une distance légitime avec eux et leurs sentiments, qui se laissent cependant deviner, pour mieux ainsi nous prendre d’empathie. Le cinéaste et sa coscénariste Maud Ameline nous racontent alors le quotidien suspendu d’une famille en perte d’équilibre, et en quête d’un nouveau. C’est un film sensible, une déambulation à la fois lumineuse et nocturne au cœur d’une vision amoureuse et sentimentale des années quatre-vingt, bien qu’elle manque de prise de risque, et de force. Mais celle-ci laisse définitivement place ici à la douceur, à l’entraide, à la tendresse, à la résilience. Mais bien qu’on s’avère bercé par ce film, on en apprécie davantage sa cinématographie, ainsi que son actrice principale, Charlotte Gainsbourg, de quasi tous les plans, pour autant qu’on aime sa manière si personnelle de s’exprimer, car son jeu d’actrice est à l’image du film, discret, mais pétillant de sincérité.



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