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Amandine Fredon et Benjamin Massoubre
Le Petit Nicolas - Qu’est-ce qu’on Attend pour être Heureux ?
Sortie du film le 12 octobre 2022
Article mis en ligne le 23 octobre 2022

par Julien Brnl

Genre : Animation, familial

Durée : 82’

Acteurs : Simon Faliu, Alain Chabat, Laurent Lafitte...

Synopsis :
Penchés sur une large feuille blanche quelque part entre Montmartre et Saint-Germain-des-Prés, Jean-Jacques Sempé et René Goscinny donnent vie à un petit garçon rieur et malicieux, le Petit Nicolas. Entre camaraderie, disputes, bagarres, jeux, bêtises, et punitions à la pelle, Nicolas vit une enfance faite de joies et d’apprentissages. Au fil du récit, le garçon se glisse dans l’atelier de ses créateurs, et les interpelle avec drôlerie. Sempé et Goscinny lui raconteront leur rencontre, leur amitié, mais aussi leurs parcours, leurs secrets et leur enfance.

La critique de Julien

Après plusieurs passages au cinéma dans des comédies très anecdotiques (le dernier en date étant « Le Trésor du Petit Nicolas » de Julien Rappeneau, sorti l’année dernière dans l’anonymat), le Petit Nicolas de René Goscinny et Jean-Jacques Sempé revient nous faire un coucou sur grand écran, et cette fois-ci au travers d’un film d’animation. Et quel film ! Présenté au Festival de Cannes 2022, « Qu’est-ce qu’on Attend pour être Heureux ? » a l’intelligence de faire revivre ce très célèbre personnage au détour de différentes nouvelles, tout en nous en apprenant sur sa création et ses créateurs, lesquels nous racontent, au passage, leur vie, et comment ils en sont venus à raconter telle ou telle histoire du Petit Nicolas...

Le film débute alors à la fin des années 50, lorsque Jean-Jacques Sempé et René Goscinny ont créé leur petit parigot, rieur et malicieux. Scénarisée par Anne Goscinny, l’unique ayant droit de son père, cette aventure est à l’image de ses auteurs et du caractère enfantin de leur personnage, lequel interpelle ici ces derniers au fils du récit, en se glissant dans leur atelier, avant de sauter à pieds joints dans plusieurs de ses courtes histoires. Travail minutieux et pourtant très fluide à l’écran, ce métrage est une agréable surprise qui invite alors à la fois à l’imaginaire lié à l’enfance, et à la réalité, par le biais de l’histoire de Goscinny et Sempé, lui racontant leur rencontre, leur amitié, mais aussi leurs parcours, leurs secrets et leur propre enfance, tandis que l’on y comprendra que leurs histoires respectives ont façonné de toute pièce celles du Petit Nicolas.

Tandis qu’il démarre en flash-back par la disparition tragique de Goscinny (doublé par Alain Chabat), en 1977, et questionne donc le Petit Nicolas par Sempé lui-même (doublé par Laurent Lafitte), lui faisant comprendre qu’il ne sera plus animé, cette histoire nous parle d’une part d’amitié et de processus de création et, d’autre part, d’apprentissages et d’enfance, lui qui nous plonge, tel un livre ouvert, au sein d’une formidable double intrigue. Pour cela, ses réalisateurs Amandine Fredon et Benjamin Massoubre ont effectué un sacré travail de mise en scène, lequel, malgré l’absence de structure narrative classique, sont parvenus à donner un irrésistible rythme de croisière à leur œuvre, évoluant en séquences bien distinctes, alors parfaitement montées, car bien aidées par des astuces de transitions, donnant ainsi l’impression de ne voir qu’un seul et même film.

Deux directions artistiques ont dès lors ici été utilisées, la première étant basée sur les illustrations du personnage, et l’autre sur le travail illustratif de Sempé dans d’autres livres ou ses publications dans le New Yorker. La partie des auteurs laisse alors place à une image plus remplie, entièrement colorisée, mais également à des mouvements de caméras, tels que des travelings et des gros plans, tandis que l’autre reflète davantage les aventures illustrées du Petit Nicolas, pour lesquelles les deux réalisateurs se sont astreints à des plans très larges, à des dessins en noir et blanc colorisés à l’aquarelle à l’aide d’une large palette de couleurs fidèles à celles de Sempé, tandis que ces images donnent l’impression de ne pas être « terminées », et d’être griffonnées au rythme des envies et de l’inspiration de Goscinny et Sempé. « Qu’est-ce qu’on Attend pour être Heureux ? » joue alors sur deux tableaux qui s’équilibrent parfaitement, dont Sempé, avant sa mort en août 2022, avait salué le travail. Et bien que ce petit écolier n’a plus rien à voir avec ceux d’aujourd’hui, l’esprit du « Petit Nicolas » est toujours ici le même, le film cherchant à pérenniser la notion d’amitié, de camaraderie, de toutes ces petites choses qui traversent l’esprit d’un petit garçon, comme les filles, ou l’envie de transgresser, de faire des bêtises, ce qui ne changera jamais d’un enfant à l’autre, d’une époque à l’autre...

Moins immédiat pour les plus petits (dès 6 ans, voir plus) par sa mise en scène que l’étaient les différents films sortis ces dernières années, étant donné également le témoignage profondément touchant et autobiographique des auteurs du Petit Nicolas (on y parle de la Shoah, de maltraitance ou encore d’alcoolisme), ce film d’animation s’avère être une petite pépite, rythmée également par le titre de Ray Ventura. C’est un film complet et charmant qui rend autant hommage à ses créateurs qu’à leur personnage tant aimé, entre poésie, nostalgie et candeur enfantine, tandis que Goscinny et Sempé continueront d’exister au travers du Petit Nicolas, pour l’éternité, après qu’il leur ait déjà offert, au travers de ses histoires, l’enfance rêvée qu’ils n’avaient jamais eue...



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